Et le consentement, alors?
La campagne espagnole «L’été est à nous» au coeur d'une polémique

Le Ministère espagnol de l’égalité a lancé récemment une campagne inclusive, «Tous les corps sont valides à la plage». Une initiative admirable… enfin, presque. Et pour cause, l’institut à l’origine de l’affiche n’a pas demandé leur consentement aux femmes représentées!
Publié: 02.08.2022 à 14:45 heures
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L'affiche originale de la campagne espagnole.
Photo: Ministère espagnol de l'égalité
Mathilde Jaccard

Quel est le comble pour une campagne inclusive féministe? C'est d’oublier de demander leur consentement aux femmes représentées sur l’affiche! C’est pourtant ce qu’il s’est passé pour la campagne: «Tous les corps sont valides à la plage», récemment lancée par le Ministère espagnol de l’égalité.

L’initiative souhaite mettre fin aux stéréotypes esthétiques du «summer body» en représentant des femmes de corpulences diverses. L’artiste à l’origine de l’affiche s’est inspiré de vraies femmes, mais sans demander de droit à l’image ni de consentement, selon les précisions apportées par le journal «Noticias». Plusieurs mannequins représentées sur l’affiche ont donc dénoncé la méthode utilisée sur les réseaux sociaux.

«Excellente idée, mais mauvaise exécution»

Jeudi dernier, la mannequin britannique Nyome Nicholas-Williams se rend compte que son image a été utilisée sans son consentement et le dénonce sur les réseaux sociaux. «Mon image est utilisée par le gouvernement espagnol, mais ils ne me l’ont pas demandé. C’est une excellente idée, mais une mauvaise exécution!», s’insurge-t-elle.

La mannequin britannique est clairement reconnaissable, sans aucun doute c’est bien son image qui a inspiré l’artiste pour l’affiche. Nyome Nicholas-Williams n’hésite pas à faire part de son incompréhension: «Le truc, c’est que je ne dirais jamais non si c’est pour une bonne cause, mais allez, demandez-moi la permission. C’est tellement frustrant!»

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Sa jambe orthopédique supprimée

Une frustration partagée par d’autres modèles présentes sur l’affiche. Siân Green-Lord, la femme tout à gauche de l’image, n’a pas non plus été contactée afin de donner son consentement, apprend-on dans «Noticias». Mais là n’est pas le pire. Cette jeune femme, dans la «vraie vie», a une prothèse orthopédique à l’une de ses jambes. Un «détail» que l’artiste n’a pas hésité à effacer… «Tous les corps sont valides à la plage», vraiment?

Siân Green-Lord ne décolère pas. Pour elle, c’est bien pire qu’une mauvaise exécution. Et elle l’a fait savoir sur Instagram: «Un ami m’a envoyé une campagne dans laquelle mon image est utilisée, mais dans laquelle ils ont supprimé ma jambe orthopédique. Je ne sais pas comment expliquer la colère que je ressens en ce moment. Ils l’ont prise sans ma permission. C’est bien pire que mal fait.»

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Nyome Nicholas-Williams insiste sur l’importance du consentement, surtout dans ce cas de figure où le corps est utilisé comme élément central: «Il est très important que les femmes consentent à l’utilisation de leur image et de leur corps. Aussi qu’elles soient rémunérées si ces images sont utilisées.»

Le commanditaire n’était pas au courant

Le Women’s Institute, qui est à l’origine de la campagne, affirme qu’il n’était pas au courant qu’il s’agissait de vraies modèles. Mais après les houleuses réactions sur les réseaux, il s’est empressé d’assurer que la situation serait réglée, en prenant contact avec l’artiste de l’affiche.

D’ailleurs, l’auteur de l’affiche, ArteMapache, s’est excusé sur Twitter. Il tente, tant bien que mal, d’imaginer comment réparer les dommages: «Je m’excuse de m’être inspiré de photographies de mannequins pour la campagne et d’avoir utilisé une police sans licence. Après la polémique entourant les droits d’image, j’ai considéré que la meilleure façon d’atténuer les dommages pouvant découler de mon comportement est de répartir les bénéfices qui ont été obtenus de cette œuvre à parts égales entre les protagonistes et l’achat d'une licence de typographie.»

Finalement, c’est au tour du Ministère de l’égalité de prendre la parole. Il s’est contenté de se référer aux déclarations de l’artiste et de l’Institut. En tant qu’organisme adjudicateur, il n’a pas de responsabilité, avance-t-il.


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