Des dents grincent, à l’Université de Genève (UNIGE). Blick a appris qu’une surprenante offre d’emploi avait été publiée, ce mercredi 26 juillet, sur la plateforme officielle de l’institution qui met en relation universitaires et entreprises. Même si celle-ci a depuis été effacée, nous avons pu la consulter: «Un monsieur âgé seul cherche un-e étudiante 'africain-e' qui [lui] ferait un déjeuner (midi) une fois par semaine et le partagerait avec [lui].»
Cette proposition, rémunérée 30 francs de l’heure, n’a pas tardé à faire réagir. «J’ai reçu plus d’une dizaine de signalements», amorce ce vendredi matin, au bout du fil, Jean-David Pantet Tshibamba, président de l’Association des Etudiant-e-s Afro-descendant-e-s.
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Il développe: «Cette annonce mentionnait explicitement des critères ethniques comme base de sélection, ce qui est problématique. Et, d’après mes informations, bien que cette offre d’emploi émane d’un particulier, l’Université de Genève l’a validée, rédigée, et publiée avant de la retirer à la suite de plaintes.»
Selon l’étudiant, l’UNIGE aurait donc joué un rôle actif concernant cette offre d’emploi. «L’auteur a dicté au téléphone les termes de l’annonce à une collaboratrice de l’université qui a rédigé et publié l’annonce, appuie-t-il. Ceci soulève de nombreux questionnements sur les critères de validation des annonces postées sur la plateforme de l’UNIGE, et sur le comment du pourquoi une telle annonce peut se retrouver sur un site officiel de cette institution.»
Une offre à caractère sexuel déguisée?
Ce jeune homme juge que ce cas est d’autant plus surprenant, «étant donné les nombreuses affaires relatives au racisme, et plus spécifiquement aux discriminations envers les personnes afro-descendantes, qui traversent l’actualité internationale, la Suisse ainsi que le Canton de Genève». Il estime que l’université, elle-même impactée par l’affaire Carl Vogt, «devrait être particulièrement sensible à ces questions».
En outre, toujours pour Jean-David Pantet Tshibamba, cette annonce pose aussi la question de la sécurité des étudiantes et des étudiants. Il évoque la piste d’une offre à caractère sexuel déguisée. «D’après mes sources, une personne a appelé l’auteur de l’annonce, enchaîne-t-il. Et, même si l’annonce était formulée au langage épicène, ce monsieur disait au téléphone chercher spécifiquement 'une femme africaine'. Cela marque encore le caractère suspect de cette offre.»
L’Association des Etudiant-e-s Afro-descendant-e-s veut obtenir des explications. Et des garanties. «Pareille situation ne doit plus pouvoir se reproduire!», tonne son président, qui annonce qu’une lettre ouverte adressée au rectorat sera envoyée dans la soirée.
L’université s’explique
Contactée dans la foulée, l’Université de Genève bat sa coulpe. «L’annonce à laquelle vous faites référence, publiée sur la plateforme 'Emplois étudiants' et retirée de celle-ci, est totalement contraire aux valeurs de l’université, écrit dans un courriel Antoine Guenot, attaché de presse. Sa publication est le résultat d’une erreur d’appréciation et de formulation que nous regrettons vivement.»
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Le communicant assure que des mesures ont d’ores et déjà été prises pour éviter qu’un tel événement ne se reproduise. «Des doubles validations seront effectuées pour les annonces présentant un caractère potentiellement sensible, déclare-t-il. Les processus de validation seront également révisés dans leur ensemble, avec notamment la collaboration du Service égalité & diversité de l’université.»
En outre, Antoine Guenot précise que, lorsqu’une personne qui cherche à embaucher souhaite publier une annonce sur ladite plateforme, il doit tout d’abord créer un compte. «C’est via ce compte qu’il rédige son annonce, enchaîne-t-il. Cette dernière fait ensuite l’objet d’une validation de la part de l’UNIGE. Les collaborateurs/rices (le plus souvent des étudiant-es salarié-es) se chargent de cette tâche, sur la base des critères de l’UNIGE. En cas de doute, ils/elles peuvent faire appel à leur hiérarchie.»
Pour échanger sur l’Afrique
Concernant le cas qui nous intéresse, l’attaché de presse de l’UNIGE indique que l’employeur en question «a rencontré des difficultés lors de la création de son annonce». Il aurait donc souhaité la dicter oralement. «C’est lors de cette étape que son souhait a été mal formulé: selon nos informations, cette personne âgée souhaitait échanger avec une personne originaire d’un pays d’Afrique sur cette thématique, car elle aurait beaucoup voyagé sur ce continent, indique Antoine Guenot. Ce souhait n’a pas semblé problématique, mais il aurait fallu en préciser la raison, car c’est l’absence de cet élément qui confère à l’annonce son caractère très problématique.»
Enfin, l’université rappelle que le respect de la personne est une de ses valeurs cardinales. «Elle proscrit par conséquent toute forme de discrimination, qu’elle se fonde notamment sur les origines ethniques ou sociales, le genre, les caractéristiques génétiques ou encore les opinions politiques, relate Antoine Guenot. Les principes de diversité et d’égalité sont au cœur de l’ensemble des activités de l'institution. Les contenus publiés sur son site se fondent par conséquent sur ces principes.» Sauf accident, visiblement.