Israël avance ses pions sur le plateau du Golan. Depuis la chute du régime de Bachar al-Assad en décembre 2024, l'armée israélienne a renforcé sa présence dans la zone tampon, multipliant les incursions et provoquant la colère des habitants. Démolitions de maisons, accès restreint aux terres agricoles: les tensions sont croissantes.
Pourtant, les soldats avaient assuré que leur présence serait temporaire. Leurs objectifs annoncés étaient de saisir des armes et sécuriser la zone après l'effondrement du régime d'Assad. Mais des indices laissent penser que l'Etat hébreux ne compte pas quitter de si vite la Syrie. «Ils construisent des bases militaires. Comment cela peut-il être temporaire?», s'étonne dans les colonnes du «Washington Post» dimanche 2 février, le maire de Jubata al-Khashab, un village de la province de Qouneitra se trouvant dans la zone de séparation, administré par la Syrie.
Face à cette situation explosive, le nouveau gouvernement syrien reste étrangement silencieux. Celui-ci préfère se concentrer sur sa reconstruction plutôt que d'affronter son voisin.
Des bases militaires en Syrie
Les troupes vont et viennent dans cette zone tampon de 230 km2, censée être démilitarisée depuis le cessez-le-feu entre Israël et la Syrie signé en 1974. Les chars et les soldats ont franchi la ligne Alpha qui sépare le plateau du Golan contrôlé par Israël de la Syrie. Après la chute de Bachar Al-Assad, l'Etat hébreux a déclaré considérer cet accord comme caduc, avançant de plusieurs kilomètres, allant même jusqu'en Syrie, assure des responsables locaux.
Deux nouveaux sites de construction, située dans le territoire qui était jusqu'à peu contrôlés par la Syrie, semblent être des bases d'observation israélienne. Un troisième serait en cours de construction, selon des images satellites analysées par le «Washington Post».
Interrogé à ce sujet par la BBC, l'armée israélienne s'est défendue en expliquant que les forces opéraient à cet endroit «pour protéger les habitants du nord d'Israël». Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé que le déploiement des troupes resterait indéfini, justifiant cette décision par des impératifs de sécurité.
«Une violation contre le peuple syrien»
Murhaf Abu Qasra, ministre syrien de la Défense n'est pas du même avis: «Cette incursion est injustifiée». «C'est une violation contre le peuple syrien», ajoute-t-il. Pour le ministre, les positions précédentes permettaient à Israël de défendre ses frontières.
Pour construire leur base militaire près de Jubata al-Khashab, les forces israéliennes auraient rasé une partie de la faune locale, dont une zone protégée. De plus, les habitants de la région dénoncent l'installation de points de contrôle, la fermeture de routes, la réalisation de raids sur des maisons, les déplacements forcés ainsi que des tirs sur des manifestants.
Le nouveau gouvernement absent
Les forces rebelles, qui contrôlent désormais la majeure partie de la Syrie, sont absentes des zones proches de la frontière. Le nouveau dirigeant syrien, Ahmed al-Sharaa, affirme vouloir respecter l'accord de 1974 sur la zone tampon démilitarisée. Cependant, certains habitants soupçonnent un accord tacite avec Israël.
De son côté, le ministre de la Défense syrien annonce que des forces gouvernementales sont prêtes à reprendre d'anciennes positions du régime, aujourd’hui occupées par Israël. Des négociations sont en cours sous l’égide de l’ONU et des Etats-Unis pour faciliter ce retour. Mais avec la construction de bases militaires, la zone de séparation entre les deux pays semble s'effacer de jour en jour.