L'ambassadeur suisse auprès de l'OTAN à Bruxelles, Philippe Brandt, a signé en décembre dernier une lettre explosive. Comme le rapporte le journal autrichien «Die Presse», cette lettre prévoit un plan en cinq points sur la manière dont les pays neutres que sont la Suisse, l'Autriche, Malte et l'Irlande peuvent collaborer encore plus étroitement avec l'OTAN. Cela comprend des exercices militaires très élaborés, auxquels la cheffe du Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS), Viola Amherd, pourrait participer.
Par moments, la missive se lit comme une déclaration d'amour à l'OTAN. Les quatre pays neutres se considèrent comme «les partenaires les plus proches de l'OTAN lorsqu'il s'agit de valeurs partagées» et soulignent «l'importance croissante» du partenariat: «La guerre d'agression illégale de la Russie contre l'Ukraine nous concerne tous.»
Dans le jargon de l'OTAN, les quatre pays que sont la Suisse, l'Autriche, Malte et l'Irlande sont appelés WEP4 (Western European Partner 4). Auparavant, on parlait des WEP5 lorsque la Suède et la Finlande étaient encore neutres. L'adhésion de Stockholm et d'Helsinki à l'OTAN a redistribué les cartes; depuis, Malte coopère avec les pays neutres restants.
Échange de renseignements
La lettre contient un plan concret en cinq points: premièrement, les échanges avec les alliés et les partenaires doivent être plus fréquents et plus intensifs.
Deuxièmement, les WEP4 souhaitent un accès privilégié aux documents et aux informations. Comme le rapporte «Die Presse», il s'agit également d'intensifier l'échange de données de renseignement, car il y a encore une marge de progression dans ce domaine.
Troisièmement, il doit y avoir un engagement commun pour façonner les normes et les domaines politiques – les amis de l'OTAN souhaitent être impliqués à temps dans les décisions.
Quatrièmement, la gestion commune des crises doit être intensifiée, ce qui implique la participation de la Suisse à des exercices de haut niveau: les Crisis Management Exercise (CMX) sont des scénarios auxquels participent aussi les ministres de la Défense et où l'on simule, sans armes réelles, la réaction à une attaque.
Cinquièmement, le domaine de l'innovation doit être renforcé, par exemple via la plateforme d'innovation «Diana». Car les États neutres craignent d'être distancés en matière d'armement.
«Se rapprocher n'est pas adhérer»
Au Palais fédéral, la lettre adressée à l'OTAN n'était jusqu'à présent pas connue. «Je vais demander au DDPS pourquoi nous n'en avons pas été informés jusqu'à présent», déclare la présidente de la Commission de la politique de sécurité (CPS) du Conseil national, la socialiste Priska Seiler Graf. Elle salue l'orientation du Conseil fédéral: «Un rapprochement ne signifie pas une adhésion à l'OTAN.»
L'UDC, en revanche, met en garde contre une «adhésion rampante à l'OTAN» et a lancé l'initiative sur la neutralité. L'UDC Werner Salzmann, président de la Commission consultative en matière de sûreté intérieure (CSI) au Conseil des États, estime que «la priorité est maintenant de rétablir la capacité de défense de notre armée. Nous avons besoin le plus rapidement possible d'une doctrine de défense. Sans cette base, nous ne pouvons ni acquérir de manière ciblée, ni nous exercer correctement, ni nous préparer à d'éventuelles coopérations».
«Dans le respect de la neutralité»
Le Département des affaires étrangères (DFAE) ne voit rien de nouveau dans le flirt avec l'OTAN. Par le passé déjà, la Suisse a participé à des réunions du Conseil de l'Atlantique Nord et même à des exercices CMX. Tout cela s'est fait «dans le respect de la neutralité».