Enquête pour «rébellion»
Le président de la Corée du Sud a reçu une interdiction de quitter le territoire

Le ministère sud-coréen de la Justice a annoncé lundi une interdiction de quitter le pays pour le président Yoon Suk Yeol. Celui-ci fait l’objet d’une enquête pour «rébellion» après avoir brièvement instauré la loi martiale il y a six jours.
Publié: 09.12.2024 à 10:08 heures
Lundi, le ministère sud-coréen de la Justice a annoncé une interdiction de quitter le pays pour le président Yoon Suk Yeol.
Photo: IMAGO/NurPhoto
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ATS Agence télégraphique suisse

Le ministère de la Justice sud-coréen a imposé lundi une interdiction de quitter le territoire au président Yoon Suk Yeol. Il se trouve sous le coup d'une enquête pour «rébellion» après sa proclamation éphémère de la loi martiale il y a six jours et est poussé vers la sortie par les siens.

Yoon Suk Yeol a-t-il été frappé par une interdiction de quitter le pays? «Oui, c'est exact», a répondu Bae Sang-up, un responsable des services d'immigration au ministère de la Justice, questionné lors d'une audience parlementaire. L'impopulaire dirigeant de 63 ans est le premier président sud-coréen en exercice à se voir infliger cette sanction.

La Corée du Sud est plongée dans le chaos politique depuis qu'il a proclamé par surprise la loi martiale, tard mardi, avant d'être obligé de l'abroger après six heures à peine, sous la pression du Parlement et de la rue.

L'ex-ministre de la Défense Kim Yong-hyun, en poste au moment de ce coup de force et arrêté dimanche matin, avait déjà été frappé d'une interdiction de quitter le territoire. Le ministre de l'Intérieur Lee Sang-min, également dans ses fonctions lors de l'éphémère loi martiale, a lui démissionné.

Kim Yong-hyun, Lee Sang-min et Yoon Suk Yeol sont tous trois sous le coup d'une enquête pour «rébellion».

«Promesse» de Yoon Suk Yeol

Yoon Suk Yeol a cependant survécu samedi soir à une motion de destitution soumise au vote du Parlement, dominé par l'opposition, son Parti du pouvoir au peuple (PPP) ayant boycotté le scrutin, invalidé faute de quorum.

Le PPP a ensuite expliqué avoir «obtenu» de Yoon Suk Yeol, en échange de ce blocage, sa «promesse» qu'il se retirerait et qu'il laissait la gouvernance à sa formation ainsi qu'au Premier ministre. L'opposition a fustigé lundi des «manoeuvres illégales et anticonstitutionnelles» pour garder le pouvoir.

«Peu importe la manière dont ils tentent de le justifier (...) c'est un deuxième acte de rébellion et un deuxième coup d'Etat, illégal et anticonstitutionnel», a tonné Park Chan-dae, chef du Parti démocrate (principale force de l'opposition) au Parlement.

La Constitution sud-coréenne dispose que le président reste le chef du gouvernement et des armées sauf s'il est dans l'incapacité d'assumer ses fonctions (s'il tombe dans le coma par exemple), démissionne ou est destitué. Dans ces cas-là, le Premier ministre prend le relais jusqu'à la tenue d'une nouvelle élection.

Affirmer que Yoon Suk Yeol peut demeurer à son poste, tout en abandonnant ses pouvoirs au Premier ministre et au PPP, est «une violation flagrante de la Constitution, sans aucune base légale», a cinglé Park Chan-dae.

La situation s'apparente à un «coup d'Etat silencieux», a estimé auprès de l'AFP Kim Hae-won, professeur de droit constitutionnel à la faculté nationale de droit de Busan.

Des enquêtes sont en cours

Les autorités ont par ailleurs convoqué lundi pour interrogatoire le commandant de l'éphémère loi martiale, également frappé d'une interdiction de quitter le pays, tout comme le chef du contre-espionnage. Le président Yoon lui-même pourrait être convoqué, a indiqué la police.

Cette dernière mènera ses recherches «en conformité avec la loi et les règles, sans aucune exception», a assuré Woo Jong-soo, chef des enquêtes de la police nationale.

Malgré ses déboires, le ministère de la Défense a néanmoins affirmé lundi que Yoon Suk Yeol restait à la tête de l'appareil sécuritaire du pays, soulignant la complexité de la situation politique.

«Légalement, (le contrôle des forces armées) est actuellement entre les mains du commandant en chef (Yoon)», a dit Jeon Ha-kyou, porte-parole du ministère.

Nouvelle tentative de destitution

Yoon Suk Yeol a présenté ses excuses samedi pour avoir déclaré la loi martiale, mais n'a pas démissionné. Il avait alors justifié son coup de force par son «désespoir en tant que président», alors que le Parlement torpillait pratiquement toutes ses initiatives. «J'ai causé de l'anxiété et des désagréments au public. Je présente mes excuses sincères», avait-il conclu avant de s'incliner profondément devant les téléspectateurs.

Tard mardi, en proclamant la loi martiale, il avait dit vouloir protéger la Corée du Sud des «forces communistes nord-coréennes» et «éliminer les éléments hostiles à l'Etat». Soldats et policiers avaient été déployés pour mettre le Parlement sous scellés, sans empêcher 190 députés d'y entrer pour voter la levée de cet état d'exception.

Devant l'institution, des milliers de personnes s'étaient rassemblées pour exiger la démission de Yoon Suk Yeol.

Samedi soir, alors que la motion de destitution contre lui était soumise au vote, quelque 150'000 manifestants s'étaient massés devant le Parlement, selon la police. Les organisateurs ont eux revendiqué une affluence d'un million de protestataires.

L'opposition a fixé à samedi sa nouvelle tentative de faire destituer M. Yoon. De nouveaux rassemblements d'ampleur autour de l'Assemblée nationale sont prévus. Le taux d'approbation du président a atteint un plus bas de 11%, selon un nouveau sondage de Gallup publié lundi par les médias locaux.

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