Pour forcer le Conseil fédéral à agir
Opération Libero mise sur les jeunes pour son initiative européenne

Le mouvement politique Opération Libero veut surmonter le blocage avec l'Union européenne en forçant le Conseil fédéral à agir, via une initiative. Malgré les critiques cinglantes des partis, Opération Libero continue d'y croire et mise sur les associations d'étudiants.
Publié: 11.07.2022 à 19:03 heures
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Sanija Ameti, coprésidente d'Opération Libero: «L'enjeu est trop important pour que nous laissions notre avenir à un Conseil fédéral sans projet.»
Photo: Keystone
Simon Marti

Opération Libero a réussi à mettre tous les autres partis d’accord. Lorsque le mouvement citoyen national a annoncé à l’automne dernier une initiative européenne, cela a permis de suspendre les querelles internes au sein du Parti socialiste (PS) et du Parti libéral-radical (PLR) sur la position à adopter vis-à-vis des relations avec l’Union des 27.

Malgré leurs divergences idéologiques, les partis de droite et gauche se sont accordés sur un point: obliger le Conseil fédéral à trouver un accord avec Bruxelles par le biais d’une initiative et d’une votation n’était pas la meilleure approche.

Aucun soutien pour le projet

Aucun parti du Conseil fédéral ne voulait entendre parler d’un tel projet. Seuls les Verts se sont montrés favorables à l’idée proposée par Opération Libero. Or les écologistes ne font pas partie du gouvernement.

Malgré toutes les critiques, le texte de l’initiative élaboré par le mouvement politique a été adopté huit mois après son annonce. Fin juin, le comité directeur de l’Opération Libero a inclus les dernières modifications à Berne. Le SonntagsBlick a pu se procurer le procès-verbal de la réunion et le texte de l’initiative.

Si le projet initial exigeait encore du Conseil fédéral qu’il présente une solution avec l’Union européenne (UE) trois ans après l’acceptation de l’initiative, cette demande a été atténuée. Le Conseil fédéral doit seulement être obligé de viser une «conclusion sans délai», est-il écrit. L’exigence principale reste inchangée: le gouvernement serait contraint de négocier et de conclure un accord avec l’UE.

«Nous ne définissons pas le moyen, mais l’objectif»

Avant cela, les partis et les associations doivent être mis sous pression, comme l’indique le procès-verbal de la réunion: «Pourquoi ne participez-vous pas à l’initiative si elle correspond à vos objectifs? Les considérations de politique partisane priment-elles sur la solution de fond dans l’un des dossiers les plus centraux de cette décennie?»

Alors qu’Opération Libero travaille déjà sur l’argumentaire d’une prochaine campagne de votation, elle ne touche pas aux questions de fond délicates, soit les points sur lesquels l’accord-cadre a échoué l’année dernière. Protection des salaires, directive sur la citoyenneté européenne et règlement des différends: les initiants ne les abordent pas.

«Nous ne définissons volontairement pas le moyen, mais le but», explique Sanija Ameti, coprésidente du mouvement politique. Selon elle, le Conseil fédéral est libre de présenter la meilleure solution au Parlement et au peuple: «La seule chose que nous obligeons le gouvernement à faire, c’est de présenter enfin une solution.»

Même des négociations d’adhésion à l’UE seraient possibles après l’acceptation de l’initiative, comme le notent les initiateurs. Non pas qu’une telle démarche ait des chances de réunir une majorité politique dans un avenir proche mais toutes les idées doivent être remises sur la table afin de surmonter enfin le blocage. La coprésidente d’Opération Libero en est convaincue, seule une clarification des questions institutionnelles peut garantir à la Suisse une capacité d’action politique et économique «afin qu’elle puisse renouveler les anciens accords et en conclure de nouveaux».

Coupé du monde de la recherche

L’un des domaines particulièrement visés par cette initiative concerne le monde de la recherche. «La connaissance est notre principale matière première, mais actuellement nous sommes coupés de la coopération en matière de recherche et d’Erasmus et livrés aux intérêts stratégiques de l’UE. Nous ne sommes pas souverains, mais incapables d’agir», critique Sanija Ameti.

Malgré cette conviction, le propre parti de la femme politique, celui des Vert’libéraux, ne soutient pas le projet d’initiative. Malgré des discussions intensives avec les dirigeants des associations et des partis, le nombre d’alliés n’a guère augmenté ces derniers mois. «Nous verrons bien si l’un ou l’autre parti se prononce encore ouvertement en faveur de l’initiative. Notre porte est ouverte», assure la coprésidente d’Opération Libero.

Si le projet ne récolte pas suffisamment de soutien, le Conseil ne se retrouverait pas acculé par un vote: «Nous serons contents si l’initiative n’est finalement pas nécessaire. Mais l’enjeu est trop important pour que nous puissions laisser notre avenir à un Conseil fédéral sans projet et à un Parlement sans courage.»

Les étudiants soutiennent le projet

Si elle ne peut pas compter sur le soutien des principaux partis, Opération Libero peut compter sur le soutien indéfectible des étudiants, notamment sur l’Union des étudiant-e-s de Suisse (UNES). «Les délégués de notre association ont des positions politiques différentes. Mais nous sommes tous d’accord sur cette question: la jeune génération a besoin de toute urgence d’une solution à la question européenne. C’est pourquoi nous soutenons cette initiative», martèle Maxime Barthassat, membre du comité. Pour l’UNES, le programme d’échange estudiantin Erasmus est au premier plan des préoccupations.

«Nous n’avons plus accès à Erasmus. Cela signifie qu’il est beaucoup plus cher pour les étudiants suisses d’effectuer un semestre à l’étranger qu’il y a quelques années», souligne-t-il. Conséquence directe: seuls les étudiants privilégiés peuvent encore se permettre de partir étudier à l’étranger.

Les étudiants semblent confiants. «Nous représentons 120’000 étudiants. Nous avons déjà des groupes dans différentes universités qui sont prêts et motivés pour récolter les signatures nécessaires», conclut Maxime Barthassat.


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