Ses bonbons sont connus en Suisse et dans le monde entier: la marque Ricola a su conquérir les palais en proposant des pastilles au bon goût de montagne. Ce sont plus de 1400 tonnes d'herbes des alpages suisses que l'entreprise traite chaque année pour sa production. Près de 500 personnes travaillent dans cette entreprise dirigée depuis plus de 90 ans par la famille Richterich. Si son conseil d'administration est dirigé par Felix Richterich, c'est un homme extérieur à la famille qui en est son PDG: Thomas P. Meier. Blick l'a rejoint en vacances dans le Tessin où le temps n'y est pas vraiment radieux: il pleut et les nuages sont bas. L'image d'Épinal parfaite de la montagne ensoleillée Ricola est bien loin.
M. Meier, est-ce que la météo et la pluie risquent de détruire les plantes de montagne dont Ricola a besoin pour sa production?
Thomas P. Meier: Je ne suis pas très inquiet. Les herbes sont robustes et résistantes, sinon elles ne pousseraient tout simplement pas en montagne. Parmi les plus robustes on retrouve la menthe qui pousse souvent spontanément en bord de chemin ou dans de nombreux jardins. Il y a peut-être toutefois une exception: la primevère. C'est une fleur très sensible, et un excès d'eau peut être fatal pour elles. Heureusement nos cueilleurs ont pu la récolter en montagne au printemps, avant que la météo ne se déchaîne.
Connaissez-vous le travail des cultivateurs de montagne qui récoltent vos plantes?
J'ai rendu visite à plusieurs cultivateurs peu après mon entrée en fonction et je suis resté stupéfait. Leur travail est dur, les herbes sont cultivées selon des principes naturels, il y a beaucoup de travail manuel, vous devez désherber et vous ne pouvez pas simplement passer sur un champ avec une machine. Néanmoins, les gens apprécient de travailler pour Ricola, aussi parce que nous offrons des rémunérations justes. Certains cultivateurs travaillent pour nous depuis des décennies.
Quelle est l'importance de l'environnement montagneux pour Ricola?
Je ne peux tout simplement pas imaginer Ricola sans les montagnes. Elles sont indissociables, tout comme la Suisse et Victorinox.
Arrivez-vous à imaginer Ricola dans d'autres montagnes que les sommets suisses? Dans les Andes, les Rocheuses ou encore des montagnes chinoises?
Non. Il existe en effet de longues traditions avec les plantes médicinales dans d'autres régions, notamment en Asie. Mais en termes d'image, nous ne voulons pas quitter les montagnes suisses. Le pays suscite aussi des émotions bien spécifiques et est au coeur de clichés que nous souhaitons entretenir. Le cor des Alpes et Ricola sont connus dans le monde entier. Le «made in Switzerland» est un atout à l'étranger que nous voulons conserver.
Avez-vous pour ambition de produire en dehors de la Suisse?
Ce n'est pas à l'ordre du jour pour le moment. Les herbes sont cultivées ici, et le centre de traitement se trouve à Laufen (BL). C'est là que Ricola s'y trouve le mieux.
Ricola a récemment expérimenté des pastilles vitaminées coûteuses fabriquées aux États-Unis. L'expérience a été interrompue. Quelle est la prochaine étape?
L'équipe américaine a initié et accompagné l'essai. Malheureusement, cela ne s'est pas passé comme prévu. Nous en avons tiré des leçons: le bonbon Ricola est bon pour la gorge, c'est un petit moment de répit. Mais il s'agit d'une friandise de tous les jours et non d'un médicament. Nous ne devrions pas trop nous éloigner de notre offre principale et nous devrions plutôt nous demander comment plus de gens peuvent se mettre à déguster des Ricola originaux.
Comment la pandémie de Covid-19 vous a-t-elle impacté?
Ce n'était pas facile. Nous avons également ressenti les effets de la pandémie. Les affaires dans les aéroports étaient particulièrement mauvaises.
Récemment, on a parlé d'un chiffre d'affaires annuel de 340 millions de francs suisses. Est-ce correct?
En tant qu'entreprise familiale, nous n'avons pas à nous prononcer sur le chiffre d'affaires. Mais je peux vous dire ceci: les chiffres n'ont pas été aussi bons à cause du Covid, mais depuis le deuxième trimestre de 2021, on voit déjà une tendance à la hausse. La situation est en train de revenir à la normale.
Est-ce qu'il y a eu des cas d'infections au sein de l'entreprise?
Sauf au début, pas du tout. Heureusement, nous n'avons pas eu d'épisodes de flambées d'infections et tout à été mis au clair dès le début. Une cellule de crise a été mise en place, à laquelle les employés ont également participé. Il était important pour moi qu'ils se sentent en sécurité dans l'usine. Les règles de distance et les mesures d'hygiène ont été bien accueillies et respectées. Je suis fier de nos collaborateurs.
Comment se passe le télétravail?
Au début, j'étais sceptique quant à son efficacité. Avec l'arrivée de la première vague nous n'avons pas eu le choix. Finalement, ça s'est bien mieux passé que ce que je pensais. Je n'ai pas vu notre directeur général américain pendant un an et demi, ce qui n'a finalement pas posé problème. Mais j'ai ressenti un manque au niveau de l'interpersonnel avec les collaborateurs. Il est également extrêmement difficile de capter tout le monde dans une réunion en ligne.
Vous êtes déjà reparti à l'étranger?
Oui, depuis quelques semaines. Je suis allé en Allemagne, en Italie et aux États-Unis.
Êtes-vous vacciné?
Oui, avec le vaccin Moderna, principalement pour les voyages. Mais dans l'entreprise, nous n'avons pas encore de position définitive sur le sujet. Ici aussi, nous voulons un échange avec toutes les personnes et non une décision venant d'en haut. Nous avons besoin d'un bon équilibre.
À quand le retour du célèbre slogan «Wär häts erfunde» («Qui l'a inventé?», ndlr)?
Nous travaillons actuellement sur une nouvelle campagne. Nous voulons redonner le sourire aux gens, et pour cela, nous collaborons à nouveau avec l'agence Jung von Matt. Jean-Remy von Matt a créé ce slogan dans les années 1990. Il est maintenant à la retraite, mais il a quand même souhaité s'impliquer. C'est Felix Richterich qui l'a contacté personnellement.