La mafia italienne est très répandue en Suisse, bien plus qu’on ne le pensait. C’est ce que montrent des données inédites de l’Office fédéral de la police (Fedpol), auxquelles l'«Aargauer Zeitung» a eu accès.
Les mafiosi n’ont pas uniquement fait leur nid dans le canton du Tessin. La région zurichoise semble particulièrement attrayante à leurs activités mafieuses, du moins selon celles que la Fedpol à recensées ces dernières années.
Sergio Mastroianni, procureur fédéral spécialisé dans la lutte contre la mafia, estime que le phénomène est particulièrement présent en Suisse alémanique. Si la Suisse romande n’est pas au cœur des activités mafieuses, elle n’en est pas dépourvue pour autant, comme au Valais où la Ndrangheta calabraise reste fortement implantée, rapportait le Nouvelliste en avril.
La mafia au Valais
La proximité avec le val d’Aoste et le Piémont, où la Ndrangheta est très présente, fait du canton valaisan un lieu de fuite privilégié. Les membres en cavale se réfugient chez leur famille. En effet, il existe une forte communauté calabraise dans la région. Les mafiosi y feraient profil bas et tenteraient de s’intégrer à la population. Il ne serait pas rare qu’ils arrivent à obtenir un permis B pour travailler dans des entreprises suisses, détaille le Nouvelliste.
Toujours davantage d’éléments indiquent que les mafiosi en Suisse n’opèrent pas seulement dans la clandestinité. Ils ne reculent pas devant des actes violents. On considère par exemple qu'un triple meurtre à Bâle en 1992, qui avait été classé comme un crime relationnel après la fin de l’enquête, serait en réalité un règlement de compte sanglant entre deux groupes mafieux.
Les autorités ont sous-estimé la mafia
Pendant longtemps, les autorités n’ont pas réalisé à quel point la mafia était devenue puissante en Suisse. En 2014 encore, l’ancien procureur général de la Confédération Michael Lauber déclarait: «La Suisse n’est pas un pays mafieux». Ce n’est que cet automne que le Conseil fédéral a admis pour la première fois que la présence et les activités des organisations mafieuses en Suisse avaient été «sous-estimées au cours des dernières décennies».
Des recours juridiques plus sévères sont demandés
La cheffe de Fedpol s’est montrée ferme lors d’un événement organisé cet été: «Nous avons un vrai problème que nous ne pouvons résoudre qu’au travers d’une meilleure coopération nationale et internationale», avait asséné Nicoletta della Valle.
Un Code pénal plus strict envers les organisations criminelles pourrait être la solution. Une nouvelle disposition est en vigueur en Suisse depuis le mois de juillet de cette année. Toute personne étant identifiée comme une des figures de proue d’une organisation criminelle risque désormais jusqu’à 20 ans derrière les barreaux. Auparavant, ces individus ne risquaient que cinq ans de prison.
Pour de nombreux politiciens et procureurs, ce n’est pas suffisant. Marco Romano, conseiller national du Tessin, a déclaré à l'«Aargauer Zeitung» que la «naïveté» doit céder la place à une «offensive pour combattre la mafia». Rosa Maria Cappa, avocate tessinoise, estime également que des recours juridiques plus sévères sont nécessaires: «Ce n’est qu’en confisquant leurs biens qu’on fera vraiment du mal à la mafia.» (zis/chj)