C’est un chaud début de soirée d’été. Les terrasses des restaurants sont pleines, des hommes en marcel jouent tranquillement aux boules dans un parc bordant l’avenue de la gare de Monthey, en Valais. Il est 19h. Vasilica Contesse arrive, solaire. Sa journée de travail vient tout juste de s’achever.
L’inflation. On ne parle que de ça depuis quelques mois. Commençons par les chiffres. «Le Temps» détaillait fin juillet l’analyse de Comparis et du Centre de recherches conjoncturelles de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) sur le sujet. Selon leur calcul, la hausse des prix est de 1,4% sur une année, au premier semestre 2022. Pour la même période, le Secrétariat d'État à l'économie parle, lui, de 0,5%.
Conséquence: sans augmentation des salaires, le pouvoir d’achat des Suissesses et des Suisses plonge. Pour quels impacts humains? Afin de le comprendre, Blick développera cette thématique dans la semaine du 29 août au 2 septembre.
Première étape, des rencontres avec trois personnes au profil très différent: une travailleuse précaire valaisanne, une retraitée genevoise et un employé communal fribourgeois tout en haut de l’échelle salariale depuis cinq ans. Ces deux femmes et cet homme racontent leur quotidien, leurs choix, leurs factures, leurs doutes et leurs craintes face à l'envol du coût de leur vie.
L’inflation. On ne parle que de ça depuis quelques mois. Commençons par les chiffres. «Le Temps» détaillait fin juillet l’analyse de Comparis et du Centre de recherches conjoncturelles de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) sur le sujet. Selon leur calcul, la hausse des prix est de 1,4% sur une année, au premier semestre 2022. Pour la même période, le Secrétariat d'État à l'économie parle, lui, de 0,5%.
Conséquence: sans augmentation des salaires, le pouvoir d’achat des Suissesses et des Suisses plonge. Pour quels impacts humains? Afin de le comprendre, Blick développera cette thématique dans la semaine du 29 août au 2 septembre.
Première étape, des rencontres avec trois personnes au profil très différent: une travailleuse précaire valaisanne, une retraitée genevoise et un employé communal fribourgeois tout en haut de l’échelle salariale depuis cinq ans. Ces deux femmes et cet homme racontent leur quotidien, leurs choix, leurs factures, leurs doutes et leurs craintes face à l'envol du coût de leur vie.
L’heure est à l’apéro ou à la pizza. Enfin… pour les personnes qui peuvent se le permettre. Celle qui travaille depuis de nombreuses années pour une grande chaîne de magasins de prêt-à-porter implantée dans le coin n’en fait pas partie. Encore moins depuis que l’inflation fait la une des journaux. «Tout augmente, sauf les salaires», souffle la Roumaine d’origine, au bénéfice d’une formation de couturière.
Travailler n’est pas suffisant pour vivre
La quinquagénaire est en première ligne pour le constater. Elle travaille 39 heures par semaine à conseiller ses clientes venues chercher le tissu et la couleur qui les épouseront le mieux. Un job tout sauf alimentaire: «J’adore mon emploi qui me permet de mettre les femmes en valeur. C’est ma passion!»
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Une passion visiblement aussi ingrate que son employeur. Le montant inscrit sur sa fiche de paie à la fin du mois? 3549 petits francs. Une fois les différentes cotisations sociales passées par là, seuls 3059,40 francs lui sont versés sur son compte.
«Avec 3500 francs bruts par mois, on ne vit pas mais on survit, tonne Vasilica Contesse. Et ce n’est pas faute de travailler! C’est insensé de subir ça, en Suisse.» Elle enchaîne: «On entend chez certains politiques que l’économie s’adapte systématiquement au coût de la vie, qu’il n’y a pas besoin d’intervenir. Mais j’ai été augmentée une seule fois en quinze ans de carrière! Mon salaire horaire est passé de 19,50 francs à 21 francs. C’est tout…»
Ce n’est pas faute d’avoir demandé une revalorisation, assure-t-elle. «J’ai essayé mais mon employeur a refusé 'parce qu’il n’a pas d’argent'. Pourtant, la chaîne continue d’ouvrir des nouveaux lieux de vente… Je ne demande pas la lune: 25 francs par heure. Pour vivre mieux, bien sûr, et aussi, parce qu’après tant d’années, j’aurais trouvé ce geste normal.» Elle baisse la tête, comme résignée. «Je ne peux rien faire… À mon âge, je n’ai pas la langue dans ma poche mais je n’insiste plus: il vaut mieux avoir un mauvais salaire que pas du tout.»
L’inflation empire la situation
Depuis quelques mois, la vendeuse confie devoir «racler les tiroirs» pour payer ses factures. «Avec les prix qui augmentent, tout est encore plus difficile, rebondit-elle. Quand on gagne ce que je gagne, devoir sortir quelques francs de plus pour son assurance, pour ses courses et pour les transports a un gros impact à la fin. Je suis déjà limite-limite en temps normal, alors là…»
Conséquence: Vasilica Contesse n’a quasi plus aucune activité en dehors de son travail et de ses sorties avec son chien. Faute de moyens, elle ne possède pas de voiture et ne quitte donc plus sa ville de Monthey «pour éviter des frais superflus». Elle a aussi diminué les rares sorties au restaurant qu’elle s’autorisait avec ses copines. «J’y vais une fois tous les tremblements de terre, je ne peux tout simplement plus le faire, regrette-t-elle. J’arrive tout juste à payer ce que je dois. Aujourd’hui, c’est tout ce qui compte. Je préfère mourir de faim plutôt que d’avoir des dettes.»
«Que ceux d’en haut ouvrent les yeux!»
Le seul budget qu’elle parvient encore à diminuer de temps en temps pour pouvoir partir deux semaines par an en vacances chez ses parents en Roumanie? La nourriture. «C’est là où je m’en sors le mieux, appuie-t-elle. En faisant très attention à ce que j’achète, et selon les factures à régler, j’arrive parfois à mettre 300 francs de côté.»
Plus le temps passe, plus «l’inaction des autorités» face à l’inflation l’énerve. «J’aimerais que les gens d’en haut, ceux qui dirigent ce pays, ouvrent enfin les yeux! C’est intolérable que des travailleurs ne gagnent pas assez pour vivre. C’est même honteux!»
Quelles solutions voit-elle? «Obliger les entreprises à augmenter les salaires ou alors au moins faire en sorte, d’une manière ou d’une autre, que tout arrête de coûter toujours plus cher! L’État a de l’argent, notre argent, qu’il agisse!»