Port-au-Prince est à nouveau ravagée par la violence, poussant de nombreuses familles à fuir vendredi un quartier de la capitale haïtienne, où les affrontements entre groupes armés se sont intensifiés, rapporte un correspondant de l'AFP sur place. «J'en suis à mon cinquième déménagement à cause de la violence des gangs», a confié à l'AFP Nocia, une habitante de 64 ans qui n'a pas souhaité donner son nom complet. «Je n'en peux plus. Je veux quitter la capitale, je ne peux plus supporter cette misère», a-t-elle dit près d'une camionnette qui transportait ses meubles.
Les groupes armés, qui depuis des années sèment la violence à Port-au-Prince, multiplient ces jours-ci des attaques dans plusieurs quartiers qui échappaient jusque-là à leur contrôle, semant la terreur parmi la population. «Si je trouve un moyen, même par bateau, j'évacuerai mes enfants vers le sud d'Haïti, chez ma mère», a confié une autre habitante, Martine. «Je ne vois pas comment la situation peut s'améliorer à Port-au-Prince.»
En mode défensif
Pays des Caraïbes, le plus pauvre des Amériques, Haïti pâtit depuis longtemps des violences de bandes criminelles, accusées de meurtres, viols, pillages et enlèvements contre rançon, dans un contexte de grande instabilité politique. Selon l'Organisation internationale pour les migrations, qui dépend de l'ONU, entre le 14 février et le 5 mars, plus de 40'000 personnes avaient fui leurs quartiers pour échapper à la violence.
En une semaine fin février, Médecins sans frontières a pris en charge «90 victimes directes de violence, un chiffre deux fois supérieur à la moyenne habituelle», avait annoncé l'ONG début mars. Tout Port-au-Prince «risque de tomber aux mains des bandits», qui en contrôlent déjà la majeure partie, alerte Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains.
«La police est plus en mode défensif qu'offensif. Cela profite aux criminels», explique-t-il, déplorant une situation sécuritaire qui se détériore, en dépit de la présence de la force multinationale de sécurité (MMAS).
Mission limitée
Cette force menée par le Kenya et soutenue par l'ONU a commencé à se déployer l'été dernier et compte désormais un peu plus de 1000 policiers de six pays, selon un décompte de l'AFP, bien loin des 2500 attendus. «La mission multinationale est limitée. Elle n'arrive même pas à déployer la moitié de son effectif sur le terrain parce que leurs moyens de transport sont limités», a poursuivi Pierre Espérance.
Vendredi, le gouvernement s'est réuni autour du Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé et a notamment discuté de sécurité, selon le bureau de ce dernier, sans faire d'annonce.