Des tags antisémites ont entaché les affiches électorales genevoises, dès cet été et en septembre encore. Un méfait dont s'est saisie la Coordination intercommunautaire contre l'antisémitisme et la diffamation (CICAD). L'organisation «a décidé de dénoncer pénalement ces agissements», peut-on lire dans un communiqué publié mardi matin.
Des slogans haineux avaient en effet été esquissés sur des affiches politiques (et des murs) de toutes parts de la Cité de Calvin. À la rue de de Carouge, à la Place Neuve, ou encore à Plainpalais... L'on pouvait notamment y lire: «Céline Synagogue» (en référence à la conseillère nationale UDC Céline Amaudruz), «PLR Kosher (((tout juif!)))», ou «la Shoah est une fausse cicatrice!», pour ne citer que trois exemples.
L'affaire n'a pas fait grand bruit, au sein de la République. Hormis un discret communiqué du Parti libéral radical (PLR), publié en septembre, le monde politico-médiatique ne s'en est pas vraiment ému.
«Un personnage bien connu»
Qui se cache derrière ces faits de vandalisme? Contacté, le Secrétaire général de la CICAD, Johanne Gurfinkiel, reste prudent: «Je ne pourrais vous cacher quelques suspicions quant au responsable, eu égard à des campagnes qui sont menées sur internet par un personnage bien connu de la CICAD. Mais c’est à la justice qu’il appartient de mener l’enquête et d'identifier l’auteur.»
D'après des informations complémentaires parvenues à Blick, l'individu soupçonnée d'être derrière ces tags serait en effet un Genevois connu pour ses positions antisémites et xénophobes. Le personnage serait lié au «Front national» Suisse, une formation politique créé dans les années 1930. Cette organisation, qui serait à l'origine du fascisme suisse, est encore active de nos jours — notamment via des réseaux sociaux alternatifs.
Jusqu'à trois ans de prison
«Les faits que nous avons dénoncés font froid dans le dos. Ce genre d’actes tombent sous le coup de l’Art. 261 bis du Code pénal, du chef de discrimination raciale», explique l’avocat de la CICAD Me Philippe A. Grumbach.
Si le malfrat se fait juger et condamner, il risque une peine de l’acabit de celle dont a écopé Alain Soral. À savoir une privation de liberté qui peut aller jusqu’à trois ans, ou une peine pécuniaire.
Combien de procédures judiciaires lancées par la CICAD cette année? Trois ou quatre, d’après Me Philippe A. Grumbach. L’homme de loi de nuancer: «Nous ne dénonçons les faits au Ministère public que lorsque les cas sont très graves. La CICAD privilégie toujours l’approche pédagogique et éducative.»
Recrudescence de l'antisémitisme?
À l'autre bout du fil, Johanne Gurfinkiel nous confie quant à lui son inquiétude croissante face à une recrudescence des discours haineux: «Je dois malheureusement constater que les cas sont en augmentation, comme le révélait d’ailleurs notre rapport annuel sur l’antisémitisme.» Le Secrétaire général de la CICAD d'ajouter: «Nous devons agir à chaque manifestation publique, de surcroît face aux quelques fondamentalistes qui persistent à déverser leur haine. Cette campagne en est une illustration.»
Parallèlement aux dénonciations des discours haineux et du vandalisme, le grand combat de la CICAD, c'est l'éducation publique. Là aussi, Johanne Gurfinkiel se dit préoccupé par le climat actuel. Selon lui, «les références au nazisme se sont multipliés ces derniers mois» au sein des établissements scolaires.
Et la CICAD ne compte pas en rester là: «Nous voilà désormais toujours en attente d’un entretien avec la conseillère d’État, pour savoir quelles initiatives seront prises pour répondre à ces situations (ndlr: de violence) qui frappent des jeunes en raison de leur identité juive. La balle est désormais entre les mains de Mme Anne Hiltpold (PLR)», précise le Secrétaire général. Qui attend toujours la réponse de la magistrate à «notre courrier, envoyé il y a quelques semaines, l’invitant à une rencontre.»