A l'issue de la réunion à Ryad
Russes et Américains vont nommer des négociateurs pour arriver à un accord «acceptable pour tous»

Les chefs de la diplomatie russe et américaine se sont rencontrés à Ryad pour discuter de l'Ukraine. Ils ont convenu d'établir un mécanisme de consultation et de nommer des négociateurs pour régler le conflit.
Publié: 18.02.2025 à 16:55 heures
|
Dernière mise à jour: 18.02.2025 à 17:09 heures
L'Europe se sent exclue des négociations et craint un accord en défaveur de l'Ukraine.
Photo: keystone-sda.ch
Post carré.png
AFP Agence France-Presse

Russes et Américains sont convenus mardi à Ryad d'établir un «mécanisme de consultation» pour régler leurs contentieux et vont nommer des négociateurs pour le règlement de la guerre en Ukraine.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio s'est dit à l'issue des pourparlers «convaincu» que la Russie voudrait s'engager dans un «processus sérieux» pour mettre fin à la guerre. Il a affirmé que les Européens devraient également prendre part aux discussions. Un accord sur l'Ukraine devra être «acceptable» pour tous.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait souligné il y a quelques jours que l'Ukraine ne reconnaîtrait aucun accord conclu sans elle. Quant aux Européens, dont les principaux dirigeants s'étaient réunis en urgence lundi à Paris, ils réclament de pouvoir «faire équipe» avec les Etats-Unis pour une paix «juste et durable» en Ukraine.

Equipes de travail

Mais les chefs de la diplomatie américaine Marco Rubio et russe Sergueï Lavrov, à Ryad, ont ignoré ces questions et ont annoncé à l'issue de leur rencontre avoir décidé de «désigner des équipes de haut niveau pour commencer à travailler sur une issue du conflit en Ukraine dès que possible, de manière durable, pérenne et acceptable pour l'ensemble des parties», a indiqué le département d'Etat dans un communiqué.

«Nous avons discuté, exposé nos approches de principe et convenu que des équipes distinctes de négociateurs sur ce sujet prendraient contact en temps voulu», a confirmé le conseiller diplomatique du Kremlin Iouri Ouchakov. «Les Américains doivent désigner leurs représentants, nous désignerons les nôtres, et ensuite, probablement, le travail commencera», a-t-il ajouté.

Future coopération

«Il est encore difficile de dire si (les positions russes et américaines) se sont rapprochées, mais c'était le sujet», a encore déclaré à la télévision russe depuis Ryad M. Ouchakov jugeant prématuré de parler «de dates concrètes pour une rencontre des deux dirigeants». «C'était une conversation très sérieuse sur tous les sujets que nous voulions aborder», a ajouté le conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, précisant que la rencontre avait duré quatre heures et demie.

«Il y a eu un grand intérêt pour lever les barrières artificielles qui entravent le développement de la coopération économique» entre la Russie et les Etats-Unis, a déclaré Sergeï Lavrov à l'issue de la rencontre. «J'ai des raisons de penser que les Américains ont commencé à mieux comprendre notre position», a-t-il ajouté, jugeant leur conversation «utile». «Nous ne nous sommes pas contentés de nous écouter, nous nous sommes entendus», a-t-il dit.

Moscou et Washington et sont également entendus pour mettre sur pied un «mécanisme de consultation» et «poser les bases d'une future coopération sur des enjeux géopolitiques d'intérêt commun et sur les opportunités économiques et d'investissement historiques qui émergeront d'une issue réussie au conflit en Ukraine», a par ailleurs déclaré le département d'Etat.

Avec son homologue russe, ils ont décidé de «désigner des équipes de haut niveau pour commencer à travailler sur une issue du conflit en Ukraine dès que possible, de manière durable, pérenne et acceptable pour l'ensemble des parties», a indiqué le département d'Etat. Marco Rubio a également déclaré aux journalistes que «des opportunités extraordinaires exist(ai)ent pour un partenariat» avec la Russie. Mais «la clé pour y parvenir est la fin de ce conflit». 

Sécurité en Europe

Avant le début des pourparlers, la Russie avait notamment souligné que le règlement de la guerre en Ukraine était indissociable de la réorganisation de l'architecture sécuritaire européenne. La Russie réclame de longue date un retrait des forces de l'Otan d'Europe orientale, car elle considère l'Alliance comme une menace existentielle. Elle avait notamment utilisé cet argument pour justifier son invasion de l'Ukraine en 2022.

L'administration du président Donald Trump s'est montrée, elle, très critique de ses alliés européens et moins disposée à soutenir l'Ukraine.

Une première depuis 2022

La rencontre mardi à Ryad marquait une première au niveau des chefs de la diplomatie et dans un tel format depuis l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février 2022. Elle intervenait après l'appel téléphonique la semaine dernière entre Donald Trump et Vladimir Poutine, qui a fait voler en éclats l'union occidentale et la stratégie d'isolement visant le président russe.

«
C'est notre guerre, avec les Russes. Sans nous, ça ne peut pas être résolu.
Iryna Panova, citoyenne ukrainienne
»

Le président américain a présenté cette conversation comme étant le début de pourparlers de paix pour l'Ukraine. Moscou a signifié que cette guerre ne pouvait être arrêtée sans un accord plus large, et vise la relance des relations russo-américaines dans leur ensemble.

Ukrainiens trahis

A Kharkiv, en Ukraine, des habitants ne semblaient pas ravis de la tournure prise par les événements. Ces discussions sont «une sorte de trahison», a dit Iryna Panova, une comptable de 50 ans, dans un square enneigé de la deuxième ville ukrainienne, très souvent frappée, par l'armée russe. «C'est notre guerre, avec les Russes. Sans nous, ça ne peut pas être résolu», a-t-elle insisté.

La Russie avait réclamé fin 2021 de redessiner l'architecture de la sécurité européenne et, de facto, un retrait des forces de l'Otan d'Europe orientale, ainsi qu'un engagement occidental à ne pas élargir l'Alliance vers l'Est. Peu après avoir vu ces revendications rejetées, Moscou a déclenché son attaque contre l'Ukraine.

Découvrez nos contenus sponsorisés
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la