Sa mission? Bruxelles
Viola Amherd, cet atout suisse des relations européennes

Viola Amherd, sous-estimée mais déterminée, s'affirme comme la force motrice d'un accord avec l'Union européenne concernant les entreprises suisses. Face aux critiques, la ministre de la Défense souhaite couronner son année présidentielle avec succès.
Publié: 25.08.2024 à 12:28 heures
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Dernière mise à jour: 25.08.2024 à 12:53 heures
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La présidente de la Confédération Viola Amherd (à g.), et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, entretiennent des liens étroits, ici le 18 mars 2024 à Bruxelles.
Photo: Keystone
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Reza Rafi

Flops en matière de personnel, scandale au service de renseignements, attitude arrogante lors de la conférence du Bürgenstock... Depuis quelques mois, Viola Amherd n'en finit plus d'essuyer les critiques. Les reproches étaient en partie justifiés, mais aussi alimentés par le profil d'une magistrate qui n'aurait pas la stature, la rhétorique et le charisme des chefs d'Etat de niveau international. 

C'est peut-être justement la force décisive de la politicienne du Centre d'avoir été sous-estimée pendant la première moitié de son année présidentielle. En silence, loin du halo médiatique, elle a élaboré une politique conforme à ses attentes. En forçant un rapprochement avec l'OTAN, elle s'est exposée aux vents contraires de la droite en matière de politique de neutralité.

Viola Amherd s'est révélée être le véritable «euroturbo» du gouvernement fédéral, la force motrice derrière un accord institutionnel avec l'Union européenne.

Karin Keller-Sutter prendra la relève

Des cercles proches du Conseil fédéral le confirment. À la table des négociations à Bruxelles, la Haut-Valaisanne donne le rythme. Mais surtout, parallèlement aux discussions de niveau diplomatique, Viola Amherd utilise sa ligne directe avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Les deux politiciennes entretiennent des relations amicales depuis l'époque où elles étaient ensemble ministres de la défense. Cette année, elles se sont notamment rencontrées lors du World Economic Forum et de la conférence de paix sur l'Ukraine.

Viola Amherd souhaite pouvoir garantir durablement aux entreprises suisses l'accès au marché intérieur de l'Union Européenne, avant que la ministre des Finances Karin Keller-Sutter, beaucoup plus critique envers l'UE, ne prenne la relève l'année prochaine. Cette dernière avait largement contribué à la rupture de l'accord-cadre avec Bruxelles en 2021.

Bruxelles cédera-t-elle sur la clause de sauvegarde?

Ignazio Cassis, ministre des Affaires étrangères, poursuit le même objectif et a préparé le terrain en amont pour que l'affaire passe le cap du Conseil fédéral. Les voix de ce dernier, de Viola Amherd ainsi que celles de deux socialistes suffiraient pour obtenir une majorité. Afin d'éviter une mauvaise surprise, Ignazio Cassis mets toutes les chances de son côté. Ainsi, dans un acte de transparence, il a fait publier fin 2023 le résultat des négociations préliminaires avec Bruxelles, le fameux «Common Understanding».

En dehors de l'entourage du chef du DFAE, en revanche, la situation est interprétée autrement: Viola Amherd arracherait les rênes de la politique européenne au Tessinois.

Les deux camps ont en commun le même pronostic: ceci devrait avoir lieu d'ici novembre. Des notes optimistes se font déjà entendre. la Commission européenne serait très intéressée par l'accord. On serait même déjà dans la dernière ligne droite, même si des clarifications finales seront peut-être encore nécessaires concernant l'accord sur l'électricité ou la migration. L'UE fera-t-elle des concessions dans le domaine de l'immigration? Si tel est le cas, cela signifierait que Bruxelles pourrait accepter l'idée d'une clause de sauvegarde.

L'initiative de l'UDC sur l'immigration se profile

Pourtant, le conditionnel domine dans ce dossier. Il est difficile de dire ce qui relève de l'enjolivement tactique ou de positions réelles. On ne sait pas non plus quelle contrepartie l'UE exigera, on pourrait imaginer des milliards de cohésion supplémentaires ou une ouverture du réseau ferroviaire.

L'initiative de l'UDC contre l'immigration, dite de durabilité («Pas de Suisse à 10 millions!»), qui guette l'horizon, devrait jouer un rôle important. Si cet accord avec l'UE était accepté, il viendrait couper l'herbe sous le pied de l'UDC. Le président du Centre, Gerhard Pfister, qui a récemment brisé le tabou dans une interview, a exigé une clause d'immigration dans l'accord de libre circulation avec l'UE. Pendant ce temps, d'autres alternatives se profilent: un contre-projet à l'initiative populaire de l'UDC ou une clause de sauvegarde unilatérale dans l'accord sur la libre circulation des personnes, qui s'appliquerait à partir de dix millions d'habitants. De la gauche à la droite, tout le monde s'accorde à dire que le thème de l'immigration est devenu l'un des grands casse-tête de l'agenda national.

C'est le peuple qui décidera

Même sans l'initiative de l'UDC, les obstacles à un nouveau régime bilatéral avec l'UE sont encore nombreux. Fin août, début septembre, les discussions se poursuivront. Si un accord devait être conclu et si celui-ci passait le cap du Conseil fédéral, le message serait transmis au Parlement. Là, le match entre les chambres et les commissions commencerait. Mais au final, le peuple aura le dernier mot.

Interrogés, les départements de Viola Amherd et d'Ignazio Cassis ne s'expriment pas sur les négociations en cours.

Le peuple se laissera-t-il convaincre par Viola Amherd et ses compagnons d'armes? 

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