La Ville de Lausanne rassure
Des enfants ont été témoins de la tentative de féminicide de Malley

Des enfants ont été témoins, directs ou indirects, de la tentative de féminicide qui a fait trois blessés, ce mardi à Malley. Une structure d'accueil parascolaire donne directement sur les lieux. La Ville de Lausanne répond aux inquiétudes des parents.
Publié: 23.01.2025 à 04:12 heures
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Dernière mise à jour: 23.01.2025 à 17:27 heures
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Sur le chemin de la Prairie, à Lausanne, un homme s'en est pris à main armée à sa conjointe ce mardi 21 janvier.
Photo: Léo Michoud/Blick
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Léo MichoudJournaliste Blick

Les fenêtres du centre d’Accueil pour enfant en milieu scolaire (APEMS) donnent sur le chemin de la Prairie, à Malley dans l’Ouest lausannois. C’est dans cette rue que la veille, le mardi 21 janvier, la tentative de féminicide d’un homme a fait trois blessés, sous l'oeil de nombreux témoins depuis leur balcon ou leur fenêtre. A l’intérieur de la structure, dès 7h, se trouvaient des enfants de 7 à 10 ans, accompagnés par trois éducateurs avant le début de l’école.

Ce mercredi, peu après 16h, une habitante du quartier familial vient chercher son fils. Interrogée par Blick, elle explique que son enfant n’a fort heureusement rien vu de la violence déchaînée par un quinquagénaire contre sa conjointe de 40 ans, puis contre deux hommes – dont un voisin – ayant tenté d’intervenir. «Hier à l’APEMS, ses copains lui ont raconté tout ce qui s’était passé, relate la maman, avec une pointe d’inquiétude dans la voix. Jusque-là, mon enfant rentrait tout seul. Maintenant, je ne le laisse plus faire et je viens le chercher… par sécurité.»

Ce que l’on sait de l’agresseur

L’homme qui a poignardé sa compagne n’était pas connu des services de police. Il n’a jamais fait l’objet d’une condamnation, a confirmé à Blick mercredi le Ministère public vaudois. Ce Suisse de 53 ans n’était pas soumis à une mesure d’éloignement. Il ne portait donc pas de bracelet électronique, qui aurait signalé aux forces de l’ordre son rapprochement de sa victime.

L’homme qui a poignardé sa compagne n’était pas connu des services de police. Il n’a jamais fait l’objet d’une condamnation, a confirmé à Blick mercredi le Ministère public vaudois. Ce Suisse de 53 ans n’était pas soumis à une mesure d’éloignement. Il ne portait donc pas de bracelet électronique, qui aurait signalé aux forces de l’ordre son rapprochement de sa victime.

Blick a cherché à savoir comment cet incident violent a été vécu au sein de cette structure parascolaire qui héberge des enfants matin, midi et soir. A la Ville de Lausanne, c’est Barbara de Kerchove, la cheffe du service des écoles et du parascolaire, qui a répondu à nos interrogations: «Les trois adultes ont fait preuve de beaucoup de sang-froid et de professionnalisme. Ils ont su mettre leur mission au centre, à savoir garantir la sécurité physique et émotionnelle des enfants.»

Stores fermés, enfants en sécurité

Voyant l’agitation à l’extérieur, un éducateur a rapidement fermé les stores. Comme le veut la procédure en la matière, les encadrants se sont ensuite installés avec les enfants présents dans une salle sans visibilité sur le chemin de la Prairie. Le gros de la violence était alors passé, autour de 7h30 du matin, mais la police s’activait dans le quartier. «Effectivement, l’événement a choqué les quelques enfants qui étaient sur place», évoque Barbara de Kerchove. Pour les détails, elle renvoie vers la directrice de la structure, Karina Pequignot.

«
Il n’y a pas eu de danger pour les enfants. Mais certains ont tout de même vu, perçu ou entendu les événements et les détonations
Karina Pequignot, directrice de l'APEMS de Malley (accueil parascolaire)
»

«Il n’y a pas eu de danger pour les enfants, rassure d’abord l’éducatrice en cheffe. Mais certains ont tout de même vu, perçu ou entendu les événements et les détonations.» Ce matin-là, comme chaque jour de semaine, les enfants sont arrivés depuis toutes les directions, alors que la police est présente en nombre pour boucler le quartier. «Nous avons assuré l’accueil en tout temps, pendant l’intervention policière, se félicite Karina Pequignot. Aucun enfant ne s’est retrouvé devant une porte fermée.»

Rassurer par les mots, sans dissimuler

Elle explique que les éducateurs présents ont fait en sorte de rassurer les enfants «par les mots», mais sans trop entrer dans les détails: «Ils ne leur ont pas caché qu’il se passait quelque chose d’inquiétant. Leur démarche a été de détacher l’enfant de la situation pour qu’il ne s’identifie pas avec les personnes mises en danger.» Face à cette situation, les enfants se sont surtout posé beaucoup de questions, un réflexe «normal à leur âge», explique l'éducatrice: Pourquoi le monsieur a tapé la dame? Est-ce qu’il va venir dans la structure? Est-ce que la police l’a attrapé?

«
C’est un homme fâché contre une femme. Nous, on est en sécurité. La police est là et fait très bien son travail
Les éducateurs de l'APEMS, en réponse aux nombreuses questions des enfants
»

La directrice de la structure relate la réponse donnée par les trois pros de l’éducation sur le moment: «C’est un homme fâché contre une femme. Nous, on est en sécurité. La police est là et fait très bien son travail.» Et d’ajouter qu’il a fallu «leur expliquer que ce n’était pas normal dans la société d’exprimer sa colère de cette façon-là».

Un élément a retenu toute l’attention des enfants qui ont par mégarde assisté à la scène de violence: l’inaction de certains passants. «Des enfants ont dit que des adultes avaient filmé sans agir, relate Karina Pequignot. Cette notion d’inaction des passants est revenue dans leur bouche, alors nous en avons discuté. C’est normal d’être pris par la peur face à de tels actes, de chercher à s’enfuir. Mais sortir son téléphone pour filmer ne doit pas être le premier réflexe.»

Cellule de crise activée par la Ville

«Des éducateurs aux psychologues, en passant par les agents de police et les équipes administratives, les employés municipaux ont fait preuve de réactivité à tous les niveaux», salue Barbara de Kerchove. La cheffe de service évoque les quatre temps de la réaction à cet événement violent: en première ligne, la mise à l’abri des enfants par les éducateurs de l’APEMS; l’arrivée de la police sur les lieux; le déploiement des psychologues sur le terrain, notamment dans les écoles voisines; et enfin la communication en collaboration avec les établissements scolaires, qui «a permis de transmettre rapidement aux parents une information claire et rassurante».

«
Dès que nous avons été informés de la situation à la Ville de Lausanne, nous avons mis en place tout un dispositif d’accompagnement
Barbara de Kerchove, cheffe du service des écoles et du parascolaire
»

Ce n’est qu’une fois la tempête passée et le quartier sécurisé par les forces de l’ordre – vers 8h10 – que les enfants ont pu être amenés à l’école. Les jeunes témoins de l’incident, depuis leur fenêtre ou sur le chemin pour l’APEMS, ont été regroupés dans le collège de Malley. Une partie d’entre eux, scolarisés un peu plus loin au collège de Provence, ont pu se rendre en classe par après. «Dans des circonstances comme celles-ci, on active une cellule de crise, détaille Barbara de Kerchove. Dès que nous avons été informés de la situation à la Ville de Lausanne, nous avons mis en place tout un dispositif d’accompagnement, avec notamment trois psychologues.»

Un traumatisme qui perdure?

Des psychologues scolaires déployés par la Ville ont pris en charge aussi bien les enfants que les trois éducateurs. La cheffe de service souligne une «forte collaboration avec l’école», ce que confirme Karina Pequignot, la directrice de l’APEMS. Cette dernière a cosigné avec le directeur de l’Etablissement scolaire un courrier explicatif que les enfants avaient pour mission de remettre à leurs parents.

Reste à savoir ce que les enfants garderont en mémoire de cet événement. «J’ai été sur les deux sites, et les enfants ne parlaient pas du tout que de ça, relève Karina Pequignot au téléphone. C’est la grande chance de l’enfant de pouvoir rapidement passer à autre chose pour vivre son moment présent.» Cela dit, cet événement assurément marquant pourrait ressurgir, sous forme de questions et d'inquiétudes à plus long terme. «L’équipe éducative, la direction et le corps enseignant ont convenu d’être vigilants dans les semaines à venir», détaille la directrice de l'APEMS de Malley, en évoquant la réalisation d'un bilan dans deux semaines avec les directions du scolaire et du parascolaire, ainsi qu'une psychologue.

La directrice éducative voit même une part de positif dans la réaction d'un voisin face au danger encouru par la victime de violences conjugales: «Le père d'un des enfants de l'APEMS est intervenu pour porter secours à la victime. Les enfants en ont parlé: il y a un héros parmi les familles de la structure.»

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