Sans passeport vaccinal, la vie en Italie est sévèrement limitée. Le passeport permet d'identifier les personnes vaccinées, celles qui sont guéries et celles dont un test récent s’est révélé négatif. Depuis mercredi, il est nécessaire pour visiter les musées, les théâtres et les zones de loisirs. Des milliers d’Italiens sont descendus dans la rue pour protester contre ce certificat, scandant «A bas la dictature» dans plusieurs villes.
À Gênes, les manifestants portaient des étoiles jaunes avec l’inscription «non-vacciné», qui n'étaient pas sans rappeler les étoiles juives. On les a également vues épinglées sur le torse de certains militants anti-vaccination français, dont des dizaines de milliers protestent contre l’imminence d’une «vaccination obligatoire», affirmant que le pass sanitaire français n’est qu’une étape avant celle-ci.
Sans le «passeport vert», comme le certificat Covid de l’UE est appelé en Italie, l’accès aux lieux fermés tels que les bars et les restaurants sera interdit à partir du 6 août. Les gérants qui n’appliquent pas ces mesures s’exposent à des sanctions sévères. Depuis l’annonce des mesures liées au passeport sanitaire, les réservations pour les rendez-vous de vaccination ont doublé dans certaines régions, selon les autorités italiennes.
L’Allemagne met elle aussi en garde les personnes non vaccinées
En Allemagne aussi, le passeport santé est une question politique très débattue. La chancelière Angela Merkel exclut une approche telle que celle de la France ou de l'Italie, mais le directeur de la chancellerie fédérale Helge Braun a amené quelques précisions qui allaient dans ce sens. Il a ainsi déclaré au journal «Bild am Sonntag» que «les personnes vaccinées auront certainement plus de libertés que les personnes non vaccinées».
Si les infections continuent à augmenter, de telles mesures pourraient donc voir le jour. Malgré les concepts de test, les personnes non-vaccinées devraient réduire leurs contacts. Cela pourrait également signifier «que certaines offres telles que les repas au restaurant, les séances de cinéma et les matches au stade ne seraient plus possibles, même pour les personnes non-vaccinées testées, car le risque résiduel est trop élevé».
Une augmentation des cas pour l’automne
Helge Braun, de la CDU, a reçu le soutien de l’expert en santé du SPD, Karl Lauterbach, pour sa proposition de restrictions concernant les personnes non-vaccinées: «Malheureusement, nous devons nous attendre à une augmentation significative du nombre de cas lorsque les gens reviendront de leurs vacances et se retrouveront à l’intérieur en automne», a-t-il déclaré à la «Süddeutsche Zeitung» lundi.
Nous ne pourrons alors «plus nous contenter de mettre sur un pied d’égalité ceux qui ont été testés et ceux qui ont été vaccinés et se sont rétablis». Il n’y aura «pas d’autre choix que de restreindre l’accès aux salles où de nombreuses personnes se réunissent à proximité de celles qui ont guéri et de celles qui ont été vaccinées».
Le président des Verts allemands, Robert Habeck, s’est également montré ouvert à l’idée de donner aux personnes vaccinées plus de libertés qu’aux personnes non-vaccinées. «A partir du moment où tout le monde s’est vu proposer la vaccination, voici à quoi ressemble la solidarité: vous n’êtes pas obligé de vous faire vacciner, mais vous ne pouvez pas demander à tous les autres de renoncer à leur liberté à cause de votre refus», a-t-il déclaré aux journaux.
Armin Laschet et le FDP s’en mêlent
Ces opinions ont été contrées par le candidat de la CDU au poste de chancelier, Armin Laschet. «Les droits issus de la liberté doivent s’appliquer à tout le monde si l’on ne veut pas de vaccination obligatoire», a-t-il déclaré de manière un peu vague dans une interview diffusée par la chaîne ZDF. Il ne croit pas à la vaccination obligatoire. Mais au contraire, tout doit être fait pour convaincre les gens de se faire vacciner, selon lui.
Le parti libéral-démocrate FDP (centre-droit) souffle dans le même sens. Une chancellerie menaçant de restreindre les personnes non-vaccinées poserait une mesure «clairement anticonstitutionnelle», a déclaré le vice-président du FDP Wolfgang Kubicki, accusant Helge Braun de vouloir «introduire la vaccination obligatoire par la petite porte».
Le chef du parti, Christian Lindner, a commenté dans une interview de la chaîne ARD: «S’il n’y a pas de risque de la part des personnes vaccinées, guéries et testées négatives, alors vous ne pouvez pas prévoir plus de restrictions de liberté pour celles-ci.»
Une campagne de vaccination faible
Alors que le variant Delta fait à nouveau augmenter le nombre de nouvelles infections dans le pays, la campagne de vaccination en Allemagne ne progresse que peu. Selon Helge Braun, si aucune mesure n’est prise, la courbe pourrait continuer d'augmenter de manière à ce que le pays compte 100’000 nouvelles infections par jour en septembre. Il est donc urgent de réagir. Si le taux de vaccination ne s’accélère pas de manière significative et si Delta n’est pas ralenti, a ajouté Helge Braun, il faudra s’attendre à un changement de stratégie de la part des responsables politiques dans la lutte contre la pandémie.
En France, le salaire sera suspendu
Le gouvernement français a tranché: il considère qu’un pass sanitaire obligatoire est la seule alternative à la réintroduction des couvre-feux. Tard dans la soirée de dimanche, le parlement français a adopté la vaccination obligatoire du personnel de santé et l’extension du passeport sanitaire par 156 voix pour, 60 contre et 14 abstentions.
Le pass sanitaire sera également obligatoire dans les restaurants, les bars, les centres commerciaux et les trains longue distance. Contrairement à la proposition du gouvernement, les personnes refusant de se faire vacciner dans le secteur de la santé et des soins, ainsi que les pompiers et les secouristes, ne seront cependant pas licenciés, mais leur salaire sera suspendu.
Comparaisons avec la persécution des Juifs
Pour le mouvement de protestation, il s’agit d’une discrimination systématique: le gouvernement est décrit comme une dictature. Outre les étoiles jaunes, d’autres comparaisons avec la persécution des Juifs durant la Seconde guerre mondiale ont pu être observées lors des marches de protestation contre un certificat de vaccination obligatoire.
On a ainsi même pu lire sur une pancarte «Pass macht frei» (Le pass sanitaire rend libre), faisant allusion au camp de concentration nazi d’Auschwitz, et l’inscription «Arbeit macht frei» (Le travail rend libre).
Macron fustige «l’irresponsabilité et l’égoïsme»
Le Sénat et le Parlement français ont accéléré l’adoption de la question par leurs chambres. Les débats étaient animés et difficiles. Claire Hédon, Défenseure des droits, a mis en garde contre une division de la société et des mesures disproportionnées qui conduiraient «une partie de la société à contrôler une autre partie».
Le président Emmanuel Macron, quant à lui, a vivement critiqué les manifestants. La vaccination reste la protection la plus efficace contre la pandémie, tonne-t-il. «Que vaut votre liberté si vous dites que vous ne voulez pas vous faire vacciner, mais que demain vous infectez votre père, votre mère ou moi-même?», a déclaré Emmanuel Macron en visite à Tahiti. «Je suis une victime de votre liberté. Ce n’est pas la liberté», a-t-il. «C’est de l’irresponsabilité et de l’égoïsme.»
Dans une concession aux opposants, aucun certificat de vaccination ne sera appliqué dans les écoles. Dans les installations culturelles et sportives, le passeport sanitaire permettra d’enlever son masque.