Guy Parmelin est assis dans le salon de sa maison de Bursins (VD) et feuillette la bande dessinée sur le lieutenant Blueberry. Le conseiller fédéral est un grand fan de bande dessinée et il affectionne particulièrement le western culte franco-belge. Son bras, que le politicien UDC portait en écharpe cet été, semble à nouveau fonctionner parfaitement. «Je vais à nouveau bien», rit-il.
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À la mi-août, le ministre de l'Économie s'est cassé le bras droit en tombant dans son bureau et a dû être opéré à l'hôpital. «Je n'ai que de légères douleurs lors de certains mouvements, comme lors de la remontée d'un volet roulant.» Il y a quelques jours, il a eu un rendez-vous pour voir si tout était remis en place. «Mon médecin m'a dit que j'avais les os d'un jeune de 20 ans», raconte Parmelin en riant.
Monsieur le Conseiller fédéral Guy Parmelin, vous siégez depuis neuf ans au gouvernement fédéral. Serez-vous une deuxième fois président de la Confédération en 2026?
Je ne suis pas clairvoyant et je ne peux donc pas savoir si le Parlement m'élira à nouveau à ce poste. Ce qui est sûr, cependant, c'est que l'Assemblée fédérale unie m'a confirmé pour une troisième législature. Et j'aime ce travail, même si ce n'est pas toujours facile.
Qu'est-ce qui est le plus difficile dans votre travail?
J'ai commencé au Département de la défense, où je n'ai dû me battre que pour un minimum de moyens, car le contexte international était calme. Plus tard, au Département de l'économie, j'ai dû gérer les effets de la pandémie de Covid-19, puis ceux de la crise énergétique avec la guerre en Ukraine. La pression est permanente, mais heureusement, je ne suis pas seul. J'ai d'excellents collaborateurs et collaboratrices motivés.
Au printemps, vous avez pu signer l'accord de libre-échange avec l'Inde, négocié depuis longtemps. Votre principal succès?
L'accord de libre-échange avec l'Inde est certainement une étape importante pour la politique commerciale suisse. Mais grâce à mes bonnes relations avec le Parlement, j'ai également pu mener à bien d'autres projets importants. En font partie, outre l'accord avec l'Inde, la suppression des droits de douane industriels ou la loi sur l'allégement administratif des entreprises. Il reste cependant quelques dossiers ouverts qui me tiennent à cœur.
Lesquels?
Je souhaite notamment offrir des perspectives à la jeune génération d'agriculteurs. Celle-ci est malheureusement de plus en plus découragée. Et j'ai l'intention d'améliorer la position des femmes dans l'agriculture.
Caroline Parmelin arrive de bonne humeur à la maison avec des sacs de courses. Dans la cuisine, elle déballe les fameuses saucisses aux choux vaudoises. «C'est ce qu'on mangera demain soir. Ma mère et le père de Guy sont nos invités.» Les Parmelin sont mariés depuis 30 ans.
Le père de Caroline était zurichois avec des racines dans la Vénétie italienne, sa mère bavaroise. Lorsque Caroline avait cinq ans, la famille s'est installée dans le canton de Vaud. Elle parle le suisse allemand et travaille comme professeur d'allemand. «Notre vie a complètement changé depuis l'élection de Guy au Conseil fédéral.»
«L'agenda se remplit toujours rapidement. Cela signifie que nous devons nous organiser plus que jamais.» Elle se rend chaque mercredi chez son mari à Berne, où ils ont loué un appartement. Le vendredi soir, ils rentrent ensemble à Bursins, «si son travail le permet». A part cela, leur vie est très normale en comparaison avec les représentants du gouvernement d'autres pays.
Lors de la visite d'État d'Emmanuel Macron à Berne en novembre dernier, Caroline Parmelin était assise au banquet à côté de Brigitte Macron, qui lui a parlé de sa vie de première dame de France. «Elle m'a dit qu'elle ne lisait plus la presse. Et quand elle fait son jogging, elle est suivie par des paparazzi. C'est un autre monde.» En tant qu'épouse d'un conseiller fédéral, elle a de la chance d'avoir encore une vie privée, ajoute-t-elle.
De nombreux ménages suisses souffrent du renchérissement. Que pouvez-vous y faire en tant que ministre de l'économie?
En Suisse, l'inflation est heureusement modérée par rapport à l'Union européenne, où certains pays luttent contre un renchérissement nettement plus élevé. La Banque nationale maintient le cap de l'inflation. L'objectif n'est pas d'atteindre une inflation zéro, mais de ne pas dépasser les 2%. C'est le cas actuellement. Il ne faut pas oublier que le franc suisse fort a également permis de maîtriser l'inflation. Il a permis d'importer des biens à des prix modérés.
Une intervention de l'Etat sur les prix n'est pas envisageable pour vous?
Je ne veux pas minimiser les difficultés actuelles d'une partie de la population. Mais on peut s'attendre à une détente des prix des loyers en décembre ou au début de l'année prochaine. Le rôle du gouvernement est avant tout de garantir les meilleures conditions possibles pour nos entreprises.
Celles-ci seraient...?
Nous leur épargnons des coûts supplémentaires afin qu'elles puissent rester compétitives, continuer à exporter leurs produits et préserver leurs emplois.
Le budget fédéral suscite des débats passionnés à Berne. Une chose est claire: la tendance est à l'abandon des dépenses et des subventions.
Certains pays voisins compensent les difficultés actuelles par des subventions qui augmentent la dette publique. Le système suisse repose sur la responsabilité individuelle. Bien sûr, depuis la pandémie de Covid-19, on attend beaucoup de l'État. Mais l'État, les cantons et les communes doivent conserver une marge de manœuvre en cas de gros coup dur. Cette attitude nous a permis d'investir près de 35 milliards de francs pendant le Covid, sans augmenter notre taux d'endettement, alors que d'autres pays sont pris à la gorge par des taux d'intérêt en hausse.
Le mécanisme du frein à l'endettement reste donc plus que jamais sacro-saint à Berne.
Oui, le Conseil fédéral tient à ce système. Et je rappelle qu'en 2001, le peuple a accepté l'article constitutionnel à une écrasante majorité. Si l'on discute maintenant d'une réforme, c'est une bonne chose et cela fait partie d'une véritable démocratie. La question est notamment de savoir s'il serait opportun d'assouplir le frein à l'endettement afin de pouvoir investir en période difficile. J'ai eu l'occasion d'en parler avec Pierre Moscovici, ancien ministre socialiste de l'économie et actuel Premier président de la Cour des comptes en France.
Que vous a-t-il dit?
Il a dit admirer la capacité de la Suisse à maîtriser son endettement. La France est endettée à plus de 110% de son PIB. Cela entraîne des coûts d'intérêts énormes.
Après la partie plus sérieuse de l'interview, Guy Parmelin emmène ses invités dans la cave à vin. C'est là que sont stockés les vins du domaine familial, dirigé par Christoph Parmelin, le frère du conseiller fédéral. Ils vendent les raisins de chasselas et en font presser une petite partie pour leurs amis et leur famille. Une affiche du FC Lausanne-Sports est en outre accrochée au mur. «J'ai toujours été fan d'eux. Mon frère, lui, soutient depuis toujours le Servette FC. Cela a posé des problèmes de temps en temps», raconte-t-il avec un clin d'œil.
Qu'appréciez-vous dans votre travail?
En premier lieu, le contact avec la population. Dans le quartier de Berne où j'habite pendant la semaine, les gens me saluent et j'échange parfois quelques mots avec eux. Cela me plaît beaucoup. Si quelqu'un me demande de faire un selfie, je le fais volontiers.
Mais il vous arrive aussi de vivre des moments extraordinaires, voire historiques.
Le sommet entre les États-Unis et la Russie en 2021 a bien sûr été un grand moment de ma vie. Même si, comme mon père l'a fait remarquer plus tard avec un sourire, le résultat n'est pas génial. Les contacts avec mes collègues étrangers sont aussi souvent très agréables. Une fois les contraintes protocolaires dépassées, il arrive que nous nous disions: «Maintenant, nous nous tutoyons et nous échangeons nos numéros de téléphone portable.» Il est important d'établir une relation personnelle et de créer une confiance mutuelle lorsqu'il s'agit de résoudre un problème par la suite.
Comment jugez-vous vos progrès en allemand?
A Berne, on m'assure qu'ils sont très bons (sourit).
Grâce aussi à votre femme Caroline?
Non, car je refuse de parler allemand quand je reviens à Bursins. Au début, ma femme a essayé de me coacher, mais j'ai refusé en la remerciant. Je parle et j'écoute de l'allemand toute la semaine et je lis des dossiers dont la plupart sont rédigés en allemand. J'ai le droit de me ressourcer dans un environnement purement francophone quand je suis chez elle ou au village.