Parce que son billet est au nom de sa mère
Un contrôleur de bus menace un adolescent d'une plainte pénale pour une erreur

Un adolescent de 14 ans a acheté sans le vouloir un billet au nom de sa mère. Une erreur qui lui aura valu des menaces de poursuites judiciaires. La mère est indignée. Mais les transports publics suisses ne laissent rien passer.
Publié: 03.05.2024 à 18:59 heures
Un contrôle de billets intransigeant de la ZVV suscite l'indignation.
Photo: Roger Szilagyi/Keystone
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Sarah Serafini

Il suffit parfois de peu pour tomber dans l'illégalité. Ce jeune adolescent de 14 ans le sait désormais. Ce jour-là, il avait prévu de se rendre en bus à Winterthour avec un ami et de passer son après-midi de libre en ville. Avant de prendre le bus, il a acheté un titre de transport – en toute légalité. Il a effectué son achat sur l'application CFF, installée sur son téléphone portable.

Toute la famille de l'adolescent utilise le login de la maman pour acheter des titres de transports. Et c'est là que les choses se compliquent. Lors de l'achat d'un billet, chaque membre de la famille peut choisir à quel nom celui-ci doit être établi. Mais cet après-midi-là, le jeune homme a oublié de cocher la case au bon endroit et a acheté par erreur un billet au nom de sa mère.

Au moment de se faire contrôler, la sentence tombe. Le contrôleur lui annonce que son billet n'est pas valable. Il s'est trompé dans son achat et devra donc payer une amende plus une taxe d'abus de 200 francs au total. Il risque aussi d'être dénoncé. Le pauvre garçon est complètement perdu et ne comprend plus rien. Choqué et brusqué, il appelle sa mère Tamara qui viendra le chercher à la gare.

Le contrôleur n'a aucune pitié envers l'ado

Pour l'exploitant du bus, cette mésaventure n'est pas une simple erreur d'un adolescent sans mauvaises intentions. Il a acheté son billet en toute connaissance des règles. Mais le contrôleur ne fait même pas preuve de pitié lorsque l'adolescent tente de s'expliquer.

En entendant le récit de son fils, Tamara est outrée de l'attitude intransigeante du contrôleur, qu'elle qualifie de «plutôt déplacée». L'événement a continué de préoccuper son fils plusieurs jours après. «Il m'a demandé s'il allait avoir un problème dans le choix de son métier à cause de cette annonce», confie-t-elle au «Beobachter».

C'est «un abus», selon l'entreprise de transport

Le lendemain, la maman décide d'envoyer un e-mail au service clientèle compétent de la communauté de transport zurichoise (ZVV) pour se plaindre. Son fils n'a pas pris le bus sans billet et n'a pas commis d'abus. Et pourtant, il va être mis à l'amende pour ces deux délits, voire dénoncé.

Une collaboratrice a répondu dans un mail détaillé que le fils n'avait pas pu présenter de billet valable – à son nom – et qu'il avait donc été enregistré comme passager sans billet. «En outre, il y a abus lorsque les données personnelles figurant sur le billet ne correspondent pas à celles du passager contrôlé. Même si la tierce personne est un membre de la famille», écrit la collaboratrice.

Par geste de bonne volonté, la ZVV va toutefois supprimer la taxe supplémentaire pour l'abus. La plainte pénale sera également abandonnée. L'amende de 100 francs pour la conduite sans billet valable devra cependant être réglée.

Il n'y a abus que si c'est intentionnel

Tamara Kreder trouve ce geste «sympathique», mais elle n'est pas complètement satisfaite. Selon elle, cela ne change rien à la définition de la ZVV selon laquelle son fils a commis un abus. «Oui, il a fait quelque chose de mal. Mais c'était une erreur, certainement pas un délit», affirme-t-elle.

Il n'y a effectivement abus que si quelqu'un le commet intentionnellement, explique Katharina Siegrist, juriste au «Beobachter». Le contrôleur s'est simplement imaginé que le garçon avait acheté intentionnellement un faux billet. Pour la femme de loi, le fait que la ZVV n'ait supprimé la taxe d'abus que suite à la plainte de la mère n'est pas une preuve de complaisance, mais une évidence. «La situation était suffisamment claire pour reconnaître qu'il n'y avait pas d'intention. La taxe n'aurait même pas dû être prélevée.»

Selon la loi, la raison qui justifie l'absence de billet ou la présence d'un «faux» billet n'a pas d'importance, explique une porte-parole de la ZVV. En principe, tous les passagers sont traités de manière égale et équitable. «Celui qui n'a pas de billet valable est accepté quelles que soient les circonstances», rappelle l'entreprise de transports. Mais il va de soi que les caractéristiques particulières des passagers, comme l'âge en l'occurrence, sont prises en compte.

«Le personnel de contrôle est régulièrement formé au contact des enfants et a pour consigne de les traiter avec circonspection», précise la porte-parole. Cette dernière ne peut pas dire si cela a été le cas pour le jeune de 14 ans. Pour des raisons de protection des données, elle n'a pas accès aux informations précises du cas.

Les CFF aussi sanctionnent durement

La ZVV n'est pas la seule à sévir contre les passagers ayant acheté un faux billet. Dans un cas similaire, les CFF avaient infligé une amende à un jeune de 15 ans qui avait aussi acheté par erreur un billet au nom de sa maman, comme l'avait rapporté le magazine des consommateurs «Espresso».

Pendant son trajet avec le Südostbahn, l'adolescent était tombé sur un contrôle et avait reçu une amende de près de 250 francs ainsi qu'une plainte. Ce n'est que lorsque les parents se sont adressés aux médias que les CFF sont revenus sur leur décision. Tout à coup, ils avaient déclaré avoir réexaminé l'affaire et ont déduit qu'il ne s'agissait effectivement pas d'un abus. La plainte pénale a été retirée et l'amende réduite à 30 francs de frais de dossier.

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