Le Secrétariat d'État à l'économie (SECO), chapeauté par le conseiller fédéral vaudois Guy Parmelin, est sous le feu des critiques. Il observerait passivement comment l'oligarque russe Andreï Melnitchenko contourne les sanctions à son encontre. Celui-ci avait simplement cédé sa société Eurochem à sa femme, selon un article du «Tages-Anzeiger».
Après la parution de ce dernier, le chef du parti du Centre, Gerhard Pfister, a réagi en tweetant que, si le SECO n'a aucune idée de la manière dont il va empêcher ce contournement, il serait plus honnête d'affirmer que le Secrétariat d'État et son ministre de tutelle ne veulent pas de sanctions.
Inadmissible pour deux chefs de parti
Dans la «SonntagsZeitung», le coprésident du PS Cédric Wermuth et le chef du PLR, Thierry Burkart, expriment à leur tour des critiques à l'encontre du Secrétariat d'État. Pour eux aussi, il est inadmissible que le SECO ait laissé le Russe transmettre l'Eurochem zougois à son épouse avant d'être sanctionné. Pour les deux chefs de parti, ce transfert ressemble fortement à un contournement.
Thierry Burkart se montre «très étonné» que le SECO laisse passer cela. Pour lui, les faits doivent être clarifiés plus précisément et des documents supplémentaires doivent être demandés. «Le SECO s'est rendu la tâche trop facile», déclare le libéral-radical dans l'article en question.
«Sérieuses lacunes»
Pour le chef du PLR, le ministre de l'Économie, Guy Parmelin, est tenu de veiller à ce que les sanctions soient mises en œuvre et appliquées et donc que «le SECO prenne cette tâche au sérieux».
Le socialiste Cédric Wermuth parle même de «sérieuses lacunes dans le système suisse». La lenteur et le manque de motivation du SECO dans la mise en œuvre des sanctions sont une véritable invitation à imaginer toutes sortes de moyens créatifs pour contourner les sanctions.
Le SECO, sous la direction de la secrétaire d'État sortante Marie-Gabrielle Ineichen-Fleisch, n'est pas seulement critiqué pour le manque d'application des sanctions. Pendant la pandémie déjà, le secrétariat d'État du département de Guy Parmelin avait fait les gros titres pour son inaction.
Guy Parmelin aussi dans le collimateur
Le fait que le SECO tolère que la loi soit bafouée retombe désormais sur son chef, le conseiller fédéral Guy Parmelin. «On ne peut pas parler de contournement des sanctions», se justifie le Secrétariat d'État. Selon ce dernier, les sanctions contre l'oligarque seraient appliquées.
Andreï Melnitchenko, qui a un domicile à Saint-Moritz (GR), avait été placé en mars sur la liste des sanctions par l'UE puis par la Suisse, car il faisait partie «du cercle le plus influent d'hommes d'affaires russes ayant des relations étroites avec Poutine». Peu avant l'entrée en vigueur de la sanction, le Russe avait déclaré publiquement qu'il s'était retiré du groupe d'engrais Eurochem. Le SECO savait toutefois que le Russe n'avait fait que transférer ses parts à sa femme, Alexandra Melnitchenko.
Vérification juridique
La conseillère nationale Manuela Weichelt pense pourtant que le SECO a suffisamment de marge de manoeuvre pour agir. La Verte se réfère aux dispositions relatives aux personnes politiquement exposées . Dans le sillage du Printemps arabe, l'autorité de surveillance des marchés financiers avait également appliqué ces directives aux proches de dictateurs, explique-t-elle. Comme cela a fonctionné à l'époque, la conseillère nationale attend aujourd'hui aussi «que le SECO applique les règles».
Manuela Weichelt demande un examen juridique de ce contournement - et donc aussi de sa tolérance par le SECO.
(Adaptation par Thibault Gilgen)