La Chine est aussi dans le viseur
Ces sanctions américaines devraient enfin faire mal à Poutine

Les nombreuses sanctions de l'Occident n'ont jusqu'à présent jamais réussi à arrêter Poutine. Les Etats-Unis misent désormais sur un nouveau moyen de pression: bloquer les voies d'approvisionnement de la guerre qui passent par la Chine et d'autres pays.
Publié: 15.06.2024 à 08:26 heures
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Dernière mise à jour: 15.06.2024 à 08:33 heures
Avec ces nouvelles sanctions, les Etats-Unis espèrent pouvoir arrêter le président russe Vladimir Poutine.
Photo: Getty Images
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Guido Felder

Alors que le sommet du G7 bat son plein en Italie et que la conférence du Bürgenstock se profile, les États-Unis continuent de faire pression sur la Russie. Les sanctions actuelles n'étant pas assez efficaces, d'autres mesures sont désormais prises. Et cette fois-ci, les experts prédisent qu'elles devraient vraiment faire mal au président russe Vladimir Poutine.

Ces sanctions dites secondaires visent 300 personnes et entreprises en Russie, mais aussi en Chine, en Turquie et aux Emirats arabes unis, qui offrent au Kremlin la possibilité de contourner les sanctions actuelles. Il s'agit d'entités qui aident la Russie à produire du matériel pour le champ de bataille, indique la Maison-Blanche. Des banques sont notamment concernées.

Paquet de crédits de 50 milliards

La Chine, qui effectue un commerce important avec la Russie, n'a pas pris elle-même de sanctions contre le Kremlin, mais a plutôt décidé d'un partenariat stratégique. Selon les autorités américaines, Pékin est le principal fournisseur de Moscou en composants pour l'armement et pour le développement du secteur énergétique, par exemple pour l'extraction de gaz liquide dans l'Arctique. La Chine ne fournit pas seulement des produits locaux: les technologies d'armement occidentales sont également acheminées vers la Russie via son territoire.

La décision de prendre des sanctions secondaires a été prise juste avant la visite de Joe Biden en Italie, où les chefs d'État et de gouvernement du G7 se réunissent de jeudi à samedi pour discuter des moyens de soutien à l'Ukraine. Dès le premier jour, il a été décidé de financer un paquet de crédits d'un montant d'environ 50 milliards de dollars US à l'aide d'intérêts provenant des avoirs gelés de l'État russe.

L'inflation est en hausse

Pour Ulrich Schmid, expert de la Russie à l'Université de Saint-Gall, une chose est sûre: la Russie ressentira les effets de ces sanctions secondaires. Et ceci alors que les sanctions actuelles font déjà souffrir Moscou dans une certaine mesure, estime-t-il. «L'inflation est remontée à 8%. Les consommateurs le remarquent.»

Avec les nouvelles sanctions, il sera plus difficile pour Poutine de tenir ses promesses de normalité. Jusqu'ici, il avait toujours rassuré les Russes en leur promettant que «l'opération spéciale» ne changeait rien à «la vie normale». Étant donné que les sanctions secondaires visent également les crédits étrangers, il sera clairement plus difficile de financer la coûteuse guerre en Ukraine.

Manque de puces électroniques

Vasily Astrov, expert de la Russie à l'Institut de Vienne pour les comparaisons économiques internationales (WIIW), est, lui aussi, convaincu de leur efficacité. Pour lui, les sanctions secondaires de plus en plus sévères de l'Occident devraient devenir «un problème à court terme» pour la Russie. «Si, comme cela s'est produit récemment, les banques turques n'acceptent soudainement plus de paiements pour les importations russes et si les transactions en yuans chinois deviennent également plus difficiles, la Russie pourrait très bientôt manquer de machines et de composants importants en provenance de l'Occident, comme les puces électroniques», prévoit-il.

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«Pour l'économie russe, la question est plutôt de savoir ce qu'il y aura après la guerre, car elle en est actuellement totalement dépendante»
Vasily Astrov
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Vasily Astrov met toutefois en garde contre un espoir démesuré. Les recettes fiscales du Kremlin, provenant surtout du pétrole et du gaz, ont jailli au premier trimestre 2024. Poutine ne manquera pas d'argent, estime-t-il, du moins pas pour le moment. «Pour l'économie russe, la question est plutôt de savoir ce qu'il y aura après la guerre, car elle en est actuellement totalement dépendante», précise l'expert.

Et la Suisse?

De son côté, la Suisse a pratiquement toujours participé aux sanctions de l'UE jusqu'à présent. Ainsi, des avoirs russes d'un montant de 5,8 milliards de francs, 17 biens immobiliers ainsi que des voitures de luxe ont été bloqués. Les sanctions secondaires américaines, très sévères, seront-elles suivies par Berne? Interrogé à ce sujet, le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) écrit qu'elles sont difficiles à appliquer pour des raisons de droit international. «Jusqu'à présent, les sanctions américaines n'ont été reprises par aucun pays européen. Cela vaut également pour la Suisse.»

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