Un malheur n'arrive jamais seul. C'est ce qu'a appris Joe Biden jeudi. Pour la troisième fois en trois mois, le président américain s'est rendu au Capitole pour tenter de convaincre son parti du bien fondé de ses projets. Et pour la troisième fois, ce fut un échec.
«Je ne sais honnêtement pas si nous allons réussir à faire passer cela», a déclaré Biden à l'issue de la séance. Il aurait besoin des voix des démocrates Joe Manchin et Kyrsten Sinema pour abolir ce que l'on appelle le «filibuster», ou la possibilité d'empêcher une prise de décision au Parlement en parlant constamment. Biden pourrait alors faire adopter son projet de réforme par une simple majorité au Sénat. Mais ses deux collègues de parti ont bloqué le président.
Un mauvais début d'année électorale, donc. Lors des élections de mi-mandat en novembre, les démocrates pourraient perdre leur majorité à la Chambre des représentants ainsi qu'au Sénat.
Comment le président américain s'en est-il sorti durant sa première année d'exercice? Le SonntagsBlick s'est penché sur le premier Bilan de Joe Biden.
Économie
Jusqu'à présent, Biden a de fait accompli des choses: après les mois les plus durs de la pandémie, l'économie a de nouveau connu une forte croissance. Le chômage baisse. Le paquet de 1,2 billion de dollars pour les routes, les ponts et un Internet plus rapide a été débloqué.
Mais la méga-inflation plombe le bilan et, malgré la hausse des salaires, pèse particulièrement sur le porte-monnaie des familles. En décembre dernier, les prix à la consommation ont augmenté de 7% – ou la plus forte hausse depuis près de 40 ans.
Reste encore à faire adopter par le Congrès le paquet climatique et social «Build Back Better». Selon les experts, c'est ce qui pourrait réduire le plus rapidement les charges financières qui pèsent sur le pays.
Covid-19
Joe Biden a entamé son mandat armé d'un vaste plan pandémique. Il a aussi rapidement développé la production et la distribution des vaccins. Dès le mois d'avril, tout le monde pouvait recevoir la piqûre. Et dès le mois de septembre, le booster était largement accessible.
Mais le fait que l'on puisse, aux États-Unis, se faire vacciner dans un drive-in ou entre les rayons dentifrice et produits frais de n'importe quel supermarché n'aide en fait pas beaucoup à convaincre les vaccino-sceptiques restants: environ 38% de la population n'est pas encore vaccinée, et seulement 23% a reçu le booster. Jeudi, la Cour suprême a également mis fin à l'obligation de vaccination et de test prévue par Biden pour les grandes entreprises. En ce moment, avec la vague Omicron, les tests se font également rares et chers dans le pays.
Relations internationales
Qu'il s'agisse de l'accord de Paris sur le climat ou de l'Organisation mondiale de la santé: depuis l'entrée en fonction de Biden, les Etats-Unis jouent à nouveau un rôle international important. Le président américain s'est également intéressé de près à la Chine et a affiché son soutien à Taïwan. En juin, il a rencontré le président russe Vladimir Poutine à Genève.
Mais le retrait d'Afghanistan a tourné au désastre. Depuis, la réputation du gouvernement Biden en matière de politique étrangère est durablement ternie.
Climat
Sous la direction de Joe Biden, les Etats-Unis se sont à nouveau engagés à atteindre l'objectif des 1,5 degrés, et ont adopté des directives importantes. Biden a entre autres mis fin au financement de projets liés aux combustibles fossiles dans les pays en voie de développement. Il a imposé au gouvernement un programme d'économie de CO₂ et a créé une task force nationale sur le climat. Mais le grand coup de théâtre – le paquet législatif «Build Back Better» – manque encore à l'appel.
Armes
Après plusieurs fusillades au début de son mandat, Biden a déclaré la guerre au lobby des armes. Mais comme sous Barack Obama, l'affaire est bloquée au Congrès. Et la Cour suprême américaine pourrait même étendre le droit de porter une arme.
L'héritage de Trump
L'histoire de la fraude électorale empoisonne toujours les Etats-Unis. Une majorité d'électeurs républicains doute encore du résultat des élections. Dans les zones rurales, les assaillants du Capitole du 6 janvier 2021 sont célébrés comme des héros. Les voix républicaines qui critiquent Trump, comme la députée Liz Cheney, sont marginalisées au sein de leur propre parti.
La riposte s'organise donc bel et bien: dans 49 Etats américains, les républicains ont des lois électorales discriminatoires en préparation ou déjà adoptées. Ce qui est un danger pour la démocratie, préviennent les experts.
Biden ferait donc mieux de veiller à ce que les démocrates défendent leur mince majorité au Congrès lors des élections de mi-mandat.
Parti et gouvernement
Le gouvernement de Biden est parti à l'assaut du Capitole très bien préparé. Mais au cours des derniers mois, son conflit avec les républicains pro-Trump – ainsi qu'avec les démocrates modérés et progressistes – s'est intensifié. Ses projets les plus importants sont donc coincés quelque part entre des querelles internes. À cela s'ajoutent des problèmes avec sa vice-présidente Kamala Harris, à qui il a confié des tâches sisyphéennes comme la crise frontalière, et qui voit désormais ses collaborateurs lui glisser entre les doigts par dizaines.
(Adaptation par Daniella Gorbunova)