La mascotte de Starbucks a beau être une sirène, son chant mélodieux n'a aucune chance face au doux appel du pumpkin spice latte. Sucré, épicé et chaud, ce breuvage renferme l'essence même de la saison automnale et sonne, chaque année, le glas de l'été.
Inventé en 2003, le mythique PSL a donc fêté son 20e anniversaire l'année dernière. On peine cependant à imaginer un monde sans lui: aux États-Unis, les épices pumpkin spice représentent un véritable mythe, sachant qu'elles s'invitent dans une gamme impressionnante de produits, plus insolites les uns que les autres: savons, bougies, déodorants et même houmous (chez Trader Joe's) sont désormais infusés du célèbre mélange de cannelle, gingembre, noix de muscade et clou de girofle.
D'autres plaisirs d'automne
En Europe et même en Suisse, de plus en plus de produits s'alignent sur le trend, alors que les affiches des Starbucks se permettent de lancer la «saison du PSL» en plein été indien.
Ainsi que le précise Erin LaBranche, consultante en stratégie chez l'entreprise de marketing G/RA, auprès du «New York Times», la citrouille était un produit parfaitement banal, avant que le géant du café ne prenne le monde d'assaut avec sa formule magique. Elle souligne également qu'aux États-Unis, les produits parfumés à la courge ont rapporté plus de 787 millions de dollars au niveau national, en 2022. En comparaison, les produits à la menthe poivrée, classiques des Fêtes de fin d'année, n'auraient valu que 494 millions de dollars...
La création du P.S.L
Dans un communiqué de presse diffusé à l'occasion des vingt ans du PSL, Starbucks était revenu sur l'origine de cette success story: «On a commencé par un immense brainstorming, avant de recouvrir les murs de toutes nos idées, se souvient Peter Dukes, qui menait les équipes responsables des boissons à l'espresso, en 2003. Ensuite, nous avons procédé par élimination, pour ne garder que vingt goûts différents, dont le chocolat et le caramel – les plus populaires – ainsi que l'orange, la cannelle et... la courge.»
Durant l'automne de 2003, les premiers pumpkin spice latte prenaient place sur les comptoirs de Starbucks, dans les États de Washington et de Vancouver, ainsi qu'au Canada. C'était le début d'un empire: «Dès la première semaine du test, on a compris qu'on tenait un gagnant, raconte Peter Dukes dans le communiqué. Je me souviens avoir appelé les responsables de magasin pour leur demander si la nouvelle boisson fonctionnait. Leurs voix étaient pleines d'excitation.»
Vingt ans plus tard, la mention de «pumpkin spice» rassemble plus de 3 milliards d'occurrences sur Tiktok... Mais d'où vient cet engouement international pour une simple boisson d'automne? Il s'avère en effet que les quantités (importantes) de sucre présentes dans la boisson n'en sont pas les seules responsables!
Un shot de nostalgie
Si vous êtes déjà fan de cette saveur, vous saurez que chaque gorgée s'apparente à un voyage dans le temps.
«La boisson reprend toutes les associations construites autour de l'automne, des courges et de l'aspect chaleureux et cosy des sensations liées à cette saison, explique Matt Johnson, professeur en psychologie de consommateur à l'école Hult International Business School de San Francisco, auprès du média Healthline. Cette boisson est disponible une fois par an seulement, donc on constate une connexion immédiate entre le pumpkin spice latte et le réconfort de l'automne.»
D'après l'expert, l'odeur du PSL ravive automatiquement le souvenir nostalgique d'événements antérieurs, vécus à la fin de l'année ou à l'approche des Fêtes. À noter que ce phénomène est agréable uniquement pour les personnes qui apprécient cette période: pour celles qui l'associent à des moments stressants ou tristes, ce parfum de cannelle risque, au contraire, de susciter des émotions désagréables.
Notre cerveau aime le pumpkin spice
Pour le Dr. Zishan Kgan, psychiatre pour la plateforme Mindpath Health, deux zones de notre cerveau sont particulièrement friandes de ce type de saveurs nostalgiques: «L'hippocampe est très important pour la formation de souvenirs à long terme, lesquels peuvent être ravivés consciemment et participent à notre perception du monde qui nous entoure, précise-t-il auprès de Healthline. Cette zone est aussi fortement connectée aux régions du cerveau qui régulent nos émotions, comme l'amygdale». Cela permet notamment d'expliquer la puissance de certains souvenirs émotionnels, opérant comme des triggers positifs ou négatifs.
Ainsi que le souligne le psychiatre, une gorgée de PSL peut susciter de la nostalgie et du réconfort, sans même que nous parvenions à identifier le souvenir qu'elle ranime. En outre, certains aliments décuplent cet effet en activant le circuit de récompense du cerveau.
«La dopamine joue un rôle clé dans ce processus, commente le Dr. Zishan Khan. L'hippocampe utilise ce neurotransmetteur pour transformer les souvenirs à court terme en souvenirs à long terme. Notre circuit de récompense encourage certains de nos comportements, mais ce procédé n'est réellement efficace que lorsqu'il est renforcé par des souvenirs agréables.» Bref, le pumpkin spice latte remplit parfaitement tous ces critères pour nous séduire.
Une dose de réconfort
Sans oublier qu'il s'agit d'un exemple typique de la comfort food, ces plats qui nous réchauffent et nous requinquent, en hiver.
«Nous aimons la régularité, la prévisibilité et l'impression d'avoir le contrôle, note Holly Schiff, docteure en psychologie, toujours auprès de Healthline. Les plats réconfortants nous offrent tout cela.» L'experte souligne toutefois le risque de s'adonner trop souvent à des comportements ou choix alimentaires régis uniquement par nos émotions: une étude finlandaise publiée en 2019 constate en effet une corrélation entre le réflexe du emotional eating et des problèmes de santé liés au surpoids.
En effet, aussi réconfortant soit-il, un pumpkin spice latte de petite taille (tall) servi chez Starbucks contient 30 grammes de sucre...
À consommer avec modération, donc, ou à préparer chez soi avec une ou deux cuillères de sirop d'érable, en suivant notre recette toute simple. Promis, l'effet est presque identique: on se croirait dans un épisode de la série «Gilmore Girls», une citrouille souriante sur la tête, une écharpe orange autour du cou, un tapis de feuilles à nos pieds.