Projet de loi en débat
Emmanuel Macron, président de plus en plus atomique

Le président français souhaite relancer le programme nucléaire du pays en déployant six à quatorze nouveaux réacteurs EPR entre 2035 et 2045. Un projet de loi destiné à réorganiser la sécurité des 18 centrales actives est en discussion à l'Assemblée nationale.
Publié: 13.03.2023 à 15:29 heures
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Dernière mise à jour: 14.03.2023 à 11:16 heures
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Depuis le 30 juin 2020, la centrale nucléaire alsacienne de Fessenheim, frontalière de la Suisse et de l'Allemagne, a été définitivement fermée par les autorités françaises
Photo: DUKAS
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Richard WerlyJournaliste Blick

Oui au nucléaire! Plus que oui, même: c’est un plan de bataille pour l’atome que les députés français ont vu arriver à l’Assemblée nationale, ce lundi 13 mars. Le projet de loi nucléaire présenté par le gouvernement est en effet la réponse directe à cette fièvre mondiale qui s’est emparée de ce secteur, détesté des écologistes en raison de la pollution des déchets radioactifs dont la durée de vie se chiffre en centaines, voire en milliers d’années. Les Verts reprochent également au lobby de l'atome de consommer une impressionnante quantité d'eau pour refroidir les centrales: un peu moins d'un tiers de l'eau utilisée en France sert à cela, alors qu'un nouvel épisode de sécheresse pointe à l'horizon cette année.

Au diable ces arguments. Outre la construction de six à quatorze nouveaux réacteurs qui viendront s’ajouter aux 56 actuellement en activité en France pour assurer l'autosuffisance électrique du pays (70% de la consommation d'électricité en France vient en temps normal du nucléaire, l’Exécutif veut, par ce texte, rassurer tous ceux que la multiplication des incidents techniques inquiète. Il prévoit, par exemple, de fusionner l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) au sein de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), officiellement pour éviter toute déperdition cruciale d’information en cas de crise énergétique majeure.

La coalition de l’atome

Ce «Oui» au nucléaire, la France le défend aussi pour ses voisins, même si son partenaire le plus important en Europe, l’Allemagne, ne veut plus en entendre parler. Le 28 février, Paris était à la manœuvre derrière la formation d’une coalition de onze pays désireux de renforcer leur coopération dans l’énergie atomique.

C’est aussi à Paris que s’est joué, largement, le sort de l’hydrogène produit à partir de l’atome, dont la France avait obtenu la reconnaissance communautaire quelques jours plus tôt. Pendant des mois, les responsables politiques français ont fait pression sur la Commission européenne pour faire valoir que l’hydrogène «vert» peut également provenir d’une électricité nucléaire à faible teneur en carbone, et pas seulement des énergies renouvelables.

Le forcing a été payant. Au final, les pays de l’Union européenne dont le mix énergétique est «à faible teneur en carbone» seront exemptés de certaines contraintes à condition qu’ils investissent dans de nouvelles capacités de production d’énergie renouvelables. Une victoire pour EDF, l’opérateur des 18 centrales de l’Hexagone, dont l’État français est redevenu depuis janvier actionnaire à 90%.

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EDF, justement. Les trois lettres d’Électricité de France résument à elles seules l’intensité de la guerre de l’atome que Paris entend livrer, et gagner, dans cette période de fortes tensions énergétiques engendrées par la guerre en Ukraine et l’interruption des livraisons de gaz et de pétrole russes vers les 27 pays membres de l’UE (sauf la Hongrie, qui a obtenu une dérogation compte tenu de sa dépendance totale envers les hydrocarbures russes).

Les chiffres d’EDF d’abord. Ils donnent le tournis: 64 milliards d’euros de dettes à rembourser! Le casse-tête de la maintenance ensuite: deux nouvelles fissures viennent d’être découvertes, début mars, sur le réacteur numéro 1 de la centrale de Penly, en Seine-Maritime, qui était déjà en maintenance. Pas moins de 14 réacteurs sont aujourd’hui à l’arrêt pour des problèmes similaires.

C’est donc, au-delà d’un plan nucléaire pour l’avenir, une véritable remise en marche de ce secteur qui a lieu en ce moment en France. D’où l’importance du débat parlementaire qui s’ouvre cette semaine, destiné à réorganiser la sécurité du parc de centrales, à propos duquel les élus Verts dénoncent une «loi du silence» systématique des autorités.

Le nucléaire, au service d’un Europe «souveraine»

Et Emmanuel Macron dans tout ça? Pour le président français, pas de doute: l’avenir énergétique de l’Europe souveraine qu’il défend en permanence passe par l’atome. «Notre stratégie est de décarboner nos économies. Il nous faut pour cela des énergies renouvelables, mais celles-ci sont intermittentes, donc pas totalement substituables, même avec nos interconnexions, aux sources de production électrique non intermittentes comme le nucléaire» répète-t-il à chaque fois qu’il le peut.

Marine Le Pen veut rouvrir Fessenheim:

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La réforme du marché européen de l’électricité sera au menu du prochain sommet européen à Bruxelles, les 23 et 24 mars. La Suisse voudrait, si les négociations bilatérales reprennent avec l’Union, y être associée. Avec une difficulté à l’horizon: l’obligation, pour les voisins de la France qui ont décidé d’abandonner le nucléaire, comme la Suisse, d’accepter la prolongation au-delà de 50 ans de tous les réacteurs français qui peuvent l’être.

«Aucun réacteur nucléaire en état de produire ne doit être fermé à l’avenir, sauf raison de sûreté», avait asséné le président à Belfort, en février 2022. La seule centrale nucléaire à avoir fait l’objet d’une fermeture définitive en juin 2020 est celle de Fessenheim, en Alsace, à proximité des frontières helvétique et allemande. Et depuis, des voix s’élèvent, en particulier du côté du Rassemblement national de Marine Le Pen, pour y relancer la production d’électricité.

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