Hamas et Hezbollah décapités
Effrayant ou formidable? Netanyahu a gagné la guerre du 7 octobre

Le Premier ministre israélien est considéré soit comme un sauveur, soit comme un fossoyeur. Les deux constats sont irréconciliables. Sur le terrain en revanche, la réalité est indiscutable. Il a gagné la guerre déclenchée le 7 octobre.
Publié: 29.09.2024 à 13:57 heures
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Six immeubles d'habitation de Beyrouth Sud ont été détruits par les frappes israéliennes qui ont tué Hassan Nasrallah.
Photo: Anadolu via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick
Au moment même où la frappe contre le QG du Hezbollah était décidée, Benjamin Netanyahu se trouvait à New York, à l'Assemblée générale de l'ONU.
Photo: keystone-sda.ch

Une aura de vainqueur. Des discours plus enflammés que jamais. Un soutien redevenu massif au sein de la population israélienne, lorsqu’il s’agit des opérations militaires menées avec succès contre le Hezbollah. Benjamin Netanyahu n’est plus ce Premier ministre paria, que la communauté internationale accusait d’être un «fou de guerre» au vu de l’effroyable bilan du conflit à Gaza, où plus de 40'000 Palestiniens ont péri depuis l’assaut terroriste du Hamas, le 7 octobre 2023, et la riposte consécutive de l’État hébreu. Cette réalité dérange de nombreux observateurs. Mais elle est indéniable après la mort du leader du Hezbollah Hassan Nasrallah, écrasé sous les frappes israéliennes sur les immeubles d’habitation qui abritaient son QG à Beyrouth sud, vendredi 27 septembre.

Oui, Benjamin Netanyahu sort vainqueur de la guerre du 7 octobre. D’où la très faible probabilité de voir son cabinet de guerre, et le gouvernement israélien de coalition entre la droite et l’extrême-droite, accepter la proposition de cessez-le-feu de 21 jours au sud Liban, formulée jeudi 26 septembre par les États-Unis, la France, l’Australie, l’Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis.

Le recueillement du 7 octobre

Dans quelques jours, Israël plongera dans le recueillement. Les photos et témoignages des 1100 personnes tuées lors de l’assaut du Hamas il y a un an seront partout, dans la presse, dans la rue, dans les têtes. Il va de soi qu’à cette occasion, le Premier ministre israélien sera de nouveau hué, détesté, vilipendé pour ne pas avoir fait de la libération de la centaine d’otages encore aux mains du Hamas à Gaza une priorité absolue. Tous les anti-Netanyahu crieront leur colère, comme ils le font depuis un an, lors de manifestations incessantes. Restent les faits: cet homme devenu pour beaucoup le symbole de l’oppression des Palestiniens et de la guerre permanente – au point que certains activistes le comparent à Hitler – est en train de réussir son élimination systématique des pires ennemis d’Israël.

Comment ce retournement a-t-il été possible? Par une mobilisation sans failles, depuis un an, de tout l’appareil militaire israélien et des services de renseignement, avec le soutien jamais démenti des États-Unis, dont les livraisons d’armes sont indispensables à la conduite des frappes à Gaza et au sud Liban. Netanyahu, en tenant bon face aux pressions internationales et intérieures, quitte à voir s’amonceler les destructions et les cadavres à Gaza, a endossé le costume dont il a toujours rêvé, lui dont le frère aîné Yonathan fut tué lors du raid israélien sur l’aéroport d’Entebbe (Ouganda), le 4 juillet 1976, pour libérer les passagers d’un vol Paris-Tel Aviv, détourné par un commando palestinien. Le costume du vengeur.

Ennemis sauvages

Cette vengeance s’est faite dans le sang et l’horreur. Un an après, la bande de Gaza est en ruines. Toutes les familles palestiniennes comptent des victimes en leur sein. Au sud Liban et dans la plaine de la Bekaa, les villages chiites sont pilonnés, car ils abritent des caches d’armes du Hezbollah. Ce bilan indiffère Netanyahu parce qu’il l’a toujours estimé indispensable.

Pour le Premier ministre israélien, capable de défier les présidents des États-Unis et de refuser leurs injonctions, la force est le seul moyen d’assurer la sécurité d’Israël. L’État hébreu doit inspirer la terreur. Et tous ceux qui s’y opposent sont, comme il l’a répété vendredi devant l’assemblée générale de l’ONU à New York, des propagateurs de «mensonges et de calomnies» car Israël fait face «à des ennemis sauvages qui cherchent à l’anéantir».

Les faits maintenant. Ils sont incontestables. Le Hamas? Une organisation dont le message politique est toujours très puissant, et dont la stature de résistant est peut-être sortie grandie de cette année tragique. Mais une organisation en lambeaux, dont le chef Yahya Sinouar se terre dans les bunkers ou au milieu de civils, entouré sans doute d’otages israéliens qu’il utilise comme boucliers.

Son alter ego politique, Ismaël Haniyeh, a été assassiné le 31 juillet à Téhéran, au cœur de la capitale du régime iranien qui était jusque-là son principal soutien. Ses adjoints opérationnels ont presque tous été tués, comme Mohammed Deif, enseveli sous les bombes le 13 juillet. L’idéologie du Hamas n’est pas morte. Le mouvement peut même se targuer d’avoir réveillé dans le monde la cause palestinienne que même les pays arabes sont prêts à abandonner. Mais le Hamas est à genoux. Brisé. Asphyxié.

Prise de risques totale

Le Hezbollah ensuite? Le mouvement chiite libanais a choisi, dès le 8 octobre, d’engager les hostilités contre Israël en soutien au Hamas. Ses roquettes, ses missiles, ont forcé plus de 70'000 Israéliens à évacuer le nord de leur pays. La riposte de Netanyahu, compliquée sur le plan militaire compte tenu de l’échec israélien de la précédente guerre de 2006, a été une prise de risques totale.

Son pari est que l’Iran, très affaibli, n’a plus les moyens d’entrer en guerre et ne le fera donc pas. Netanyahu sait aussi qu’une bonne partie des pays arabes sunnites, prêts à lâcher les Palestiniens avant le 7 octobre, détestent l’axe chiite entre les Ayatollahs Iraniens, les Houthis du Yemen et le Hezbollah du Liban. Il sait enfin que les Occidentaux ne pourront jamais lui reprocher de tuer les dirigeants d’une milice responsable de nombreux attentats terroristes. La suite est connue? Des frappes ciblées qui tuent plusieurs hauts dirigeants du Hezbollah dont son chef militaire Fouad Chokr le 30 juillet. Puis l’incroyable coup de massue: l’explosion de dix immeubles d’habitation de Beyrouth sud sous lesquels le Hezbollah avait son QG. Avec, à l’intérieur, Hassan Nasrallah, mort à 64 ans.

Que va-t-il faire de cette victoire?

Benjamin Netanyahu l’a emporté. Avec l’appui politique de l’extrême droite israélienne, celle des colons de Cisjordanie et des sionistes fanatiques mais aussi, il faut le reconnaître, avec le soutien tacite d’une population convaincue que l’avenir de l’État hébreu sera meilleur après la mort des leaders du Hamas et du Hezbollah, ses ennemis jurés.

La question maintenant est simple, alors que les frappes se poursuivent sur le Liban: que va-t-il faire de cette victoire?

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