Plongez dans l'ambiance d'Halloween
Une sorcière romande nous raconte son quotidien, entre rituels et magie

Au mois de septembre, Jessica Pauli a organisé le premier «Festival des sorcières de Mabon», à Echallens (VD). Après des études en criminologie, la Romande de 41 ans se passionne pour l’univers de la wicca. Nous l’avons rencontrée à quelques jours d’Halloween.
Publié: 31.10.2024 à 17:05 heures
Fin septembre, Jessica Pauli, 41 ans, a organisé le premier «Festival des sorcières de Mabon», couronné de succès.
Photo: DR
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Impossible de ne pas reconnaître la maison de Jessica Pauli, plantée au cœur du village d’Echallens. Comme échappé tout droit des pages d’un grimoire, son jardin est constellé d’énormes amanites tue-mouche, d’un rouge flamboyant et parsemés de pois blancs: «C’est le champignon des sorcières», sourit la Romande de 41 ans en ouvrant sa porte d’entrée. Je m’essuie les pieds sur un paillasson en forme de renard, alors que le ciel, incroyablement sombre pour un début de matinée, déverse une pluie battante sur l’épais gazon. 

Plusieurs courges d’Halloween impeccablement décorées veillent sur le domicile. La saison automnale est idéale pour rencontrer une «prêtresse wiccane», ainsi qu’elle se présente sur son compte Instagram. Depuis la fenêtre, on aperçoit l’immense tilleul sous lequel Jessica Pauli organise tous ses événements witchy. Fin septembre, elle a notamment orchestré le premier «Festival des sorcières de Mabon», aligné sur le succès croissant des livres et comptes Instagram dédiés à ces thématiques, qui ne cessent de fleurir depuis quelques années. Ce 1er novembre, le jardin de la Fribourgeoise accueillera une «Samhain Party», consacrée au Nouvel-An des sorcières. 

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«Cela a pris un peu de temps, mais j’ai construit une communauté de clients qui participent régulièrement aux événements que j’organise», commente-t-elle. Hormis les cercles et les célébrations qui ponctuent certaines fêtes clés de l’année païenne, la sorcière professionnelle propose des soins énergétiques et vient tout juste de créer sa propre «Witchcraft Academy», proposant l’apprentissage des bases de la «wicca», un mouvement de croyances prônant la magie, la pratique de certains rituels et la connexion à la nature. Bref, une formation de sorcières. Cartes de tarot, lithothérapie, astrologie, herboristerie… tous ces domaines sont inclus. 

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Mon événement de septembre a fait jaser. J'ai reçu un petit flyer décrétant que les sorcières et les médiums sont des abominations.
Jessica Pauli, 41 ans, assistante sociale et sorcière
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De criminologue à sorcière

Or, en plus d'intriguer, son univers surprend, dérange, hérisse les poils: Jessica Pauli rapporte de véhémentes critiques, exprimées au sein de son village: «Mon événement de septembre a fait jaser, raconte-t-elle. Le pasteur a réceptionné une plainte, lui demandant d’annuler mon festival. J’ai aussi reçu un petit flyer décrétant que les sorcières et les médiums sont des abominations.» Peu touchée par ces effusions, elle hausse les épaules et affirme que cela ne l’atteint pas: «Ce genre de réaction démontre juste l’intolérance de certaines personnes, alors que la wicca prône l’ouverture à toutes les croyances», estime-t-elle.

Le jardin de Jessica Pauli est constellé d’énormes amanites tue-mouche, «le champignon des sorcières».
Photo: DR

Venant d’une famille catholique pratiquante, la Fribourgeoise souligne avoir été obligée d’écarter de nombreuses barrières internes, notamment liées à son éducation, avant d’oser exprimer son intérêt pour le thème de la sorcellerie: «En 2018, j’ai vécu un éveil spirituel très douloureux, constitué de semaines d’angoisse permanente, d’insomnies… Je ne savais pas ce qui m’arrivait, je ressentais des choses, des présences que je ne savais expliquer. Avec l’aide d’une kiné, j’ai finalement pu déconstruire certaines peurs, comprendre mon hypersensibilité aux énergies et aux vibrations de la Terre. Il m’a fallu une année de recherches et de travail interne pour comprendre d’où venaient tous ces ressentis, comprendre que je vivais un éveil spirituel et m’ouvrir à cette part de moi.» 

Sans oublier que cette assistante sociale de métier vient d’un parcours très terre-à-terre. En effet, avant de s’intéresser au monde des sorcières, Jessica Pauli a décroché un Master de criminologie, obtenu en 2019. «Lors de mon stage post-universitaire, j’ai travaillé dans la prison de Bellechasse, près de Morat, ajoute-t-elle. Nous étions en plein Covid et je bossais avec des détenus dans la petite délinquance, qui servaient des peines de plusieurs mois à quelques années. J’ai remarqué que je parvenais à créer d’autres liens, à faire preuve d’une sensibilité que les autres gardiens de prisons ne comprenaient pas forcément. Les détenus appréciaient ma bienveillance et mon empathie.» 

Le 1er novembre, Jessica Pauli organisera une véritable Samhain Party, chez elle, avec une quinzaine de participants.
Photo: DR
«
J'ai senti que j’avais besoin de me réaliser, de créer quelque chose. Mais j’avais un bébé de six mois et je savais que je ne pouvais pas faire n’importe quoi.
Jessica Pauli
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Naissance d’une passion… et d’une dryade

Lorsqu’elle tombe enceinte, Jessica Pauli ne se sent plus à l’aise dans le cadre de la prison et ne renouvelle pas ses engagements. Les événements s’enchaînent alors cruellement. Quelques mois avant la naissance de sa fille, son père décède d’un cancer du poumon, bien que les médecins se soient montrés optimistes: «C’était une année très compliquée, remplie de changements, se souvient-elle. Je me suis sentie très seule, notamment durant mon congé maternité. Fin 2021, j’ai senti que j’avais besoin de me réaliser, de créer quelque chose. Mais j’avais un bébé de six mois, je m’apprêtais à retourner au travail et je savais que je ne pouvais pas faire n’importe quoi.»

Bouleversée et perdue, la Romande se réfugie dans l’une des activités qui lui apportent le plus de réconfort et d’inspiration, encore aujourd’hui: la marche en forêt. «L’idée m’a frappée comme une évidence, au milieu des arbres. Je devais créer des ateliers en pleine nature! J’ai commencé à noter toutes les idées qui me venaient à l’esprit. Mon compagnon, me voyant rentrer en pleine effervescence, m’a prévenue qu’il faudrait sans doute du temps pour concrétiser ce nouveau projet. Mais deux jours après, j’avais ouvert mon site et crée mes premiers ateliers.» Plantes, méditation, soins en forêt, cercles de sorcières… les activités proposées varient selon les saisons. «Je travaille beaucoup avec les réseaux sociaux et plusieurs personnes ont immédiatement manifesté leur intérêt», se réjouit-elle.

En l’honneur de son papa et du lieu qui a vu émerger l’idée initiale, Jessica crée ainsi «l’univers de la dryade», en référence à une nymphe issue de la mythologie grecque et résidant auprès des arbres pour les protéger. 

La Fribourgeoise organise régulièrement des ateliers d'herboristerie et des cercles de sorcières ouverts au public, dans son jardin.
Photo: DR

«Cet univers fait partie de moi»

À ses prémisses, le projet grandit lentement, à la façon d’un jeune cèdre encore un brin timide: «Je donnais environ un ou deux ateliers par mois, c’était difficile de concilier mon travail, mon rôle de maman et cette nouvelle activité. Puis, ne me sentant plus respectée sur mon lieu travail en raison de problèmes de santé, j’ai décidé de poser ma démission. Durant quelques mois, j’ai canalisé toute ma colère et ma frustration dans mon entreprise. J’y ai mis toutes mes tripes, toute mon énergie! Je postais énormément de contenu sur les réseaux sociaux et cela a payé.» 

Aujourd’hui, Jessica Pauli maintient une activité d’assistante sociale à 40%, afin de pouvoir consacrer suffisamment de temps à sa passion: «L’univers de la dryade fait partie de moi, je m’épanouis complètement là-dedans.» Ce 1er novembre, elle allumera les torches dans son jardin et rendra leurs sourires aux citrouilles, pour célébrer Samhain, l’Halloween celtique, avec une quinzaine de participants. Chaudrons, bougies, rituels et offrandes à la nature feront partie des célébrations, comme le veut la tradition païenne. 

Quand on lui demande ce que signifie la magie à ses yeux, la Romande répond sans hésiter: «Pour moi, elle vient de nous, de l’univers, de chaque chose que nous contemplons. On peut la travailler au moyen de visualisations ou de méditations. Nous avons toutes et tous de la magie en nous, il faut juste avoir confiance.» Et ce n’est pas son chat, Pattenrond, baptisé en l’honneur du fougueux félin d’Hermione Granger, qui dira le contraire. 

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