La ministre des Finances Karin Keller-Sutter veut frapper avec le marteau de l'austérité car le budget de la Confédération est dans le rouge et devrait encore se dégrader. Dès 2027, le Conseil fédéral prévoit un déficit de trois à quatre milliards de francs. Pour combler le trou dans la caisse, un groupe d'experts a proposé 60 mesures qui concernent l'accueil extra-familial des enfants, le forfait d'intégration pour les réfugiés, les subventions pour la protection du climat ou l'aide au développement.
Mais ces plans sont controversés. En décembre, la grande bataille budgétaire aura lieu au Parlement. Mais quelle est la position de la population suisse face aux propositions d'économies du Conseil fédéral?
L'institut de sondage Sotomo s'est penché sur la question et a tenté de brosser un portrait représentatif de l'avis des Suisses. Résultat: la population est aussi divisée que le Parlement.
Les partis bourgeois sont pour, le centre-gauche est contre
La population est pratiquement divisée en deux. 48% rejettent le paquet d'économies, 45% y sont plutôt favorables, tandis que 7% se disent indécis. Les propositions du Conseil fédéral sont surtout soutenues par les électeurs de l'Union démocratique du centre (UDC), du Parti libéral-radical (PLR) et du Centre. Elles sont en revanche rejetées par les partisans des Vert'libéraux, du Parti socialiste (PS) et des Vert-e-s. Les femmes, les personnes ayant une formation supérieure et les jeunes sont particulièrement sceptiques face au paquet d'économies.
Le Conseil fédéral veut avant tout réduire les dépenses. Une majorité de 54% des personnes interrogées souhaite en revanche couvrir au moins la moitié du déficit par de nouvelles recettes. L'introduction d'une taxe sur les transactions financières, c'est-à-dire une taxe sur chaque transaction sur le marché financier, est la plus souvent citée. Mais là encore, les électeurs du PLR et de l'UDC sont fondamentalement plus sceptiques vis-à-vis des nouveaux impôts. Ils préfèrent économiser sur les dépenses.
La population veut économiser ailleurs que le Parlement
Les personnes interrogées voudraient principalement réaliser ces économies dans les secteurs de l'aide au développement, la promotion des médias et l'armée. Toutefois, aucun domaine ne recueille une majorité absolue. Les propositions d'économies sont en contradiction avec les décisions prises jusqu'à présent par le Parlement: le Conseil national avait même décidé en automne dernier d'augmenter les dépenses dans le domaine du soutien aux médias et de l'armée.
Il est en revanche clair qu'une majorité de la population ne souhaite en aucun cas faire des économies en réduisant les caisses de l'AVS et l'AI. Ces dépenses sont supportées par les partisans de tous les partis. La formation, la recherche et l'innovation ainsi que les transports publics devraient également être épargnés, si cela ne tenait qu'à la population.
Une nette majorité ne veut pas assouplir le frein à l'endettement
Seuls 8% demandent une réduction des avantages fiscaux sur le retrait des capitaux de prévoyance des 2e et 3e piliers. La seule proposition du Conseil fédéral visant à augmenter les recettes ne recueille donc guère l'approbation de la population. En revanche, un impôt sur les gains immobiliers au niveau fédéral, deuxième source de revenus proposée par le groupe d'experts mais non retenue par le Conseil fédéral, obtient un score nettement plus élevé auprès des personnes interrogées.
Au fond, il serait également envisageable d'assouplir le frein à l'endettement au lieu de combler le déficit. Mais cette option est rejetée par la population. 61% des personnes interrogées y sont clairement ou plutôt opposées, contre 30% qui y sont favorables. Même parmi les électeurs du PS et des Vert-e-s, seule la moitié environ soutient un assouplissement du frein à l'endettement. Cela revient à demander au Parlement de rétablir effectivement l'équilibre des finances publiques.
Pour ce sondage, l'institut de sondage Sotomo a analysé les données de 3080 personnes interrogées entre le 28 octobre et le 11 novembre 2024.