Un cancer en phase terminale, mais pas de rente
«L'AI nous a catalogués, mon médecin et moi, comme des escrocs»

Pendant deux ans, Sascha Feuz s'est battu pour venir à bout d'un cancer en phase terminale. Mais comme si cela ne suffisait pas, l'AI n'a pas voulu lui accorder une rente, bien que son oncologue l'ait mis en arrêt maladie à 100%. Témoignage.
Publié: 22.06.2024 à 16:12 heures
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Dernière mise à jour: 22.06.2024 à 16:13 heures
Les médecins donnaient encore trois mois à Sascha Feuz lorsqu'ils lui ont diagnostiqué un cancer en phase terminale en mai 2022.
Photo: zVg
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Gina Krückl

En mai 2022, le diagnostic tombe pour Sascha Feuz: l'homme est atteint d'un cancer en phase terminale. Les médecins donnent à ce père de trois enfants encore trois mois à vivre. Mais comme par miracle, la tumeur, située dans le nez et la gorge du Bernois, rétrécit plus que prévu grâce à la chimiothérapie. Sascha se rétablit lentement, mais il sait aussi que le combat sera long et difficile. Il s'inscrit alors l'AI, car il est en congé maladie pour deux ans. Mais celle-ci ne le paie pas et il n'a toujours pas reçu un centime à ce jour. 

Le Bernois reçoit le préavis négatif peu avant Noël de l'année dernière. Selon l'AI, il devrait retrouver sa capacité de travail à 100% au plus tard en mai 2023. Absurde selon Sascha: il était débarrassé de sa tumeur que depuis juillet et devait encore prendre de puissants médicaments jusqu'en octobre, soit trois mois après l'échéance donnée par l'AI. C'est pourquoi il s'oppose à la décision et demande le dossier. Ce qu'il y lit le fait encore sortir de ses gonds aujourd'hui. «Ils nous ont catalogués, mon médecin et moi, comme des escrocs», dénonce-t-il à Blick.

Il faut dire que la décision de l'AI a eu de graves conséquences financières pour sa famille et lui. En raison de sa maladie, son entreprise a fait faillite et sa famille a épuisé ses économies. Depuis, elle est soutenue par l'aide sociale. Mais cette aide doit être remboursée dès que la situation financière le permettra. En d'autres termes: comme l'AI ne lui verse pas d'argent, Sascha s'endette de plus en plus auprès de l'aide sociale.

20 kilos de moins pour travailler?

Lorsque l'AI déclare le Bernois «en bonne santé», le père de famille est encore en plein traitement contre le cancer. Quelques semaines auparavant, il était encore alimenté artificiellement, car il avait perdu plus de 30 kilos à cause de la maladie et du traitement. Il ne pesait par moments que 47 kilos pour une taille de 1,8 mètre. Tout cela figure dans les rapports médicaux. Selon la médecin de l'AI, qui n'a jamais rencontré Sascha en personne, il est néanmoins capable de travailler à 100% à ce moment-là. Elle écrit à ce sujet dans son rapport: «Poids stable autour de 58 kilos.»

L'oncologue de Sascha est d'un tout autre avis, il lui a attesté une incapacité de travail de 100% depuis le début de la maladie et a renouvelé cette évaluation fin juillet 2023 «jusqu'à nouvel ordre», en raison d'une fatigue chronique due à la maladie. Celle-ci est toutefois «peu crédible», juge la médecin de l'AI. Elle écrit: l'incapacité de travail à partir de mai 2023 n'est pas due à des raisons médicales, mais «peut-être en premier lieu à des raisons sociales». Le fait que l'entreprise du Bernois ait fait faillite est un «facteur de risque», considère-t-elle.

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«C'est fou que l'AI accorde plus d'importance à l'avis d'un médecin qui n'a eu qu'un bout de papier entre les mains qu'à celui de mon médecin, qui m'a accompagné tout au long de ma maladie»
Sascha
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L'AI approuve finalement cette évaluation dans son préavis négatif et suit presque exactement les termes de la médecin. «C'est fou que l'AI accorde plus d'importance à l'avis d'un médecin qui n'a eu qu'un bout de papier entre les mains qu'à celui de mon médecin, qui m'a accompagné tout au long de ma maladie», poursuit Sascha.

Aussi miraculeuse qu'ait été sa guérison, il est convaincu qu'elle n'aurait pas été possible sans son attitude positive. «Il a fallu un tiers de médecine moderne, un tiers de ma foi chrétienne et un tiers de ma motivation. S'il avait manqué quelque chose, je serais mort aujourd'hui.» Mais il craint que ce soit précisément cela qui soit utilisé contre lui. «J'étais tellement focalisé sur le fait de gagner la bataille contre le cancer que j'avais l'impression d'être déjà guéri.»

L'AI pensée pour une invalidité longue durée

Interrogé, l'office AI du canton de Berne préfère ne pas donner d'informations sur la procédure en cours, malgré la levée de l'obligation de garder le secret. La responsable de la communication Sibylle Siegwart explique toutefois que les rentes AI sont en principe destinées aux invalidités de longue durée – c'est-à-dire lorsqu'une personne est en incapacité de travail d'au moins 40% pendant plus d'un an. 

De plus, Sibylle Siegwart explique que l'office AI du canton de Berne travaille actuellement sur sa stratégie de communication. «Les personnes concernées doivent pouvoir mieux comprendre comment nous prenons nos décisions. C'est là que nous voulons nous améliorer.»

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«Je veux simplement retrouver une certaine normalité. Travailler à nouveau et m'occuper moi-même de ma famille»
Sascha
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Malgré tout, en réaction à son opposition, Sascha a récemment été invité par l'AI à se faire examiner par pas moins de six spécialistes! Il ne le comprend pas: «A quoi cela peut-il encore servir?» Le miraculé a déjà passé plusieurs entretiens d'embauche, il veut retravailler à plein temps. Il ne sait pas si cela va marcher: «Je veux simplement retrouver une certaine normalité. Travailler à nouveau et m'occuper moi-même de ma famille», souhaite-il avant tout.

Pour lui, il n'est toutefois pas question de laisser l'affaire de l'AI derrière lui. «La façon dont ils m'ont traité est scandaleuse. Je veux encourager d'autres personnes à ne pas se laisser faire.»

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