Après le verdict de culpabilité d'Hunter Biden, Donald Trump pourrait tenter d'atteindre son rival Joe Biden, farouchement attaché à sa famille, à travers son fils. Mais la stratégie n'est pas sans risque.
Le camp du républicain a rapidement réagi mardi, après qu'un jury du tribunal de Wilmington, dans l'Etat du Delaware, eut jugé le fils cadet de son rival démocrate coupable de détention illégale d'arme à feu en 2018, sur fond d'addiction au crack. Sans rentrer dans le fond du dossier, l'équipe du milliardaire de 77 ans a estimé que l'affaire n'était «rien d'autre qu'un moyen de détourner l'attention des véritables crimes de la famille Biden».
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Trump devrait en profiter
Les républicains cherchent depuis longtemps à éclabousser le candidat démocrate de 81 ans avec les déboires de son fils, notamment ses affaires douteuses en Chine et en Ukraine. Bien que le verdict de mardi «ne concerne que son fils», Donald Trump «essaiera d'en faire une histoire impliquant le président», prédit Julian Zelizer, professeur à l'Université de Princeton, à l'AFP.
Reste qu'il sera désormais plus difficile pour Donald Trump, récemment condamné à New York, d'accuser son rival d'instrumentaliser le système judiciaire américain tout entier à des fins politiques, puisque ce même système judiciaire vient de condamner Hunter Biden.
«Tout était parfait. Mais il avait une addiction»
Avec ce verdict, Joe Biden pourrait aussi «s'attirer la sympathie des nombreuses familles américaines qui ont des enfants qui leur posent des problèmes», estime la politologue Wendy Schiller.
Interrogé mercredi dernier sur l'affaire, Donald Trump avait lui-même évoqué longuement le cas de son frère Fred Trump Jr., décédé en 1981 à 42 ans, des suites d'alcoolisme. «C'était la plus belle personne que vous ayez jamais vue. Tout était parfait. Mais il avait une addiction», avait-il confié à Fox News.
L'entourage du républicain se souvient aussi qu'en 2020, lors du débat l'opposant à Joe Biden, attaquer le fils cadet de son rival n'avait pas fonctionné. Le démocrate avait marqué des points lorsque, se détournant de Donald Trump et plantant ses yeux dans la caméra, il s'était dit «fier» d'un fils capable d'avoir «surmonté» son addiction. L'impact sur la campagne de Joe Biden pourrait, s'il y en a un, être plus diffus et psychologique. Jusqu'à l'élection, le président octogénaire va être soumis à un rythme éprouvant au possible pour son organisme, mais aussi pour son esprit.
Une période qui ravive des souvenirs douloureux
Or Joe Biden, qui a assuré dans un communiqué qu'il serait «toujours là» pour son fils, n'a pas hésité à bouleverser son emploi du temps pour le rejoindre mardi à Wilmington, alors qu'il vient à peine de rentrer d'un voyage en France, et qu'il repart mercredi en Italie pour le sommet du G7.
Les déboires du fils cadet sont pour Joe Biden un douloureux rappel des épreuves traversées par sa famille, et d'abord la mort en 1972 de sa première épouse et de leur fille encore bébé, dans un accident de voiture auquel ont survécu Hunter et son frère aîné Beau. Puis la mort en 2015 de Beau, ce fils adoré, d'un cancer du cerveau. Le démocrate avait été ébranlé au point de penser au suicide, tandis que Hunter, à la personnalité déjà tourmentée, avait après ce décès sombré dans l'alcool et dans la drogue.
Cela a été rappelé lors du procès dans les détails les plus sordides, et même si Joe Biden n'a pas assisté en personne aux audiences, comment croire que ce grand-père très protecteur n'ait pas été affecté quand la fille de Hunter Biden, sa petite-fille donc, est venue témoigner?
«Je ne pense pas que les électeurs vont rendre Joe Biden responsable de l'addiction ou des comportements de son fils. Mais je pense que la vraie question est l'impact que cela aura sur lui et sur sa famille», a dit David Axelrod, ancien stratège de Barack Obama, au Washington Post.