Un article paru dans «The Wall Street Journal» provoque l'émoi. Sous le titre librement traduit «Derrière des portes closes, Biden montre des signes de trébuchement», des républicains et des démocrates avouent ne pas croire à un nouveau mandat du président américain Joe Biden.
L'article affirme que les démocrates le remplaceront pendant la campagne électorale parce qu'il est trop vieux et qu'il n'est plus à la hauteur mentalement. Vrai ou simple propagande des républicains de Donald Trump?
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Qu'y a-t-il de vrai dans ce rapport?
Les auteurs sont deux correspondantes de longue date du «Wall Street Journal» à Washington, Annie Linskey et Siobhan Hughes. Elles écrivent que leur article est basé sur des interviews avec 45 personnes qu'elles ont rencontrées pendant plusieurs mois. Parmi elles se trouvent des démocrates et des républicains.
Le rapport cite des politiciens et des collaborateurs de la Maison-Blanche qui se sont confiés sur le comportement de Joe Biden. Le président américain marmonnerait de manière incompréhensible, fermerait les yeux, ferait des promesses et confondrait les personnes.
Siobhan Hughes a déclaré à CNN: «Nous voulons montrer que Biden est le même derrière les portes fermées qu'en public – pour le meilleur et pour le pire – et non pas le type perspicace que la Maison-Blanche veut toujours nous faire croire.»
Quel est le sérieux du «Wall Street Journal»?
Le «Wall Street Journal» compte environ un million d'abonnés payants en ligne et appartient majoritairement à Rupert Murdoch. Son orientation politique est considérée comme conservatrice et favorable aux républicains. Claudia Brühwiler, spécialiste des Etats-Unis à l'université de Saint-Gall: «Le 'Wall Street Journal' est en principe une source à prendre au sérieux, car le journal respecte des normes journalistiques élevées.»
Comment a réagi Joe Biden?
Le président américain ne s'est pas exprimé sur l'enquête. En revanche, des représentants de la Maison-Blanche et des démocrates contredisent l'article et ont vivement critiqué le journal parce qu'il se réfère en grande partie à des rapports de politiciens républicains.
Ils critiquent surtout le fait que l'ancien porte-parole du Congrès, le républicain Kevin McCarthy, s'exprime largement – lui qui connaît Biden depuis des années. Le «Wall Street Journal» le cite ainsi: «Ce n'est plus la même personne.» Les démocrates notent dans un communiqué que Kevin McCarthy a tout d'abord fait l'éloge de Joe Biden en le qualifiant de «très professionnel, très intelligent et en même temps dur».
Est-il réaliste de penser que Biden sera remplacé?
Sur les réseaux sociaux, on suppose que l'article du «Wall Street Journal» a été réalisée de manière ciblée par des démocrates qui ne croient plus à une victoire électorale de Joe Biden.
Vivek Ramaswamy, qui s'est présenté contre Donald Trump et dont on parle encore en coulisses comme d'un possible vice-président de Trump en 2024, pense lui aussi que Joe Biden pourrait être remplacé. Il justifie cela sur X par la feuille de route des démocrates.
«Il y a une raison pour laquelle les démocrates ont demandé que le premier débat ait lieu avant leur convention nationale», a noté l'ex-concurrent de Trump. C'est lors de cette convention, à la mi-juillet, que les démocrates désigneront officiellement leur candidat à la présidence. Le premier duel télévisé est prévu pour le 27 juin sur CNN.
Qui pourrait remplacer Biden?
Tout d'abord, les démocrates examineraient les chances de la vice-présidente Kamala Harris. Mais elle n'a pas obtenu de succès et n'est pas très populaire.
Le gouverneur de Californie Gavin Newsom est le plus souvent cité. Mais son Etat d'origine clairement dominé par les démocrates pourrait être un handicap dans les Swing States, il serait préférable, selon Claudia Brühwiler, de nommer quelqu'un issu d'un autre Etat: par exemple la gouverneure Gretchen Whitmer du Michigan, un peu plus connue, ou le gouverneur Josh Shapiro de Pennsylvanie.
Un remplaçant de Biden aurait-il une chance contre Trump?
Un changement équivaudrait à une mission suicide. Joe Biden est un maître de la mobilisation, comme il l'a prouvé lors des dernières élections présidentielles mais aussi lors des élections de mi-mandat en 2022. Le président sortant suit obstinément Donald Trump dans les sondages depuis des semaines, à un point de pourcentage près. Un nouveau nom serait sans doute synonyme de chute libre aux démocrates.
«Joe Biden est en principe le genre de démocrate qui a les meilleures chances contre Trump: comparativement modéré, 'old school', relativement équilibré, et sa notoriété nationale en tant que président est suffisamment élevée pour suivre le rythme de la présence médiatique permanente de Trump», analyse Claudia Brühwiler. Les titulaires de mandats bénéficient de certains avantages, surtout lorsque la situation économique est bonne.
Le plus grand défi pour un nouveau candidat est de se faire connaître et de faire en sorte qu'il ou elle puisse participer à une campagne électorale nationale. «Au début, le facteur de nouveauté et de jeunesse jouerait. Mais cela peut vite s'estomper, comme les républicains l'ont appris autrefois avec la candidature de Sarah Palin à la vice-présidence», conclut Claudia Brühwiler.