Le président américain Joe Biden et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'étaient chaleureusement salués à l'aéroport Ben Gourion de Tel Aviv. Mais des divergences d'opinion semblent avoir désormais pris le dessus.
Benjamin Netanyahu fait la sourde oreille
La communication et l'écoute sont des aspects fondamentaux d'une bonne entente diplomatique. Mais Israël ne semble pas prêt d'écouter les appels de Washington concernant l'offensive dans la bande de Gaza.
Les avertissements des États-Unis n'y changeront rien: Benjamin Netanyahu a la ferme intention d'occuper la bande de Gaza. Il a annoncé vouloir assumer, après la guerre et pour une «durée indéterminée, la responsabilité globale de la sécurité» du territoire palestinien.
En 1967, Israël avait déjà occupé la bande de Gaza à la suite de la guerre des Six Jours, opposant Israël à l'Égypte, la Jordanie et la Syrie. L'armée israélienne s'était retirée du territoire en 2005.
Mais cette semaine, l'État hébreu a réitéré son avancée avortée il y a quelques années. Tsahal a désormais progressé vers la capitale, Gaza. Son objectif? Éliminer le Hamas, qui a massacré près de 1400 Israéliens lors de l'attaque du 7 octobre, et libérer les otages.
«Pas de réoccupation»
Les Américains assistent à cette avancée militaire avec inquiétude. Pourtant, sous couvert de soutenir Israël et d'intimider ses adversaires, ils ont récemment envoyé des porte-avions et des avions de combat dans la région.
Mais dans les faits, le président américain Joe Biden exige de Benjamin Netanyahu qu'il mène ses actions militaires en accord avec le droit international humanitaire. Jusqu'à présent, au moins 10'569 personnes, dont de nombreux civils, ont perdu la vie dans la bande de Gaza, selon un nouveau bilan des autorités sanitaires palestiniennes.
Lors du G7 à Tokyo, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a déclaré mercredi qu'Israël ne devrait pas «réoccuper» Gaza si les pays veulent atteindre «une paix et une sécurité durables»: «Pas de réoccupation de la bande de Gaza après la fin du conflit, pas de tentative de blocus ou de siège dans la bande de Gaza, pas de réduction du territoire de Gaza», a proclamé le secrétaire d'Etat devant les ministres des Affaires étrangères du sommet.
Les musulmans américains menacent Joe Biden
Ce que craint le gouvernement américain, c'est que l'offensive israélienne provoque un embrasement généralisé dans toute la région. Des milices au Liban, au Yémen et en Syrie ont déjà pris position, et ont attaqué Israël à plusieurs reprises.
Mais l'administration américaine démocrate a une autre préoccupation en tête: la réélection de Joe Biden. Dans une lettre ouverte, le Conseil national des démocrates musulmans a menacé le président de lui refuser ses voix s'il n'imposait pas un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. Les États-Unis comptent environ 3,5 millions de musulmans. Leurs voix pourraient être décisives, notamment dans les Swing States, ces États disputés par les démocrates et les républicains.
«Israël mène cette guerre seul»
À en croire les réactions d'Israël, la première puissance mondiale semble perdre de son influence. Bruce Riedel, expert du Proche-Orient auprès du groupe de réflexion Brookings à Washington, décrypte cette décroissance dans le «Washington Post»: «Nous avons un gouvernement israélien qui n'écoute pas le monde extérieur, et un Premier ministre israélien dont l'approbation a fortement baissé. Il tente désespérément de trouver un moyen de rester en place en jouant les durs.»
Claudia Brühwiler est experte des États-Unis à l'Université de Saint-Gall. La chercheuse estime qu'il est difficile de faire changer Benjamin Netanyahu d'avis, même pour les Américains: «Israël mène cette guerre seul. Les États-Unis n'ont aucun intérêt à ce que cela change.»
L'influence des États-Unis est relative
L'experte relativise toutefois l'influence qu'ont eu les États-Unis sur Israël jusqu'à présent, notamment sur la politique de colonisation. Le pays dirigé par Joe Biden n'a pas non plus réussi à stopper Israël dans son développement en tant que puissance nucléaire.
«Certes, une relation particulière lie les deux pays depuis 75 ans, poursuit Claudia Brühwiler. Mais les dirigeants israéliens ne poursuivent pas toujours les intérêts nationaux dans le sens des États-Unis». Les États-Unis soutiennent Israël à hauteur de 3,8 milliards de dollars par an. Mais ce soutien financier n'implique pas automatiquement un droit de codécision.