Ce vendredi 2 février, c'est la Chandeleur, le jour rêvé pour partager une montagne de crêpes avec sa famille ou ses amis. Pour en manger encore plus, détournez leur attention en leur racontant quelques histoires sur l'origine de cette fête méconnue, pleine de superstitions.
Des fêtes à Rome
On ne dispose pas de source historique précise attestant de son existence pendant l'Antiquité, mais il semble néanmoins que la Chandeleur était fêtée dès le temps des Romains, sous un nom et une forme différents. Dans la Rome antique, on marquait ainsi la fin de l'hiver et l'allongement des journées aux alentours du 15 février en descendant dans les champs et dans les rues, un flambeau dans une main et une galette de blé ronde dans l'autre. Nommées Lupercales, ces fêtes avaient pour vocation de célébrer le renouveau des saisons, la fécondité, et de protéger récoltes et bétail en rendant hommage à Faunus (Pan chez les Grecs), dieu protecteur des forêts et des troupeaux bergers. Parmi les rites surprenants, on sacrifiait des chèvres, et les prêtres portaient leurs fourrures. Avec des lanières de peau, on flagellait la paume des mains des femmes afin de s'assurer de leur fécondité.
Ce n'est qu'au Ve siècle que l'Église catholique, par son pape Gélase Ier, associa cette tradition païenne à la religion chrétienne. Le pontife décréta que la Chandeleur correspondait désormais à la présentation de Jésus au Temple, 40 jours après sa naissance (donc le 2 février, comme actuellement, et non plus le 15).
Les anciennes croyances ne sont guère loin: le renouveau du soleil devient un Jésus reconnu comme la «lumière du monde», et la notion de cycle se retrouve aussi dans la Vierge Marie, purifiée après avoir donné naissance. Les torches et flambeaux furent remplacés par des chandelles (candela en latin) d'où le nom de Festa candelarum (fête des chandelles), qui devint plus tard Chandeleur. Les chrétiens ramenaient chez eux les cierges pour en faire des porte-bonheur et s'assurer bonnes récoltes et prospérité.
Les crêpes, symbole solaire
Voilà pour les chandelles. Mais que viennent faire les crêpes dans cette histoire de bougies? Plusieurs explications sont régulièrement avancées. On entend parfois que Gélase Ier aurait offert des galettes aux pèlerins venus participer à sa nouvelle petite sauterie, et que cette tradition aurait perduré.
Mais cela ne serait-il pas tout simplement un reliquat des traditions romaines, si ce peuple mangeait déjà des galettes? Possible, mais pas certain: à peu près n'importe quelle civilisation a un jour façonné une forme plus ou moins ronde avec de la farine mouillée!
Toujours est-il qu'avec leur forme ronde et leur couleur dorée, crêpes et galettes sont un symbole solaire. En rappelant le lien avec le soleil et les saisons, un certain nombre de vieux dictons appuient d'ailleurs cette théorie, dont «Soleil de la Chandeleur annonce hiver et malheur» ou «Beau et clair à la Chandeleur, l'hiver garde sa rigueur».
Plus prosaïque, une autre explication propose que les paysans utilisaient peut-être simplement leur excédent de farine de la moisson précédente lors de cette période de début des semailles d'hiver.
Superstitions de la Chandeleur
Aujourd'hui, les racines païennes de la Chandeleur se retrouvent dans des traditions apparues tardivement. Dans certaines campagnes, on a ainsi longtemps brûlé des cierges ce jour-là afin d'éloigner les maladies. Dans d'autres régions, ce sont les fiancés qui trempaient leurs alliances dans la pâte à crêpe.
À partir du XXe siècle, dans certaines familles, on cuit parfois la première crêpe en tenant une pièce de valeur dans la main gauche, la poêle dans la droite. On la fait sauter et si elle retombe parfaitement, c'est que l'année se déroulera sous les meilleurs auspices financiers. Et si on la fait tomber, attention au contrôle fiscal…
Certains vont encore plus loin en plaçant ladite pièce dans la crêpe, avant de stocker la crêpe en haut de l'armoire familiale. On la laisse là pendant un an (bonjour l'hygiène), après quoi on fait cadeau de la pièce à un mendiant pour s'assurer bonne fortune.
N'étant pas superstitieux, je préfère les manger que de mettre des crêpes dans ma chambre. À vous de voir si vous voulez faire vivre cette coutume…