Le compromis aura été son premier mot. Michel Barnier, 73 ans, est un Premier ministre français qui entend cultiver sa réputation d’homme de dialogue, rompu aux négociations les plus compliquées.
Il a donc entamé son premier entretien télévisé depuis la nomination du nouveau gouvernement samedi par une réhabilitation presque suisse du compromis. «Ce n’est pas de la compromission» a-t-il annoncé. Bref, l’homme se veut ouvert au dialogue avec une Assemblée nationale au sein de laquelle il ne disposera pas de la majorité absolue.
Compromis, mais aussi fermeté sur l’immigration et la fiscalité. Ce sont les deux sujets saillants que le Premier ministre français a évoqués, après avoir averti «qu’il ne faut pas mettre en danger la signature budgétaire de la France», alors que le déficit public et la dette souveraine atteignent des records problématiques. D’emblée, Michel Barnier a d’ailleurs donné un chiffre: 50 milliards d’euros. C’est le montant des intérêts que la France devra payer en 2025 à ses créanciers, majoritairement internationaux.
Solutions pratiques
Et maintenant, à quoi s’attendre? Sur trois chantiers, le nouveau chef du gouvernement a été clair, faisant au passage à plusieurs reprises l’éloge de «solutions pratiques».
Sur la réforme des retraites entrée en vigueur en septembre 2023, pas question de remettre en cause le «cadre financier». Si des aménagements sont apportés, par exemple sur l’âge légal de départ reporté à 64 ans, ils ne devront donc pas aggraver la dépense publique. «Je veux faire confiance aux partenaires sociaux pour améliorer cette loi» a-t-il promis.
Sur les impôts, la réponse est, là aussi, assez nette. Oui, des hausses d’impôts seront possibles pour les plus riches et pour les multinationales a-t-il reconnu après avoir, au passage, dénoncé les «spéculateurs» et mis en garde les grandes banques, avec lesquelles il a travaillé autrefois comme commissaire européen chargé des services financiers. La formule clef? «Je ne vais pas exclure l’effort national qu’il faudra faire pour redresser la situation, que les personnes les plus fortunées participent.»
Sur les migrants, l’exemple allemand est dans son viseur. La décision du chancelier social démocrate Olaf Scholz de rétablir temporairement les contrôles aux frontières a été citée en exemple, de même que les mesures prises par la Suède et le Danemark. «Plus de rigueur, plus de fermeté. On va faire des choses pratiques pour limiter une immigration insupportable», a précisé Michel Barnier. Il s’est engagé à aborder ce sujet «sans tabous ni totems». A l’évidence, un serrement de vis sur les flux migratoires aura lieu. Pas de précision, en revanche, sur l’éventuelle suppression de l’aide médicale d’Etat accordée en France aux étrangers en situation irrégulière.
Michel Barnier plaide donc pour «apprendre la culture du compromis». Il promet qu’il n’y aura pas de confrontation avec Emmanuel Macron, et que la situation n’est pas celle d’une cohabitation. Il a répété qu’il ne s’était pas «couché pour devenir Premier ministre». L'État d’esprit est ainsi résumé: «Moi, ce qui m’intéresse, c’est de créer une ambiance avec l’équipe gouvernementale qui permette à toutes les initiatives, toutes les énergies de s’exprimer, a-t-il assuré. On va parler dans un climat de plus grande cohésion, de plus grande fraternité.»