La Grande-Bretagne sous le choc
Le tueur du député était passé par un programme de déradicalisation

L'agresseur qui a mortellement poignardé le député britannique David Amess avait été orienté vers le programme national de lutte contre la radicalisation. Un échec, selon les médias britanniques.
Publié: 17.10.2021 à 06:20 heures
|
Dernière mise à jour: 17.10.2021 à 06:22 heures
Des centaines de personnes ont assisté samedi soir à une veillée aux chandelles sur un terrain de sport proche du lieu où le député David Amess a été poignardé.
Photo: FACUNDO ARRIZABALAGA

Après le meurtre du député britannique David Amess par un radicalisé islamiste, la police a déclaré tard samedi que les enquêteurs ont jusqu'à vendredi pour interroger le suspect. Cet homme de 25 ans a été placé en détention en vertu de la loi sur le terrorisme, ce qui leur permet de prolonger sa détention.

L'enquête révèle selon les premiers éléments «une motivation potentielle lié à l'extrémisme islamiste», selon la police, qui a déclaré effectuer des perquisitions à trois adresses dans la région de Londres dans le cadre d'une «enquête au rythme soutenu».

Ressortissant d'origine somalienne

Le député conservateur David Amess, 69 ans et père de 5 enfants recevait ses administrés dans une église méthodiste à Leigh-on-Sea, à environ 60 km à l'est de Londres, lorsqu'il a été poignardé à mort vendredi.

L'homme interpellé serait un ressortissant britannique d'origine somalienne nommé Ali Harbi Ali, selon la BBC. Orienté il y a plusieurs années vers le programme britannique destiné aux personnes présentant un risque de radicalisation basé sur le volontariat, selon le diffuseur, il n'y aurait pas été très assidu et n'a jamais été officiellement un «sujet d'intérêt» pour l'agence de sécurité nationale.

«Auto-radicalisé»

Les services de police et de sécurité pensent que l'assaillant a agi seul et qu'il était «auto-radicalisé», selon le Sunday Times. Il pourrait avoir été inspiré par Al-Shabab, les islamistes liés à Al-Qaïda en Somalie.

Le père d'Ali Harbi Ali, Harbi Ali Kullane, ancien conseiller du Premier ministre somalien, a confirmé au Sunday Times que son fils était en détention et s'est dit «très traumatisé».

John Lamb, un conseiller conservateur local, a raconté à des médias britanniques que le jeune homme avait attendu patiemment son tour avant de se jeter sur le député et de le poignarder à plusieurs reprises devant deux assistantes du parlementaire.

«On m'a dit qu'il avait poignardé Sir David et qu'il avait simplement attendu dans la salle paroissiale jusqu'à l'arrivée de la police», a déclaré au Telegraph Kevin Buck, vice-président de l'association de circonscription. Il avait pris rendez-vous une semaine à l'avance, selon le Daily Mail.

Veillée aux chandelles

Samedi soir, des centaines de personnes ont assisté à une veillée aux chandelles sur un terrain de sport proche du lieu du crime, observant une minute de silence à la mémoire du député.

En signe d'unité, le Premier ministre conservateur Boris Johnson et le chef du parti d'opposition travailliste, Keir Starmer, avaient déposé des gerbes de fleurs sur les lieux du drame samedi matin.

Boris Johnson a laissé un message saluant un «excellent parlementaire et un collègue et ami très aimé».

De nombreuses personnes, dont des membres de la communauté musulmane, sont venues déposer des bouquets de fleurs et des hommages écrits à la victime.

Le souvenir de Jo Cox

Ce meurtre ravive le traumatisme encore récent de l'assassinat de la députée travailliste Jo Cox en juin 2016. L'élue de 41 ans avait été tuée de plusieurs balles et coups de couteau par un extrémiste de droite, Thomas Mair, 53 ans, une semaine avant le référendum britannique sur l'appartenance à l'Union européenne.

Ces deux drames interrogent sur les dispositifs de sécurité entourant les députés, en particulier au contact du public dans leurs circonscriptions.

Vendredi, la ministre de l'Intérieur Priti Patel a ordonné à la police de revoir les dispositions de sécurité pour les 650 députés et le Sunday Times a rapporté que chaque député pourrait bénéficier d'une protection de sécurité lors de ses rencontres avec le public. «Nous allons continuer, a-t-elle déclaré à la presse. «Nous ne pouvons pas être intimidés par un individu».

Le député travailliste Chris Bryant a suggéré dans une tribune au Guardian que les députés ne rencontrent plus leurs administrés «que sur rendez-vous». «Nous ne voulons pas vivre dans des forteresses. Mais je ne veux pas perdre un autre collègue d'une mort violente», a-t-il expliqué.

D'autres députés ont en revanche organisé comme prévu leurs permanences parlementaires samedi, comme le conservateur Robert Largan qui a affirmé qu'il continuerait à aller à la rencontre des électeurs, appelant sur Twitter à «défendre la démocratie».

Un choc pour la communauté parlementaire

David Amess lui-même avait écrit sur le harcèlement public et les abus en ligne dans son livre publié l'année dernière. «Ces attaques croissantes ont plutôt gâché la grande tradition britannique qui veut que le peuple rencontre ouvertement ses élus politiques», y avait-il avancé.

La police a recensé une augmentation des actes de délinquance visant les parlementaires: +126% entre 2017 et 2018 et +90% sur les quatre premiers mois de 2019, selon ses chiffres.

Déterminé à «examiner la sécurité des députés et toutes les mesures à prendre», le président de la chambre des Communes, Lindsay Hoyle, a souligné que le drame constituait «un choc pour la communauté parlementaire et l'ensemble du pays».

(ATS)

Découvrez nos contenus sponsorisés
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la