Du beurre, des ailes de poulet et un bon demi-kilo de viande hachée avec une marmite de bouillon d'os: voilà ce que mange la youtubeuse Bella en une journée. Sur sa chaîne, Steak and Butter Gal, elle promet avoir perdu du poids, éliminé les impuretés de sa peau et amélioré sa capacité de concentration. Le tout, grâce au régime carnivore. Cerise sur le gateau: il y a cinq ans, Bella était, selon ses dires, une végane convaincue.
La mode de la consommation exclusive de viande a aussi gagné la Suisse. Simon Corchia présente ce régime sur son compte Instagram carnivore.ch. Le planning alimentaire du jeune homme de vingt ans ressemble à celui de Bella: lait cru et steak au petit-déjeuner.
Le régime carnivore est une alimentation pauvre en glucides et riche en protéines, explique Christine Brombach. L'enseignante en sciences de l'alimentation à la Haute école des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) attribue cette tendance à la saison estivale: «En été, de nouveaux régimes se propagent sans arrêt dans le pays.»
Les adeptes du régime carnivore ne mangent pas que de la viande: leur assiette contient essentiellement des produits d'origine animale comme du poisson, du lait, des œufs et évidemment, de la viande, souvent sous une forme crue. «Scientifiquement et médicalement parlant, ce type d'alimentation n'est pas validé. Il n'existe aucune étude à long terme à ce sujet», souligne Christine Brombach. Au contraire, les médecins déconseillent vivement d'adopter un tel régime.
Attention aux fausses promesses
Quid des bienfaits mis en avant par les carnivores sur les réseaux sociaux? «Cela peut être vrai pendant une courte période», explique Christine Brombach. Mais à long terme, la consommation exclusive de produits d'origine animale est nocive pour le corps.
«Il manque des minéraux et des vitamines – comme la vitamine C, le potassium et le magnésium – ainsi que des fibres», liste Christine Brombach. La forte teneur en acide urique peut fatiguer les reins. De plus, un apport élevé en œufs crus affecterait la coagulation du sang. De manière générale, l'experte en nutrition conseille de préparer les aliments et de les chauffer. La viande et les œufs ne doivent pas être consommés crus, car cela constitue un risque pour la santé. «En les chauffant, les germes deviennent inoffensifs», explique la professeure qui met en garde contre les infections microbiennes.
La scientifique ne croit pas non plus à une plus belle apparence de la peau grâce au régime carnivore. Selon le type de graisses consommées, par exemple en cas de forte proportion d'acides gras non saturés, c'est exactement le contraire qui peut se produire. Les impuretés de la peau et les inflammations peuvent être renforcés.
Les humains sont omnivores
Les carnivores arguent que les produits d'origine animale fournissent tous les nutriments nécessaires et que les légumes contiennent des «antinutriments». Christine Brombach balaie cette idée: «On peut très bien éviter ces substances dites antinutritives en préparant les aliments.» Par exemple en les faisant tremper, en les faisant cuire ou en les épluchant.
La spécialiste rejette également l'affirmation selon laquelle nos ancêtres de l'âge de pierre se nourrissaient exclusivement d'animaux. «L'homme a évolué pour devenir un omnivore.» Alors que les carnivores ont un long intestin grêle et un gros intestin très court, et que les herbivores sont équipés à l'inverse, les humains ont un long intestin grêle et un gros intestin développé pour digérer des aliments de toutes sortes.
Notre espèce était ainsi parfaitement équipée pour s'installer partout dans le monde. Notre régime alimentaire était extrêmement adaptable grâce à ces facteurs anatomiques. À noter que même les peuples comme les Inuits en Alaska ou les Massaï en Afrique, dont le régime alimentaire est essentiellement d'origine animale, consomment des aliments végétaux.
La couleur, c'est la santé!
Christine Brombach déconseille clairement le régime carnivore. Mais alors quel mode d'alimentation faut-il adopter? Les spécialistes recommandent le régime «Planetary Health Diet» (PHD). Celui-ci prévoit un quart de produits d'origine animale et trois quarts de produits végétaux dans l'assiette. «En Suisse, les proportions sont souvent inversées», remarque Christine Brombach. Selon elle, le régime PHD allie les aspects environnementaux et de durabilité à une alimentation saine et savoureuse.
À l'autre extrême, pour ce qui est du mode de vie végan, l'experte en nutrition recommande une supplémentation régulière en vitamine B12, en fer, en vitamine D, en calcium et en acides gras Oméga-3 afin d'éviter une éventuelle carence. Mais il existe encore une autre solution. Plus les repas sont variés et diversifiés, mieux c'est pour le corps et l'environnement. «La couleur, c'est la santé», conclut l'experte.