Pesticides, crottes, polluants…
Comment éviter que votre potager vous rende malade

Les pluies généreuses du mois de mai ont largement abreuvé les terres, tandis que l'heure des premières cultures approche. Voici quelques recommandations pour profiter en toute sécurité des fruits et légumes de votre jardin ou de votre balcon.
Publié: 28.05.2024 à 16:51 heures
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Dernière mise à jour: 28.05.2024 à 19:02 heures
Pour minimiser les risques de contracter l'échinococcose, une maladie rare mais sérieuse transmise par le renard, il convient de cuire toutes les plantes comestibles cultivées en plein air.
Photo: Shutterstock
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Si les averses printanières dépitent même les plus grands optimistes, elles ont au moins le bon goût d'abreuver les sols. Ravivés par ces trombes d'eau, les jardins s'éveillent, les tomates rougissent, les salades ouvrent les bras... À ce rythme, les férus de jardinage et les heureux propriétaires d'un coin potager (niché dans le jardin ou construit sur un balcon) pourront bientôt admirer le fruit de leur travail acharné. 

Mais puisque la nature possède aussi ses pièges, c'est le moment idéal de rappeler quelques principes de sécurité, avant de cueillir nos plus belles framboises et de compter nos précieuses courgettes. Du terreau aux pesticides, en passant par la visite inopinée d'animaux sauvages, voici les réflexes essentiels pour cultiver chez soi en toute sécurité. 

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Minimisez les pesticides

«D’après des études réalisées il y a une quinzaine d’années, le risque principal vient de ce que les personnes mettent elles-mêmes dans leur propre jardin, constate Nathalie Chèvre, écotoxicologue à la Faculté des géosciences et de l’environnement de l’Université de Lausanne. On peut acheter de nombreux pesticides dans le commerce, parfois confondus avec des engrais ou utilisés en trop grande quantité… Pour moi, il s’agit du plus grand risque, avant la pollution de l’air ou les potentielles dioxines dans le sol.»

Il suffirait donc de s'abstenir d'acheter ce type de substances chimiques, pour cultiver de façon totalement naturelle. Or, les personnes ayant déjà tenté de faire pousser une grappe de tomates dans leur jardin savent que la tentation peut être immense, lorsque de facétieux nuisibles se permettent de grignoter nos efforts: «Je préconise de ne pas utiliser de substances chimiques en acceptant que certaines cultures seront réussies et d’autres non, explique Corinne Authouart, conseillère en environnement chez Be Odiv et détentrice d'un brevet fédéral Nature et biodiversité. Les jardiniers débutants sont souvent affolés par tous les parasites qui risquent d’attaquer leurs précieuses plantes, mais il faut surtout faire ses expériences, chercher des solutions au fil du temps et lâcher prise: on ne peut pas tout contrôler, dans son jardin!»

La seule chose qu'on peut contrôler, c'est bien notre usage des pesticides: d'après les recommandations de la CIPEL, une commission franco-suisse soucieuse de protéger les eaux du Léman, il convient d'en utiliser le moins possible, avec une grande précaution (gants, masque, vêtements étanches), sachant que ces substances, lessivées par la pluie et l'arrosage, peuvent atteindre l'eau des rivières et les nappes phréatiques. Par ailleurs, il est recommandé de ne pas garder des restes de vieux produits phytosanitaires, mais de les rapporter chez un revendeur ou dans un centre de collecte. L'utilisation d'herbicides sur les routes, les chemins, les places et à leurs abords est d'ailleurs interdite par la loi suisse depuis 2001. 

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Pensez à la qualité du sol

La découverte de dioxine dans certains sols lausannois a été largement médiatisée en 2021, semant la peur parmi les fans de jardinage. De nouvelles études d’imprégnation aux dioxines et furanes sont actuellement menées par Unisanté, sur la base d'analyses sanguines de personnes résidant dans la région lausannoise. Les résultats devraient être publiés au cours de l'été 2024. En attendant, le canton de Vaud met à disposition des recommandations sanitaires officielles, ainsi qu'une carte des zones les plus contaminées, avec des mesures de prévention importantes.

La qualité du sol est effectivement essentielle, peu importe notre lieu d'habitation. «Pour un potager installé dans le jardin, les personnes qui s’inquiètent peuvent demander une analyse du sol, bien que cela soit coûteux», souligne Nathalie Chèvre. Cela peut être indiqué, ajoute Corinne Authouart, lorsqu'on ne connaît pas les pratiques potagères du précédent jardinier ou la provenance de la terre d’un nouveau jardin.»

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Choisissez le bon terreau

Les personnes souhaitant cultiver des plantes comestibles sur leur balcon devront se poser une tout autre question: quel terreau faut-il acheter, pour préserver la santé et l'environnement? D'après Jacques Robadey, conseiller chez Ricoter, la meilleure option est toujours de privilégier sa propre terre végétale, qu'on peut enrichir avec de l'engrais bio: «Sur des balcons ou des jardins surélevés, on peut travailler avec des substrats, étendus en plusieurs couches, afin d’apporter un maximum de vie au sol.» 

En ce qui concerne ces terreaux, notons qu'ils se composent d'un mélange de plusieurs types de matières premières, comme de la terre végétale, du compost, de la fibre de bois ou encore du sable. Pour notre intervenant, il convient d'éviter la tourbe: «En Suisse, l’exploitation des tourbières est interdite depuis 1987, dans la mesure où celles-ci nécessitaient de détruire l’environnement naturel, rappelle-t-il. La totalité de la tourbe vendue en Suisse vient de l’étranger, où les restrictions ne sont pas toujours les mêmes.»

En outre, les matières premières utilisées dans les terreaux suisses sont certifiées auprès de l’Institut de recherche de l’agriculture biologique (FiBl): «Et lorsqu’on réalise un mélange au moyen de plusieurs matières premières déjà certifiées, il est requis de faire tester à nouveau le mélange final, ajoute Jacques Robadey. Une fois par année, la FiBl accepte ou non ces mélanges.» Pour cette raison, l'expert conseille de choisir un terreau suisse, présentant un label bio helvétique: «Le label du bourgeon Bio est le plus important en Suisse, basé sur des règles exigeantes. Par contre, lorsqu’on achète un terreau venu de l’étranger, celui-ci peut contenir de la tourbe, tandis qu’un éventuel label bio ne signifie pas forcément que le produit respecte les mêmes critères qu’en Suisse.»

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Méfiez-vous du renard (et de l'échinococcose)

Une fois que notre belle terre semble bien arrosée et prête à applaudir ses premiers légumes, il se peut qu'elle accueille les pas feutrés de plusieurs animaux, dont des renards, des fouines ou des hérissons: «Il convient d’être attentif au contact de proximité avec la faune locale, les animaux sauvages comme domestiques, souligne Corinne Authouart. Je constate effectivement que le renard passe régulièrement durant la nuit et dépose des laissées bien visibles à différents lieux du jardin pour marquer son passage. Aussi est-il capable de sauter par-dessus les barrières et les treillis!»

En effet, puisque le renard est l'un des principaux porteurs de l'échinococcose ou la «ténia du renard», une maladie rare (environ 10 à 20 nouveaux cas d'infection humaine par an, en Suisse), mais responsable d'une grave maladie du foie chez l'homme, il convient de prendre ce phénomène très au sérieux: «Si vous trouvez un excrément de renard dans votre potager, il est indispensable de porter des gants et se munir d’un outil, ainsi que d’un sac plastique pour l’enlever au plus vite sans le moindre contact et la jeter dans les ordures à incinérer», insiste notre intervenante. Pour minimiser tout risque, il est nécessaire de cuire toutes les plantes comestibles cultivées en plein air ou cueillies en forêt, surtout celles qui croissent près du sol, comme les baies. 

«La congélation à -20°C ne tue pas les œufs de ténia du renard, précise l'Office fédéral de la santé. Il est nécessaire de se laver soigneusement les mains après avoir travaillé la terre. Une très bonne hygiène est également requise en cas de contact avec des chats et des chiens en contact avec des rongeurs. Les animaux devraient être régulièrement vermifugés.» Corinne Authouart conseille aussi de minimiser nos chances d'attirer le renard: «Pour cela, il faudrait s'abstenir de laisser de la nourriture pour chat à l’extérieur ou de déposer des déchets intéressants sur un compost à ciel ouvert.» De manière générale, toutes les plantes comestibles doivent être soigneusement lavées. 

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Éloignez les pigeons

Du côté des chats, qui se permettent parfois de transformer le potager en latrines privées, notre intervenante recommande, à nouveau, de ne pas les attirer: «Le fait d’installer des branchages d’épineux sur les planches de culture peuvent les décourager, bien que certains chats soient têtus. Des cultures paillées leur déplairont aussi, puisqu’ils aiment enfouir leur crotte et que la paille ne s’y prête pas.»

Lorsqu'il s'agit du balcon, moins accueillant pour les animaux à quatre pattes, il convient cette fois de repousser les pigeons, qui s'installent allègrement en hauteur et dont les fientes risquent d'atterrir dans les bacs de notre mini-potager: «Sur le balcon, en milieu urbain, en cas de forte présence de pigeons, on peut utiliser du poivre, de la cannelle, du curry à saupoudrer sur la terre des plantations afin de les éloigner, liste Corinne Authouart. Aussi, un spray répulsif maison à base d’eau, de vinaigre et d’huile essentielle d’eucalyptus peut être répandu sur les endroits où ils aiment s’installer. Bien sûr, il ne faut jamais vaporiser ce mélange directement sur le volatile!»

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