État d'urgence au Brésil
Les principales questions et réponses sur l'assaut des partisans de Bolsonaro

Des partisans de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro ont pris d'assaut le quartier du gouvernement dans la capitale Brasilia. Mais pourquoi? Et que dit Bolsonaro à ce sujet? Voici les réponses aux principales questions.
Publié: 09.01.2023 à 11:54 heures
|
Dernière mise à jour: 09.01.2023 à 17:06 heures
1/13
Dans la capitale brésilienne, des milliers de partisans de Jair Bolsonaro ont pris d'assaut le quartier du gouvernement.
Photo: imago/Fotoarena
Johannes Hillig

Que s'est-il passé exactement au Brésil?

Une semaine après la fin du mandat de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro, des partisans radicaux de l'ex-militaire de droite ont pris d'assaut le quartier gouvernemental de la capitale, Brasília. Ils ont pénétré dimanche dans le Congrès, la Cour suprême et le siège du gouvernement, le Palácio do Planalto.

Comment l'assaut a-t-il été donné?

Les partisans radicaux de Jair Bolsonaro qui ont attaqué le quartier gouvernemental ne reconnaissent pas la victoire électorale du politicien de gauche Luiz Inácio Lula da Silva, au pouvoir depuis le début de l'année. Ils voulaient utiliser la violence pour tenter de réinstaller l'ancien président sur le siège qu'il venait de quitter.

Considéré depuis des années comme l'idole de la gauche latino-américaine, Lula s'était imposé le 30 octobre d'une très courte tête face à Jair Bolsonaro lors du second tour des élections présidentielles. Depuis, le politicien de droite n'a pas reconnu sa défaite électorale - et a notamment refusé d'assister à la passation de pouvoir avec Lula.

Comment s'est déroulé l'assaut?

La police a semblé complètement prise au dépourvu. Les milliers de partisans de Jair Bolsonaro ont rapidement abattu les barrages routiers et repoussé les fonctionnaires. Ils se sont retrouvés sur le toit du Congrès, brandissant des drapeaux nationaux brésiliens. Peu après, ils ont également pénétré dans la Cour suprême et le siège du gouvernement.

À l'intérieur des bâtiments, la haine des émeutiers pour le nouveau gouvernement de gauche était évidente. Ils ont renversé des chaises et des bureaux, brisé des vitres, endommagé des œuvres d'art et écrit des slogans sur les murs. Un assaillant a même emporté comme trophée la porte du bureau du juge fédéral Alexandre de Moraes, particulièrement détesté par les partisans de Jair Bolosonaro.

Plusieurs manifestants ont utilisé l'estrade inclinée sous les pupitres du Sénat comme toboggan. Des protestataires ont crié des insultes en direction des sénateurs absents.

Les dommages causés au bâtiment du Congrès, au palais présidentiel et à la Cour suprême sont considérables. Ces bâtiments sont considérés comme des icônes de l'architecture moderne, ils abritent de nombreuses œuvres d'art. Sur des photos publiées sur les réseaux sociaux, on peut voir qu'une peinture de l'artiste Emiliano Cavalcanti (1897-1976) exposée dans le palais présidentiel a été endommagée et présente plusieurs trous.

Combien de temps a duré l'attaque?

Ce n'est qu'au bout de plusieurs heures que les forces de sécurité ont pu reprendre le contrôle de la situation. La police militaire a avancé avec des escadrons de cavaliers et des véhicules blindés vers la place des Trois Pouvoirs, au centre de la capitale. Les forces spéciales ont fait usage de gaz lacrymogènes et des hélicoptères ont survolé le quartier du gouvernement. Environ 230 suspects ont été arrêtés, a annoncé le ministre de la Justice, Flavio Dino.

Des images de la chaîne de télévision CNN Brasil ont montré des partisans de Jair Bolsonaro vêtus de jaune et de vert, les bras croisés dans le dos et encadrés par des policiers, descendant les uns après les autres la rampe du palais présidentiel du Planalto. Un bus transportant des manifestants arrêtés est ensuite parti en direction d'un poste de police.

Au début des émeutes, la police n'a pas fait bonne figure. Depuis plusieurs jours déjà, de nombreux partisans de l'ancien président campaient devant le quartier général des forces armées. Samedi et dimanche, environ 4000 autres partisans de droite sont arrivés en bus dans la capitale. Ils se sont dirigés vers le quartier du gouvernement et ils ont même été escortés par des agents. Des policiers ont pris des selfies avec les manifestants et ont tourné des vidéos sur leurs téléphones portables, comme on a pu le voir à la télévision.

Était-ce la première action des partisans de Bolsonaro?

Non, depuis que Lula a gagné les élections, les partisans de Bolsonaro s'opposent violemment au processus démocratique. Après sa défaite électorale, ils avaient déjà manifesté devant les casernes militaires et bloqué les principales artères. Ils ont exigé une intervention de l'armée pour empêcher un troisième mandat de Lula. Ce politicien de gauche a déjà été chef d'État de 2003 à 2010.

Comment Bolsonaro a-t-il réagi à l'action de ses partisans?

«Piller des bâtiments publics et y pénétrer comme cela a été fait aujourd'hui» est contraire à la «règle des manifestations pacifiques», a écrit Jair Bolsonaro sur Twitter quelques heures après le début des violences. Il s'est toutefois défendu contre les «accusations sans fondement» de l'actuel président Luiz Inácio Lula da Silva, a-t-il écrit. Lula avait accusé Jair Bolsonaro d'avoir «encouragé» les agresseurs.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

Le parti de Bolsonaro a également condamné les attaques. «Aujourd'hui est un triste jour pour la nation brésilienne. Nous ne pouvons pas être d'accord avec l'assaut du Congrès national, a déclaré dans une vidéo le président du Parti libéral (PL), Valdemar Costa Neto. Toutes les manifestations ordonnées sont légitimes. Mais le chaos n'a jamais fait partie des principes de notre nation. Nous condamnons fermement ce comportement. Le droit doit être appliqué pour renforcer notre démocratie.»

Que dit Lula, le président élu?

Le président Lula, qui se trouvait au moment de l'attaque à Araraquara, une ville du sud-est dévastée par des inondations en 2022, a qualifié l'attaque de «sans précédent dans l'histoire du Brésil». Les bailleurs de fonds derrière les protestations paieront pour ces «actes irresponsables et antidémocratiques». Il a qualifié les assaillants de «vandales fascistes».

Quelles sont les conséquences?

Le chef de la sécurité de Brasília, Anderson Torres, était ministre de la Justice sous Jair Bolsonaro. Il est considéré comme un fidèle de l'ex-président. Il a été limogé dimanche. Lula a placé par décret la sécurité publique de la capitale sous contrôle fédéral.

L'ancien chef d'État semble également avoir encore de nombreux sympathisants au sein de la police. Lorsque la foule a pris d'assaut le quartier du gouvernement, seuls quelques fonctionnaires se sont opposés à elle.

Quelles sont les réactions à l'étranger?

Au niveau international, les incidents de Brasília ont suscité l'indignation. Les scènes dans la capitale brésilienne ont rappelé les débordements au siège du Congrès américain à Washington le 6 janvier 2021, lorsque les partisans de Donald Trump avaient pris d'assaut le Capitole, où la défaite électorale du républicain face à Joe Biden devait être authentifiée. La foule avait pénétré de force dans le bâtiment, faisant cinq morts.

Le président américain, Joe Biden, a qualifié dimanche l'attaque de «monstrueuse». «Notre soutien aux institutions démocratiques du Brésil est inébranlable», a déclaré son conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan.

Le représentant de l'UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, a également soutenu le nouveau gouvernement de Lula. «L'UE condamne les actes de violence antidémocratiques qui ont eu lieu le dimanche 8 janvier au cœur du quartier gouvernemental de Brasília, a-t-il fait savoir dimanche soir. La démocratie brésilienne triomphera de la violence et de l'extrémisme.»

Le secrétaire d'État allemand au développement, Niels Annen, a tweeté en anglais qu'il était «incroyable de voir l'attaque de fascistes dans la capitale brésilienne». La communauté internationale se rassemblera derrière le président Lula et les «institutions démocratiques du Brésil», a-t-il soutenu. Le président français, Emmanuel Macron, ainsi que les chefs d'État du Mexique et de l'Argentine, Andrés Manuel López Obrador et Alberto Fernandez, ont également condamné l'attaque des bolsonaristes.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la