Non à de nouvelles taxes
L'homme le plus riche de France raffole des baisses d'impôts de Trump

Il était l'un des rares invités français à l'investiture de Donald Trump. A la tête du géant du luxe LVMH, Bernard Arnault a pris la parole pour refuser par avance de nouvelles taxes. En saluant au passage les incitations fiscales du Président américain.
Publié: 09:29 heures
|
Dernière mise à jour: 10:13 heures
1/5
Le géant du luxe LVMH est omnniprésent dans les sphéres de décision en France.
Photo: AFP
Blick_Richard_Werly.png
Richard WerlyJournaliste Blick

A 75 ans, Bernard Arnault est un rebelle. La cible de sa colère froide? Le projet de collecter de nouveaux impôts sur les «hauts revenus» et les «superprofits», terme utilisé en France pour désigner les très bons résultats des rares grands groupes internationaux tricolores. Le PDG du géant du luxe LVMH a donc saisi l’occasion trés médiatique de la présentation des résultats de son groupe, mardi 28 janvier, pour s’engouffrer dans la brèche ouverte par Donald Trump. LVMH a beau avoir réalisé 12 milliards d’euros de bénéfices en 2024, son PDG estime que toute nouvelle salve de taxes pour renflouer le déficit public reviendrait à pénaliser le «Made in France»

Que le patron le plus puissant de France, propriétaire du trés influent groupe de presse Les Échos-Le Parisien et de l’hebdomadaire Paris-Match, mette ainsi les pieds dans le plat est une conséquence directe du vent qui souffle aux États-Unis. Bernard Arnault était, rappelons-le, le seul invité français de marque à l’investiture de Donald Trump sous la coupole du Capitole.

En famille au Capitole

L’homme le plus riche du pays (cinquième fortune mondiale) y était en compagnie de son fils Alexandre et de sa fille Delphine. Une présence saluée ainsi par le New York Post, le quotidien populaire de la métropole qui suit depuis toujours les faits et gestes de Trump: «Arnault est quelqu’un que Trump admire et qu’il veut rendre heureux».

Seulement voilà: Bernard Arnault est beaucoup moins heureux d’entendre l’actuel Premier ministre français François Bayrou parler de lever de nouveaux impôts. Le leader centriste, à la tête d’un fragile gouvernement dépourvu de majorité parlementaire depuis le 13 décembre, envisage, pour boucler le budget 2025 qui n’est toujours pas voté, d’instaurer une taxe sur les «hauts revenus». Il s’agirait d’une mesure durable de lutte contre l’optimisation fiscale, intégrée également au budget 2026, capable de rapporter environ deux milliards d’euros à l’État. Lequel affiche une dette publique de 3300 milliards, un record qui fragilise le pays et limite sa marge de manœuvre.

Modèle américain

Pour Bernard Arnault, le modèle à suivre existe. Et il se trouve aux États-Unis, où Donald Trump a promis de nouvelles baisses d’impôts. Selon le magnat du luxe, le climat des affaires y est incomparable. L’envie d’entreprendre y est à son zénith. Et les cadeaux fiscaux envisagés par le nouveau Président pour les entreprises multinationales vont accroitre le décalage.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

Coïncidence du calendrier: la sortie de Bernard Arnault lors de l’assemblée générale des actionnaires de son groupe LVMH (valorisé 362 milliards d’euros, avec près de 200'000 employés en France) est intervenue la veille de la présentation à Bruxelles du nouveau plan européen pour redresser l’économie de l’UE. La création d’un nouveau statut juridique communautaire pour les entreprises désireuses d’opérer sur l’ensemble du continent est à l’agenda. Sans garantie d’aboutir après les négociations entre les 27 pays membres.

Blocage budgétaire

Autre coïncidence, plus importante pour la France. Le blocage fiscal du milliardaire intervient quelques jours avant le vote prévu du budget 2025 à l’Assemblée nationale, et alors que le suspense politique demeure sur la capacité, ou non, du Premier ministre à faire approuver son projet de loi de finances. Pour le moment, la France engage des dépenses publiques sur la base de 2024 grâce à une loi spéciale. Le pays est bloqué. La gauche est divisée, mais exige davantage de concessions sociales. L’immigration surchauffe les esprits. Le tout, alors que Donald Trump, lui, multiplie les annonces pour ouvrir les portes de son pays et de son marché aux multinationales…

Le vent Trump va-t-il libérer la parole d’autres milliardaires français, souvent propriétaires de médias? Bernard Arnault oublie bien sûr, comme beaucoup de ses pairs, de rappeler que son empire, né dans le textile, a bénéficié à l’origine de fonds publics. La réalité est que le milliardaire est incontournable. A Paris, aux Champs-Élysées, il a transformé la devanture d’un immeuble destiné à devenir le futur QG de LVMH en malle Vuitton haute de dix étages. On dit qu’il voudrait ouvrir un restaurant de luxe dans l’enceinte du palais du Louvre. Arnault est partout comme sponsor. Il se plaint régulièrement de la dégradation du quartier parisien proche de la Samaritaine, son grand magasin situé face à la Seine. Sa proximité avec Emmanuel Macron est connue. Seule ombre au tableau: la polémique sur la qualité défectueuse des médailles olympiques que les lauréats ont reçues dans un coffret siglé LVMH…

Et si le syndrome Trump du milliardaire qui entre en politique et rafle tout inspirait un jour l’homme le plus puissant de France?

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la