Depuis la cuisine de sa maison, dans un petit village alsacien à 30 km au nord-ouest de Strasbourg, Sandra Thomann prépare en environ deux heures l'ensemble de ses repas pour la semaine. Après avoir taillé une brunoise de carottes et égrainé une grenade, elle fait mariner du poulet dans une sauce soja et gingembre. «J'aime bien les recettes faciles mais qui changent un peu de l'ordinaire», décrit la quadragénaire.
Au menu cette semaine: salade de pois chiche, tarte chèvre/épinards, crumble d'endives et pâtes aux crevettes. Peu de viande et de poisson, ce qui permet de conserver ces plats plus longtemps. Ils seront stockés au réfrigérateur, prêts à être réchauffés et dégustés au fil de la semaine, suivant la méthode du «batch cooking» ("cuisiner en lots"), qui vise à anticiper ce qu'on va manger pour mieux maîtriser son budget.
Sur Instagram, ils sont 115'000 à suivre Sandra, alias «cuisineaddict». Chaque vendredi, elle livre ses menus pour la semaine à venir, avec la liste de courses associée et la durée de conservation des plats.
Aide au quotidien
Une popularité qui «a vraiment explosé quand j'ai commencé à partager mes menus de batch cooking», raconte l'ancienne assistante de direction dans un cabinet comptable. Blogueuse cuisine depuis près de 15 ans, Sandra Thomann s'est lancée en 2019 dans cette méthode déjà connue outre-atlantique. En seulement trois ans, elle a publié une dizaine de livres sur le «batch cooking», avec succès, et vit aujourd'hui de sa passion.
«En France, les gens aiment cuisiner», avance-t-elle, «Et quand on remarque que ça peut nous aider au quotidien, que ça simplifie la vie et que ça fait faire des économies, on s'y tient. Et de plus en plus de monde s'y met.» Car beaucoup cherchent des astuces en cette période d'inflation qui a vu les prix de l'alimentation bondir de 15,8% sur un an en mars.
«Ces derniers temps, la grosse inquiétude c'est la montée des prix: comment continuer de maintenir une alimentation équilibrée sans plomber son budget», explique Sandra Thomann, qui échange régulièrement avec ses abonnés sur les réseaux sociaux.
Julie Sling, 29 ans, figure parmi eux. Elle s'est mise au «batch cooking» quelque temps après la naissance de son fils Raphaël, huit mois. L'objectif: réduire sa «charge mentale» et faciliter son quotidien.
«Le strict nécessaire»
«J'ai tenté et il s'est avéré que c'était beaucoup plus simple pour manger équilibré et autre chose que du surgelé qui, en plus, peut revenir cher», témoigne-t-elle. Elle ne fréquente plus les rayons des supermarchés et sa liste de courses est calquée sur celle proposée par Sandra. «On achète vraiment le strict nécessaire, on évite d'acheter des choses qui vont pourrir ou qu'on risque de ne pas utiliser», dit-elle en récupérant ses provisions au drive d'un supermarché de Strasbourg.
Côté ticket de caisse, le budget mensuel de la famille atteint une centaine d'euros par semaine, en comptant les achats pour le bébé, dont les couches et le lait infantile. «Avant, on pouvait tourner autour de 150 euros, on achetait pas mal de choses parce qu'on ne savait jamais ce qu'on allait préparer et au final on achetait beaucoup trop», compare-t-elle.
Selon Sandra Thomann, le «batch cooking» est l'ennemi du gaspillage alimentaire mais aussi de la malbouffe: terminés la restauration rapide et les plats cuisinés livrés à domicile. «Quand on est fatigué, qu'on rentre tard le soir, qu'on n'a pas envie de cuisiner après le boulot, on a juste à réchauffer le plat, ça évite de craquer sur des plats préparés qui coûtent cher», souligne-t-elle.
Si la blogueuse craignait que le «batch cooking» ne soit qu'un «effet de mode», elle se félicite qu'il y ait toujours «des nouvelles personnes qui découvrent la méthode, qui cherchent des astuces. Je crois que c'est fait pour durer».
(AFP)