L’inflation atteint 3% en rythme annuel. Cela signifie que vos 100 francs de l’année dernière ont perdu 3 francs, et valent 97 francs aujourd’hui. Ils vous achètent donc pour 3 francs de moins que ce qu’ils achetaient l’an dernier. Ce graphique montre la nette hausse de l’inflation en Suisse, qui reste pourtant deux fois plus faible que chez nos voisins français.
Reste qu’en Suisse, les chiffres sont en dessous de la réalité. Le calcul de 3% n’inclut pas la hausse record de 6,6% des primes d’assurance-maladie cette année. Notre revenu disponible, à savoir ce qui reste une fois les charges payées, pour consommer et pour mettre de côté, est donc davantage affecté que ce que laisse penser l’inflation de 3%.
En outre, nous ne sommes pas sortis d’affaire. Si cette année, les prix du fioul domestique, du gaz et du bois de chauffage ont explosé, l’année prochaine, ce sera au tour des prix de l’électricité de bondir de 27%. Le renchérissement sera donc toujours au rendez-vous en 2023. Les Suisses romands n’ont d’ailleurs pas attendu pour réagir. Genevois, Vaudois ou Neuchâtelois, ils sont très nombreux – un tiers des Romands vivant en zone frontalière - à aller faire leurs courses et leur plein d’essence de l’autre côté de la frontière, où les prix sont 35% à 41% moins chers. Des consommateurs ont effectué leurs calculs et font part d’une économie de 30% pour les courses faites en France, trajet inclus. L’économie atteindrait 75% pour la viande, plus de 30% pour les cosmétiques et 18% pour l'alcool. Problème: le tourisme d’achat nuit fortement aux commerces romands et aux places de travail côté suisse. Alors, quels autres moyens pour protéger notre pouvoir d’achat?
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Négociez une hausse de salaire
Que ce soit individuellement ou par la voix de votre syndicat, votre salaire doit augmenter pour s’ajuster à l’inflation. S’il reste tel qu’il est, cela équivaudra pour vous à une baisse de salaire cette année. C’est d’ailleurs le cas: les salariés suisses ont globalement subi un recul de 1,8% de leurs salaires réels (après inflation) en 2022. C’est le plus important recul depuis 1942. L'année prochaine, les employeurs adapteront les salaires de leurs employés de +2,2% en moyenne, selon une étude d'UBS, mais cela ne suffira pas à compenser les pertes salariales de 2022. Ce sont donc deux années noires pour les salaires, surtout dans le secteur du commerce de détail. Seule solution: négocier une adaptation du salaire avec son employeur, sur base individuelle.
Placez votre épargne dans la pierre
Le principe fondamental, pour préserver son pouvoir d’achat, est de trouver un placement dont le rendement dépasse le taux d’inflation. Si vous conservez votre argent en liquide sous votre matelas, sa valeur sera grignotée par l’inflation et il subira -3% de perte annuelle. Une épargne de 10'000 francs ne représentera plus que 9700 francs un an plus tard si l’inflation est à 3%. C’est pourquoi l’épargne doit être rémunérée par un taux d’intérêt de 3% ou plus.
Or les banques versent beaucoup moins aujourd’hui. Si vous placez votre argent sur un compte épargne, vous toucherez entre 0% et 0,2% de rémunération, et au mieux 0,5% pour les plus jeunes. Les taux ne se sont pas adaptés à l’inflation et l’épargne bancaire reste trop faiblement rémunérée.
Si vous conservez votre épargne en obligations de la Confédération, leur rendement dépasse à peine les 1%, ce qui vous fait perdre 2% (inflation de 3% - 1% de rémunération) en termes réels sur votre épargne.
Reste l’immobilier: placer vos économies dans votre maison ou votre appartement permet de protéger votre épargne de l’inflation. Même si votre bien ne s’apprécie pas de 3% sur une année, sa valeur augmentera sur le long terme et battra l’inflation en Suisse, qui sur la longue durée ne dépasse pas 2%.
Si vous disposez de moyens suffisants, acheter une maison ou un appartement et le louer à des particuliers peut vous rapporter un rendement jusqu’à 7%, suivant la région concernée. A noter que dans les grandes villes suisses, votre investissement locatif ne rapportera pas plus de 2% à 3% en raison de la cherté du bien à l’acquisition. Pour les épargnants plus modestes, il peut être tentant d’investir dans le prêt participatif ou crowdfunding immobilier, car plusieurs sites en Suisse promettent des rendements attrayants. A partir de 10'000 francs, il est possible d’investir dans un logement ou immeuble en Suisse sous cette forme, et de gagner 5%, ce qui, une fois l’inflation de 3% déduite, vous laisse 2% de gain net. Mais ce rendement de 5% est annoncé, et en aucun cas garanti. Il est tributaire de la solvabilité du projet (des co-investisseurs) et de l’évolution des taux d’intérêt. Il faut également s’assurer de pouvoir, le cas échéant, vendre facilement sa part, et à un bon prix.
L’or a compensé l’inflation
L’or a compensé quasi pleinement l’inflation cette année. Si vous aviez acquis pour 10'000 francs suisses de lingots d’or il y a 1 an, il vaudraient 10’260 francs aujourd’hui, car l’or en francs suisses a gagné 2,6% sur 1 an, à quoi il faut déduire les 3% d’inflation. Ajustés de l’inflation, vos lingots vaudraient 9960 francs. Davantage donc que les 9700 francs que vous auriez si vous aviez gardé ces 10'000 francs sous le matelas. L’or préserve mieux la valeur que le cash, surtout en périodes de crise.
Bourse: risque à court terme, haut potentiel à long terme
Si la bourse suisse a perdu 8% sur un an, elle a gagné 20% sur 5 ans. Cela signifie qu’un portefeuille en actions suisses permet, sur le long terme, de compenser deux années d’inflation. Mieux, si vous aviez vos économies en actions Logitech, Givaudan ou Richemont, vous auriez gagné entre 40% et 80% ces 5 dernières années, avec un risque inférieur aux cryptomonnaies et au Nasdaq. De quoi compenser largement l’inflation actuelle. Placer vos économies en bourse n’offre toutefois aucune garantie sur une année, et doit être considéré pour ses gains lissés sur plusieurs années.