Aux étudiants qui cravachent, qui potassent et qui paniquent, qui relisent, gribouillent et récitent (pour les mémoires auditives) leurs précieuses notes, je ne voudrais dire qu’une seule chose: courage!
Dormir avec ses fiches de révision, coller des post-its sur le miroir de la salle de bain pour rentabiliser le temps du brossage de dents, picorer des fruits secs estampillés Studentenfutter («nourriture pour étudiants») dans l’espoir qu’ils boostent ce pauvre cerveau éreinté… Toutes ces joies qui caractérisent un printemps de préparation aux examens cèderont bientôt leur place à un radieux été.
«Le stress lié aux examens est chargé d'enjeux symboliques»
Mais avant, il vous faut tenir le rythme et gérer le stress, qui s’invite insidieusement dans votre tête. Celle-ci a beau être pleine de théorèmes et de définitions, elle garde toujours une place pour l’angoisse et les crises existentielles! «Souvent, le stress lié aux examens est chargé d'enjeux symboliques, qui soulèvent parfois des questions plus profondes, d'émancipation, d'orientation professionnelle, de projection vers l'avenir, confirme le Dr Michaël Mettraux, chef de clinique au Département de psychiatrie du CHUV et Chef de clinique de la Consultation psychothérapeutique pour étudiants UNIL. Que vais-je faire après si je réussis ou si j'échoue? Qui vais-je décevoir? Etc.»
Pour cette raison le spécialiste assimile les examens à une sorte de «rite de passage» chargé d'enjeux symboliques pour l'étudiant, et qui le poussent, plusieurs fois par année, à questionner ses choix et son avenir: «En raison des heures de travail, des révisions supplémentaires et des questions profondes qu’ils peuvent soulever, les examens deviennent donc à double titre une période vraiment fatigante pour les étudiants», résume-t-il.
Si vous vous reconnaissez dans cette description ou si le stress est devenu votre nouveau colocataire (très collant et extrêmement bordélique), ces quelques conseils pourraient vous aider à atteindre l’insouciance de l’été sans trop de panique:
Soignez votre hygiène de vie
«N’importe qui peut être concerné par ce stress, cela va justement dépendre du contexte et des enjeux qui se cachent derrière la période des examens, rassure le Dr Mettraux. Nous observons bien sûr un pic de demandes avant, pendant et après les périodes des examens ou lors des périodes de rendus de travaux de Bachelor, Master ou de thèse.»
Pour l’expert, la première étape permettant de rester aussi serein que possible durant la préparation est d’explorer ces questions profondes, tout en évaluant ses conditions et son hygiène de vie: «J’aime rappeler aux étudiants qu’à un tel niveau d’études, ils et elles sont comme des sportifs d’élite, pointe le spécialiste. Il leur faut donc des repas complets et équilibrés, des heures de sommeil suffisantes, une activité physique régulière, avec un minimum de 30 minutes de marche chaque jour.»
Karin Hehlen, responsable du service d’orientation et carrières (SOC) de l’Université de Lausanne (UNIL), constate en effet qu’un rythme trop exigeant peut rendre la période encore plus difficile: «On rencontre souvent des étudiantes et étudiants qui passent des heures à travailler sans faire la moindre pause, arrêtent le sport pour réviser et se couchent tard, déplore-t-elle. Le corps ne peut pas suivre un tel rythme, sans oublier que la fatigue et le stress entravent la mémorisation.»
Planifiez au maximum… et faites des pauses!
Après avoir insisté sur ces habitudes fondamentales, le Dr Mettraux et son équipe aident les étudiants stressés à organiser leurs révisions au travers d’un planning hebdomadaire, en divisant la matière et en la répartissant: «Nous leur rappelons surtout d’y intégrer des moments de repos, de distraction et de loisir, qui sont essentiels au bon fonctionnement de leurs fonctions cognitives, comme la mémorisation et la concentration.» Une étude britannique publiée en 2020 a d’ailleurs confirmé que la mémorisation des éléments révisés avant le coucher est optimisée par le sommeil: aucune raison, donc, de snober l’oreiller!
«En découpant et en listant clairement les tâches à accomplir, les parties à apprendre par cœur ou les chapitres à lire, on obtient une vue d’ensemble plus digeste et moins effrayante», encourage Karin Hehlen. Si cette mission vous semble insurmontable, notre intervenante évoque les ateliers Réussite proposés au sein de l’UNIL, qui enseignent la bonne méthodologie de révision: «Ces ateliers sont dédiés aux nouveaux étudiants qui vivent la transition entre le gymnase et l’université, afin de les aider à gérer le changement et se préparer au métier d’étudiant ou d’étudiante. Il s’agit d’apprendre à se concentrer sur les cours tout au long de l’année, à bien prendre des notes, à équilibrer sa vie personnelle et ses études… Cela permet de guider l’apprentissage, pour gérer le stress intense qui intervient au moment des examens, anticiper et éviter de paniquer deux semaines avant les épreuves.»
Voyez les révisions comme un marathon (et non un sprint)
Notre intervenante remarque effectivement que le Service d’orientation et carrières est le plus sollicité au moment du démarrage des études, lorsqu’on se demande inévitablement si le cursus choisi est le bon et, évidemment, à l’approche des examens: «Certains étudiants se mettent dans des états d’anxiété importants, qui risquent de les paralyser avant les échéances, explique-t-elle. On voit également des personnes qui ont beaucoup travaillé, mais qui s’infligent une grande pression et arrivent épuisées dans la salle d'examen. C’est dommage, car cette grande fatigue peut réduire leurs chances de réussir, malgré tout le travail fourni.»
Même constat pour le Dr Mettraux: «Les étudiants ou étudiantes qui se surchargent sont légion: ils s’imaginent souvent que plus ils travaillent, mieux c’est, alors qu’il est parfois préférable de voir les études comme un marathon, et non pas comme un sprint», analyse-t-il. En cas d’angoisse, l’expert propose de réaliser quelques exercices de relaxation, de mindfulness ou de méditation. Il existe aujourd’hui pléthore d’applications (comme Headspace, Respirelax ou Calm) et de cours en ligne proposant des séances de sophrologie, de yoga ou de méditation spécifiquement élaborés pour lutter contre le stress.
Soyez bienveillant envers vous-même
L’état d’esprit et le dialogue intérieur (parfois très sévère!) peuvent également jouer un rôle primordial: «Il convient d’être tolérant et bienveillant envers soi-même, de s’autoriser à douter, à craindre l’échec et à normaliser ou 'dépathologiser' ces réactions, poursuit le psychiatre. C’est normal de stresser, vous avez le droit! On aide aussi les étudiantes et étudiants à relativiser certains enjeux et élargir leurs horizons de réflexions, en se rappelant que tout ne se limite pas aux études en cours et à la voie choisie.» En d’autres termes, vous ne risquez pas votre vie dans la salle d’examen, même si le danger perçu par le corps paraît bien réel.
Dans ce sens, Karin Hehlen préconise de mettre en place des actions concrètes, afin de prendre un brin de recul face aux émotions qui nous submergent: «Pour gérer le stress, il faut se rassurer quant à ses propres compétences, résume-t-elle. Prendre des notes, se préparer, se positionner par rapport à ses propres aptitudes, rédiger des rétroplannings réalistes… une bonne organisation permet de comprendre que tout ce stress n’est pas forcément fondé!»
N’hésitez jamais à demander de l’aide
Si le temps vous manque ou que l’angoisse semble impossible à gérer, n’hésitez pas à vous tourner vers les services de soutien proposés par votre université ou école, qui pourra vous guider vers des outils et des aides ciblées. L’Université de Genève (UNIGE) possède par exemple un Service de santé des étudiants, tandis que celles de Fribourg et de Neuchâtel proposent des plateformes de conseils psychologiques. À Lausanne, le SOC est toujours disponible, peu importe la situation: «En cas de besoin, on peut renvoyer la personne vers nos collègues du service de psychothérapie, précise Karin Hehlen. Le but est qu’elle reparte en se sentant mieux, qu’elle puisse rebondir et trouver les ressources nécessaires pour réussir son parcours.»
Le Dr Mettraux ajoute par ailleurs que les conditions de travail des étudiants doivent aussi être prises en compte: «Certains d’entre eux ne peuvent pas se consacrer principalement à leurs études, en raison de conditions de logement et financières précaires, pointe-t-il. En cas de besoin, nous les aidons à trouver un lieu calme, un groupe avec lequel travailler dans de meilleures conditions, ou les orientons vers nos collègues du Service des affaires sociales et de la mobilité étudiante (SASME), qui les aideront à réfléchir à des solutions plus pragmatiques selon la situation.»