Ajaccio dit non
France: en Corse, les «vivants» manifestent contre la mafia

Une manifestation antimafia à Ajaccio a réuni plus de 1500 personnes samedi. L'événement, marqué par la présence d'élus et l'intervention rare du préfet, fait suite au meurtre d'une étudiante et à une session de l'Assemblée de Corse sur les dérives mafieuses.
Publié: 08.03.2025 à 20:50 heures
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Dernière mise à jour: 08.03.2025 à 20:58 heures
La manifestation dénonçait le silence autour de la mafia.
Photo: AFP

«A Maffia Fora!» (la mafia dehors!): plus de 1'500 personnes ont manifesté samedi à Ajaccio à l'appel des deux collectifs antimafia de Corse, en présence de nombreux élus et avec l'intervention inédite du préfet.

Derrière une banderole «Assassini, maffiosi, fora» («Assassins, mafieux, dehors») tenue par des jeunes gens, cette manifestation, organisée par les collectifs «Maffia no, a vita ié» (Non à la mafia, oui à la vie) et «Massimu Susini», du nom d'un militant nationaliste assassiné en septembre 2019 à Cargèse (Corse-du-Sud), a rassemblé quelque 1500 personnes selon la police, et plus de 3000 selon les organisateurs.

Contre le silence

Une seconde banderole était frappée du slogan «A maffia tomba, U silenziu dino» (La mafia tue, le silence aussi). La manifestation a été organisée après le meurtre mi-février d'une étudiante de 18 ans, sans doute ciblée par erreur, et dix jours après une session de l'assemblée de Corse consacrée aux dérives mafieuses. «Les vivants se révoltent et ils le font savoir ce samedi après-midi, à Ajaccio», avaient annoncé les collectifs dans un communiqué. Etaient présents notamment la présidente autonomiste de l'Assemblée de Corse Marie-Antoinette Maupertuis «en tant que présidente, mais aussi citoyenne, professeure et mère», trois des quatre députés de l'île méditerranéenne, le sénateur autonomiste Paul Toussaint Parigi et des politiques, de la droite aux indépendantistes de Core in Fronte, à l'exception des indépendantistes de Nazione.

«
Merci d'être venus si nombreux pour troubler ce silence assourdissant qui a duré trop longtemps. Nous sommes tous victimes de la mafia
Une membre du collectif
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Drapeaux corses et petites pancartes brandies par les manifestants flottaient dans le cortège: «Mafieux, fossoyeurs de notre peuple», «maffiosi traditori» (maffieux = traîtres), «U silenziu tomba» (le silence tue). «Merci d'être venus si nombreux pour troubler ce silence assourdissant qui a duré trop longtemps. Nous sommes tous victimes de la mafia», a lancé au mégaphone Josette Dell'Ava-Santucci du collectif «Maffia No, a vita ié», devant la préfecture. Evoquant des «procès emblématiques à venir», elle a appelé à «soutenir la libération de la parole» devant les tribunaux ainsi qu'à «accompagner les victimes pour les aider à porter plainte».

Puis Jean-Jérôme Mondoloni, du collectif «Massimu Susini», a assuré que «le premier pouvoir en Corse, ce n'est ni celui des élus, ni celui du préfet, c'est celui de la mafia» en égrenant son «capital criminel»: 10 élus assassinés en 20 ans, 15 chefs d'entreprises en dix ans, un total de 192 assassinats ou tentatives en 20 ans, 80 restaurants victimes d'incendies criminels en dix ans... Appelant à soutenir le renforcement de la législation, il a assuré que le statut de repenti, «seul moyen légal validé par la cour européenne des droits de l'Homme», avait eu «des résultats remarquables en Sicile» en faisant baisser considérablement le nombre d'assassinats où il y en a désormais bien moins qu'en Corse.

Événement rarissime en Corse, où un préfet a été assassiné en 1998, il a ensuite passé le mégaphone au préfet de région, Jérôme Filippini, qui a reconnu que «ça n'arrive pas souvent dans la vie d'un préfet» de monter sur un camion de manifestants pour parler à la foule. «Je suis venu au nom de l'Etat, au nom du gouvernement, vous dire que le rassemblement populaire que vous formez aujourd'hui, il a mon soutien, notre soutien et il peut nous donner confiance», a-t-il déclaré sous les applaudissements et les remerciements.


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