Ce fut une semaine noire pour l'industrie automobile allemande: les employés d'une usine Audi à Bruxelles ont protesté contre les plans de réduction des effectifs de la maison mère Volkswagen (VW). BMW a pour sa part dû effectuer un rappel massif pour des problèmes de freins et un avertissement sur les bénéfices.
Pour l'expert automobile Ferdinand Dudenhöffer, il est clair que «BMW et VW ont un problème en Allemagne, qui ne se manifeste pas seulement par les coûts élevés de leur implantation.» La raison: les deux entreprises dépendent des ventes en Chine. Et là-bas, les affaires ne marchent plus très bien pour les constructeurs allemands depuis que l'électromobilité a le vent en poupe. En effet, seuls les véhicules thermiques allemands sont demandés en Chine.
«Le gouvernement allemand détruit l'électromobilité»
Pour Ferdinand Dudenhöffer, le fait que les constructeurs automobiles allemands ne jouissent de leur bonne réputation que dans le domaine des voitures à combustion et non pas dans celui des voitures électriques est aussi la conséquence d'erreurs politiques. «Le gouvernement allemand détruit l'électromobilité en Europe», déclare l'expert.
En effet, l'année dernière, le ministre allemand de l'économie Robert Habeck a supprimé du jour au lendemain la prime à l'achat pour les voitures électriques. En conséquence, les ventes de voitures électriques se sont effondrées en Allemagne.
Dans l'ensemble, le gouvernement allemand manque d'une politique claire: «Il change constamment de cheval et est poussé par les tendances actuelles, déplore Ferdinand Dudenhöffer. Il subventionne même par exemple les usines de batteries, alors qu'en Europe, il veut en même temps revenir sur l'interdiction des véhicules à combustion.»
Les sous-traitants suisses touchés
Les difficultés rencontrées en Allemagne pèsent sur les sous-traitants automobiles suisses. «Ils sont fortement liés aux constructeurs allemands», explique Ferdinand Dudenhöffer. Mais les sous-traitants auraient aussi d'autres clients en Europe, comme les marques Stellantis Citroën, Peugeot et Fiat. «L'important pour les Suisses: marquer des points avec des innovations, qui sont alors très demandées.»
Le son de cloche est tout à fait similaire chez l'équipementier schaffhousois Georg Fischer. Les problèmes de VW et d'autres constructeurs automobiles européens représentent toutefois «un certain défi», déclare un porte-parole. «Mais ces baisses peuvent être largement compensées par une présence géographique équilibrée et par un large portefeuille de clients et de produits.»
Chez Georg Fischer, la division GF Casting Solutions fournit notamment VW. La division contribue à hauteur de 20% au chiffre d'affaires total de l'entreprise.
La crise VW est secondaire pour Komax et Cie.
Chez le sous-traitant Ems Chemie, on considère la crise VW avec calme: «Les fermetures d'usines peuvent certes entraîner des déplacements entre les régions et les marques automobiles, mais pour EMS, en tant que sous-traitant couvrant le marché mondial, de telles conséquences n'ont pas d'impact», répond-on sur demande.
L'industrie automobile est également un client important pour Komax et SFS. Les deux entreprises ne livrent toutefois pas en premier lieu aux marques automobiles, mais à d'autres sous-traitants. Pour elles, c'est donc surtout l'évolution du marché automobile mondial et des régions qui compte, et moins les différentes marques.
Pour Komax, l'Europe dans son ensemble revêt une grande importance, écrit un porte-parole. Et selon S&P Global Mobility, un recul des ventes de véhicules de 5% se dessine. Au niveau mondial, on s'attend à un recul de 2% cette année, après une forte augmentation l'année précédente.
Des droits de douane punitifs contre la Chine
Les fournisseurs suisses ne peuvent de toute façon pas trop compter sur le reste de l'Europe, car selon Ferdinand Dudenhöffer, la Commission européenne – sous la présidence allemande d'Ursula von der Leyen – a elle aussi échoué.
«Toute l'industrie automobile européenne était contre les droits de douane punitifs contre les constructeurs automobiles chinois, mais Ursula von der Leyen les a quand même introduits.» Avec ces droits de douane, Bruxelles ne met pas seulement en péril la coopération avec la Chine, mais incite les constructeurs chinois à construire des usines en Europe afin de contourner les nouveaux droits de douane.
La situation reste difficile pour VW
Moins de ventes en Chine et plus de voitures chinoises en Europe: y a-t-il donc encore un espoir pour l'industrie automobile allemande? La clé, c'est que la politique crée de bonnes conditions pour l'industrie des voitures électriques, explique Ferdinand Dudenhöffer.
Mais l'expert est convaincu que cela restera difficile pour VW. Avec la participation du Land de Basse-Saxe au conseil de surveillance – c'est ainsi que s'appelle le conseil d'administration en Allemagne – VW est «en fait un groupe d'Etat». Tout changement nécessaire en Basse-Saxe est ainsi bloqué. VW compte plus de 100'000 employés dans le Land.
BMW, en revanche, est une entreprise solide. Les rappels pour des problèmes de qualité doivent néanmoins être pris au sérieux, selon Ferdinand Dudenhöffer. Il est frappant de constater que le système de freinage concerné par le dernier rappel provenait également d'une entreprise allemande, et plus précisément du fournisseur Continental.