Les activistes et les climatosceptiques semblent au moins être d'accord sur un point: même au bord d'une route, les déchets doivent être jetés dans une poubelle et non dans une bouche d'égout. Mais qu'en est-il s'il n'y en a aucune à portée de main, et que l'on est soi-même un activiste collé sur le bitume de l'autoroute? L'urgence du combat climatique justifie-t-elle pour autant que l'on balance ses détritus dans les eaux? Sous chaque bouche d'égout se cache une rivière, avertissait à l'époque une campagne de sensibilisation...
Un tube de colle atterrit dans l'égout
Un activiste climatique ne s'est apparemment pas posé la question. Au grand dam du conseiller national UDC argovien Andreas Glarner. Il a partagé sur Twitter un extrait vidéo qui lui hérisse les poils. «Un soi-disant activiste du climat s'est collé sur le bitume et a tout simplement jeté le flacon de colle en plastique dans les eaux sales», s'indigne-t-il.
Vidéo allemande après l'incident suisse
Andreas Glarner ne précise toutefois pas l'origine de la vidéo. Il a posté ce tweet quelques heures après l'action lors de laquelle des activistes climatiques se sont collés sur l'A6 à Berne, mardi matin. Mais la vidéo n'a rien à voir avec celle-ci.
Les images proviennent en réalité d'Allemagne. Il suffit de jeter un œil aux banderoles déployées pour s'en rendre compte, où il est question d'euros plutôt que de francs.
Andreas Glarner en est conscient. Mais pour lui, ses followers ne sont pas induits en erreur pour autant. «Ces fauteurs de trouble ont un réseau international», affirme-t-il à Blick. Pour lui, il y a un véritable tourisme en la matière: «Des gens viennent d'Allemagne pour déclencher ce type d'action en Suisse.»
Seulement voilà, il n'existe aucune preuve que des activistes allemands ont bel et bien participé à la manifestation bernoise.
Andreas Glarner veut agir
Le conseiller national argovien est en tout cas très irrité par les actions des activistes. «Ils bloquent les gens qui veulent se rendre au travail, ainsi que les ambulances», s'agace-t-il. Le politicien UDC veut donc agir. Lors de la session d'hiver, il déposera une intervention visant à instaurer une nouvelle infraction pénale pour ce type de cas: «Par analogie: blocage intentionnel de la circulation».
On peut se demander si cela est nécessaire. Les activistes à Berne doivent déjà s'attendre à être poursuivis, car l'entrave à la circulation et l'obstruction des transports publics sont déjà punissables par la loi suisse.
Une professeure d'université collée à l'A6
La professeure d'université Julia Steinberger risque d'être dénoncée et, dans le pire des cas, licenciée. Cette spécialiste en économie écologique à l'Université de Lausanne a participé à l'action. Bien sûr, elle craint les conséquences, a-t-elle expliqué à «20 Minuten». Mais elle est prête à perdre son emploi. «Si mon engagement signifie que je dois me sacrifier, alors qu'il en soit ainsi. La cause en vaut la peine», assure-t-elle.
Elle explique avoir pris part à l'action parce qu'elle est du métier et qu'elle sait que le monde est confronté à une crise climatique existentielle. «Il est extrêmement important de comprendre que les professeurs sont eux aussi des citoyens de ce pays et que, d'un point de vue scientifique, ils ont le droit de critiquer l'Etat en attirant l'attention sur ses dysfonctionnements», ajoute-t-elle.
D'autres actions restent sans succès
Selon elle, une participation radicale à ce type d'action survient parce qu'elle s'est heurtée à toutes les autres tentatives jusqu'à présent: elle a déjà écrit plusieurs fois des articles et présenté ses idées au gouvernement - sans succès.
L'organisation Renovate Switzerland est à l'origine de cette action. Elle demande la mise à disposition immédiate de 4 milliards de francs pour former 100'000 personnes supplémentaires aux métiers de la rénovation thermique des bâtiments.
Julia Steinberger assure que l'Université de Lausanne soutient l'engagement public des universitaires, ce que l'UNIL a confirmé dans la foulée de l'action à Berne. «L’université ne pouvant se substituer au pouvoir judiciaire en la matière, elle ne devrait prendre aucune mesure préventive pour limiter la participation de ses employés à des actions de désobéissance civile ni condamner a priori ce mode d’engagement», a souligné l'université.
(Adaptation par Thibault Gilgen)