C'est désormais officiel, Donald Trump est le nouveau président des Etats-Unis. Mais qu'est-ce que cela signifie pour la Suisse? L'ancienne conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey a été ministre suisse des Affaires étrangères pendant huit ans. Aujourd'hui encore, elle suit de près la géopolitique, et donc les élections aux Etats-Unis.
Pour Blick, elle s'inquiète des conséquences de l'élection de Donald Trump pour la Suisse. «La Suisse est un petit pays qui fonde sa politique sur le multilatéralisme.» Tout le contraire de Donald Trump, qui parle d'«America first». Cette posture devrait le conduire à un plus grand isolement. Les Etats-Unis pourraient donc se retirer des organisations et des accords internationaux. Genève, siège de l'ONU, serait particulièrement touchée.
«La stratégie de libre-échange remise en question»
La Suisse serait confrontée à de nouveaux rapports de force des grandes puissances. «Une relation tendue entre les États-Unis et l'UE pourrait mettre la Suisse dans une situation difficile, explique Micheline Calmy Rey. Ils seraient alors mis au défi de devoir négocier entre grandes puissances, sans pour autant renoncer à une approche équilibrée.»
L'ancienne ministre suisse des Affaires étrangères craint que les droits de douane et les taxes sur les marchandises n'augmentent désormais. Les entreprises suisses exportent beaucoup vers les États-Unis. «Cela nous touchera directement!» Parallèlement, les investisseurs suisses créent aussi des emplois aux Etats-Unis.
Micheline Calmy-Rey craint toutefois que la concurrence entre les États-Unis et la Chine ne s'intensifie. «De ce point de vue, les États-Unis pourraient augmenter la pression sur nous pour que nous choisissions l'un ou l'autre de nos partenaires commerciaux.» Et cette situation aurait des conséquences. «Une telle formation de bloc remettrait en question la stratégie de libre-échange du Conseil fédéral.»
Moins d'aide pour l'Ukraine
L'élection aura aussi des répercussions pour l'Ukraine. Car Donald Trump veut réduire leur aide. La suite de la guerre s'annonce donc difficile, selon Micheline Calmy-Rey. «Les Européens ne seront pas en mesure de compenser la perte de l'aide américaine», estime l'ancienne conseillère fédérale. La défense pour l'Ukraine sera plus rude. «Les Ukrainiens ont du mal. Ils essaient d'obtenir le feu vert des États-Unis pour l'utilisation d'armes occidentales à longue portée, ce qui n'arrivera pas avec Trump.»
Donald Trump a promis une paix en 24 heures – mais celle-ci risque d'être douloureuse pour l'Ukraine, qui devrait faire de grandes concessions à la Russie. «La défaite de l'Ukraine serait la victoire de la force sur le droit, mais aussi la défaite de l'Europe», affirme la politicienne du Parti socialiste (PS).
Elle s'inquiète pour l'avenir de l'Europe. «L'Europe est faible. L'Europe est divisée.» Jusqu'à présent, l'alliance de défense OTAN a également assuré la sécurité de l'Europe. Certes, Micheline Calmy-Rey ne pense pas que les Etats-Unis vont quitter l'OTAN. Néanmoins, la situation est difficile pour l'Europe, car «elle n'a pas la force de se défendre elle-même».
«Les gens attendent de lui un changement»
L'élection de Trump a été poussée par deux grandes problématiques: l'immigration et l'inflation. Les gens souffriraient de la hausse des prix. «Ils veulent du changement, aussi bien avec la rhétorique qu'en politique.» L'élection confirme leur propre identité. «Harris est une immigrée noire, une femme raisonnable. Trump est le prototype de l'homme d'affaires fort, dominant et prospère.» Les Américains ont voulu quelqu'un «qui soit fort, qui les protège», assure Micheline Calmy-Rey.
Et en comparaison à son premier mandat, Donald Trump serait désormais préparé. «Les gens attendent de lui un changement. Pas seulement dans la rhétorique, mais aussi dans la vie de tous les jours.»