Ses propos refont surface
Un ex-pilote suicidaire d’EasyJet inquiète en Suisse romande

Les menaces et les propos suicidaires d'un Genevois, ex-pilote d'EasyJet, refont surface quatre ans après la première alerte. Mais le ministère public ne communique rien aux parties malgré des plaintes pénales déposées.
Publié: 11.07.2024 à 10:28 heures
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Dernière mise à jour: 11.07.2024 à 15:34 heures
L'individu genevois semble depuis avoir enchaîné période de chômage et activité comme pilote privé. (Image symbolique)
Photo: KEYSTONE
Frédéric Nejad Toulami

«Ma vie c’est de la merde depuis que je suis né […] Je vais probablement me suicider.» Ces propos d’un pilote de ligne genevois rédigés dans un groupe WhatsApp en 2019 avaient inquiété ses amis et connaissances. Alerté, son employeur d’alors, la compagnie Easyjet, avait confirmé l’avoir suspendu durant une enquête interne, conformément à la procédure, puis finalement licencié. «Nous lui avons aussi offert notre soutien», indiquait alors une porte-parole d’Easyjet pour la Suisse.

À l’époque, cette affaire avait suscité un certain écho dans des médias européens, notamment en raison du souvenir du drame mortel qui avait frappé un vol de la compagnie Germanwings en 2015: un co-pilote dépressif s’était enfermé seul dans la cabine avant de faire écraser l’avion plein de passagers. Personne n’avait survécu.

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Quant à l’individu genevois, il semble depuis avoir enchaîné période de chômage et activité comme pilote privé. Sur internet, il affiche 15 ans d’expérience dans les airs à travers le monde. Les craintes autour de sa santé mentale ont cependant refait surface quatre ans après la première alerte.

Plaintes et enquête en 2023

Plusieurs personnes ont porté plainte pénale contre lui dans les cantons de Vaud et de Genève en août 2023, après avoir été menacées. Avocat de deux plaignants vaudois – un couple ayant été menacé par ce pilote – Me Denis Mathey décrit la gravité de la situation: «Les propos proférés étaient extrêmement graves et visaient aussi leur famille.»

Inquiète à nouveau de l’état de santé psychique de l’individu l’été dernier, une des personnes visées a alerté le corps médical, ce qui a provoqué l’ire du pilote. Lors de ce qui ressemble à une rechute, il a formulé des propos litigieux contre celles et ceux soupçonnés de l’avoir dénoncé. Ces nouvelles accusations ont conduit à une plainte déposée par le couple vaudois, incitant les autorités à réagir rapidement.

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«Je n’ai même pas su si le prévenu avait été auditionné par la procureure»
Me Mathey, avocat de deux plaignants vaudois
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Du côté vaudois, le dossier a rapidement été pris en main, avec l’audition du pilote par la police et la notification des charges retenues contre lui. Des plaintes similaires déposées à Genève ont conduit à une procédure de fixation de for, transférant le dossier pénal au Ministère public genevois en septembre 2023. Depuis, les parties n’ont reçu aucune information sur l’avancement de l’affaire, et ce, malgré par exemple les courriers officiels de l’avocat-conseil vaudois. «Je n’ai même pas su si le prévenu avait été auditionné par la procureure», annonce Me Mathey.

Dix mois après le transfert du dossier à Genève, le silence des autorités judiciaires reste incompréhensible pour les plaignants. Blick a essuyé un no comment de la part du parquet genevois en raison de l’affaire en cours. Seule bonne nouvelle: les plaignants n’ont plus reçu de propos inquiétants depuis l’ouverture de l’enquête. Mais ils souhaitent savoir où en la justice dans cette affaire.

Frustration et attentes

«Il n’est jamais agréable de recevoir des menaces, nous confie un autre plaignant genevois qui préfère rester anonyme. Les lenteurs de la justice peuvent représenter quelque chose de frustrant, mais je suis conscient de la multiplicité des affaires judiciaires en cours. Et il est préférable d’agir dans le cadre légal plutôt que de faire recours à des méthodes qui s’apparentent à la vengeance tribale.»

En réponse aux questions sur les contrôles médicaux des pilotes, l’Office fédéral de l’aviation civile (OFAC) explique que les règles de surveillance médicale des pilotes en Suisse s’appliquent strictement tant dans l’aviation privée que commerciale pour conserver leurs licences. Porte-parole de l’OFAC, Antonello Laveglia précise: «Les intervalles entre les examens médicaux pour les pilotes sont détaillés dans la réglementation fédérale: ceux âgés jusqu’à 40 ans, tous les cinq ans. De 40 à 49 ans, tous les deux ans – et à partir de 50 ans, chaque année.»

Une trentaine de cas par an sont signalés par les médecins mandatés par l’OFAC, soit une tendance à la hausse! «Ce chiffre inclut non seulement les pilotes, mais aussi le personnel de cabine et les contrôleurs de l’espace aérien. Avec la reprise du trafic aérien postCOVID, une vague de nouveau personnel a été formée et engagée, augmentant le nombre d’examens médicaux et de cas signalés», souligne Antonello Laveglia. L’attention accrue des compagnies aériennes sur ces questions, selon lui, contribue également à la hausse des signalements. La sécurité et le suivi médical semblent rester une priorité pour l’aviation civile.

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