Une promesse de plus! C’est avant le 14 juillet, jour de la fête nationale française et de la commémoration de la prise de la Bastille en 1789, que François Bayrou fera connaître ses recettes pour désendetter la France. Le Premier ministre français l’a bien répété ce 15 avril, lors de la conférence spéciale sur les finances publiques: son objectif est de trouver 40 milliards d’euros d’économies dans le prochain budget 2026. Quitte, pour cela, à manier la guillotine!
«Ouragan, cyclone, orage…» Tout y est passé, côté vocabulaire, pour désigner la gravité de la situation budgétaire de la République, qui croule sous une dette supérieure à 3300 milliards d’euros, soit 113% de son produit intérieur brut (PIB). La France aux mains de ses créanciers? On en est presque là selon le chef du gouvernement centriste de 73 ans. «Le pays est au bord du surendettement. La réduction de la dette et la réindustrialisation doivent devenir notre obsession, a-t-il déclaré. Et d’ajouter: Si rien n’est fait, la situation deviendra potentiellement irréversible.»
Signal d’alarme
Le plus frappant, dans cette mise en scène destinée à tirer une fois de plus le signal d’alarme dans un pays en déficit budgétaire chronique depuis 1974, est que ce coup de poing sur table n’impressionne pas grand monde en France. Emmanuel Macron? Le président français était, au même moment, affairé à décerner la Légion d’honneur (la plus haute récompense nationale) aux travailleurs qui ont restauré Notre-Dame de Paris.
Le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici? Sa spécialité est de tirer sur l’ambulance en se focalisant sur les années passées. «2023 et 2024 ne sont pas deux années blanches ou deux années perdues, ce sont deux années de retour en arrière, destructrices pour les finances publiques», a-t-il ainsi asséné, mais sans donner de recettes pour l’avenir.
François Bayrou est en réalité bien seul. L’élu des Pyrénées, maire de la ville de Pau, n’a d’ailleurs même pas réussi à convaincre la puissante Association des maires de France à venir, ce 15 avril, écouter son avertissement. L’AMF, présidée par le maire de Cannes David Lisnard, a préféré déplorer l’absence de préparation, en oubliant au passage que les dépenses des collectivités locales ont augmenté de 3,6% en volume entre 2023 et 2024 et leurs dépenses de fonctionnement de 2,6%, un record depuis au moins dix ans!
Pas question de couper!
Bref, pas question de consentir à des coupes budgétaires pourtant indispensables, en sachant que la France est aussi le pays qui, au sein de l’Union européenne, est le plus imposé. 45,6% du PIB pour les prélèvements obligatoires, devant la Belgique et le Danemark!
Alors, quelles solutions? La plus évidente serait de réduire drastiquement le train de vie de l’Etat français qui représente les 3/4 des dépenses publiques. Jugez plutôt: officiellement, selon les chiffres du portail de la fonction publique, la France comptait en 2023 3,7 millions de fonctionnaires, 1,3 million de contractuels employés dans l’administration, 311’000 militaires et 359’600 agents relevant des «autres catégories et statuts». Soit, près de six millions de salariés payés par l’Etat dans un pays où le paiement des retraites représente 14% du PIB. De quoi justifier l’appel de François Bayrou, ce 15 avril, à rectifier le tir dans un «pays qui ne produit pas assez et ne travaille pas assez».
Plus d’impôts? Non
Rendez-vous donc avant le 14 juillet. Plus d’impôts? Bayrou a répondu non, même si la fiscalité sur les patrimoines les plus riches et les entreprises les plus profitables va sans doute s’alourdir. Un nouvel emprunt national, par exemple pour financer l’effort de défense et les trois milliards d’euros supplémentaires que le Premier ministre a promis d’allouer aux armées? Pas au programme.
Restent les baisses de crédits pour les ministères, qui donneront lieu à d’intenses batailles politiques d’ici l’automne, lorsque le projet de loi de finances arrivera à l’Assemblée nationale. Le slogan choisi par François Bayrou, ce mardi 15 avril, était: «La vérité permet d’agir.» A l’entendre, la guillotine paraît en effet programmée. Mais son couperet semble bien émoussé.