Il y a dix ans de cela, le rêve de l'Ukraine d'adhérer à l'Union européenne (UE) semblait encore très lointain. En novembre 2013, le président ukrainien de l'époque, Viktor Ianoukovitch, avait renoncé à resserrer les liens avec l'UE, au profit d'une amitié plus étroite avec la Russie.
Cette décision avait réveillé la colère de centaines de manifestants, qui avaient alors envahi la place Maïdan à Kiev. Le mouvement Euromaïdan était né. Le désir des jeunes Ukrainiens de rejoindre leurs voisins occidentaux ne pouvait plus être ignoré. Mais jusqu'à l'invasion de la Russie en février 2022, impossible d'imaginer une adhésion de l'Ukraine dans un futur pas trop lointain.
L'invasion de Vladimir Poutine a contribué à renforcer le souhait de rejoindre l'UE au sein de la population ukrainienne. Selon un sondage réalisé par Civic Synergy, un projet visant à renforcer la participation du public à la mise en œuvre des réformes sur l'intégration européenne en Ukraine, 52 % des participants se sont déclarés favorables à une inclusion en 2018. En décembre 2022, en plein conflit, ils étaient 79%.
L'Ukraine et l'UE veulent négocier, mais...
Mercredi, le rêve d'une majorité des Ukrainiens s'est rapproché. L'UE a annoncé vouloir ouvrir officiellement les négociations d'adhésion avec l'Ukraine et la Moldavie. Mais le chemin pourrait encore être long.
L'Ukraine a encore quelques problèmes à résoudre avant de pouvoir atteindre son objectif. Son plus gros défi, au-delà de la guerre, est la corruption. En 2021, Transparency International a classé l'Ukraine comme le deuxième pays le plus corrompu d'Europe, derrière la Russie.
Des règles strictes attendues
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a énuméré samedi à Kiev tout ce que l'Ukraine devait encore améliorer à cet égard. Parmi sa longue liste, des efforts plus importants dans la lutte contre la corruption sont attendus, ainsi que des règles plus strictes en matière de déclaration d'actifs. En somme, une véritable transparence est nécessaire pour éviter le blanchiment d'argent et les cartels.
Et puis, il y a la guerre. L'Ukraine est confrontée à un défi unique puisqu'elle tente, en plein conflit, de remplir tous les critères d'Ursula von der Leyen. En règle générale, les statuts de l'UE stipulent qu'aucun pays en guerre ne peut rejoindre l'alliance des Etats membres.
Mais l'offensive russe donne également un nouvel élan aux négociations, qui étaient au point mort il y a dix ans. L'adhésion de l'Ukraine à l'UE ne changera pas seulement l'avenir du pays. Elle basculera aussi la future position de l'union vis-à-vis de la Russie.
L'adhésion à l'UE est encore lointaine
L'Europe doit, elle aussi, changer si elle souhaite recevoir l'Ukraine à sa table. L'UE devrait adapter ses structures pour pouvoir accueillir un nouveau membre. Par exemple, l'Ukraine serait en droit d'obtenir un grand nombre de sièges au Parlement européen en raison de sa forte population.
Mais même si l'Ukraine remplit tous ces critères, les portes de l'Europe pourraient bien lui rester fermées. En effet, chacun des 27 États membres peut opposer son veto à l'adhésion d'un autre pays. Dans le cas de l'Ukraine, un pays en particulier risque de le faire: la Hongrie. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán s'oppose depuis le début de la guerre non seulement à l'adhésion de l'Ukraine à l'UE, mais également à la livraison d'armes à ce pays.