Addiction, manipulation
Un groupe de 6 Américains attaque Tinder en justice

Six Américains ont entamé des poursuites contre Match, la maison-mère d’applications de rencontres comme Tinder, Hinge et OkCupid. Ils l’accusent d’entraîner une addiction, d’altérer la réalité et de manquer de transparence sur ses algorithmes.
Publié: 03.03.2024 à 10:07 heures
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Dernière mise à jour: 04.03.2024 à 09:37 heures
Un groupe de six Américains accuse la maison-mère des applications comme Hinge, Tinder ou encore OkCupid de manipuler ses utilisateurs.
Photo: Shutterstock
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Margaux BaralonJournaliste Blick

Les applications de rencontre sont partout et font des heureux. La preuve, en Suisse, plus d’un couple sur quatre se forme sur Internet. Pourtant, swiper à droite et à gauche, matcher avec un beau blond et laisser l’interface vous prédire 80% de compatibilité avec cette petite brune n’est pas du goût de tout le monde.

Aux États-Unis, six utilisateurs ont engagé des poursuites contre Match, la maison-mère de Tinder, mais également Hinge et OkCupid. Leur grief: non seulement ces applications ne fonctionnent pas, mais elles sont volontairement désignées pour tromper les clients.

Ces six plaignants, qui viennent des États de New-York, Californie et Floride se sont regroupés pour mener une «class action». Dans le procès-verbal de leur plainte, on peut lire qu’ils reprochent à Match «d’abîmer la réalité sociale» en remplaçant des siècles de drague par des relations virtuelles. Mais surtout, que cela se fait grâce à des «algorithmes cachés» et des interfaces conçues pour être «addictives» et entraîner les utilisateurs dans «une boucle perpétuelle payer-pour-jouer qui priorise les bénéfices de l’entreprise par rapport aux promesses marketing et aux objectifs des utilisateurs en termes de relation».

«Manipulation psychologique»

C’est bien là que le bât blesse: pour ces six plaignants, Match n’a strictement aucun intérêt à ce qu’ils trouvent l’amour sur leurs applications, puisqu’alors ils les désactiveraient et cesseraient de payer pour leurs services. Résultat, les plateformes sont faites de telle sorte qu’elles créent une addiction, «entament la capacité des utilisateurs à s’en désinscrire», et développent des produits toujours plus coûteux.

En faisant de la drague un «jeu», «Match a inventé, développé et fait la publicité d’un produit qui relève de la manipulation psychologique», écrivent encore les six mécontents tout au long des 59 pages du procès-verbal de leur action collective. Ils mentionnent l’envoi de notifications push sur les téléphones, qui ramènent toujours les utilisateurs vers l’application, et la complexité des procédures pour se désinscrire.

Une compensation financière demandée

Pour eux, il y a donc tromperie sur la marchandise et violation des lois en matière de protection des consommateurs. Match ment sur l’efficacité de ses applications, tout en omettant sciemment d’avertir sur les risques d’addiction. Les plaignants dénoncent surtout le slogan de l’application Hinge, «conçue pour être supprimée» (sous-entendu, dès lors que les utilisateurs auront trouvé une relation stable grâce à elle), totalement mensonger selon eux.

Concrètement, ils annoncent vouloir obliger Match à arrêter le développement, la vente et la publicité des options payantes de ses applications, mais aussi à communiquer sur les risques d’addiction. Les six utilisateurs déçus réclament aussi une compensation financière pour tous les abonnements premium auxquels ils ont été amenés à souscrire.

Match a réagi au dépôt de cette plainte via un porte-parole, qui l’a qualifiée de «ridicule et infondée». «Nous nous engageons activement pour que les gens décrochent des rendez-vous grâce à nos applications. Toute personne qui dit le contraire ne comprend pas la mission et l’objectif de toute notre industrie», a-t-il déclaré.

Au-delà des chances que cette plainte aurait d’aboutir, elle est à inscrire dans un contexte particulier, où l’on voit de plus en plus d’utilisateurs d’applications numériques se rebeller contre leurs effets secondaires. De nombreuses plaintes ont été déposées par des parents, des personnels scolaires et même la ville de New York contre Google, Meta (qui détient Facebook et Instagram) ou encore TikTok, pour atteinte à la santé mentale des enfants et des adolescents.

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