La gauche et les syndicalistes aimeraient que le 3 mars arrive le plus rapidement possible. Et pour cause. Les sondages prédisent actuellement une nette victoire de l'initiative pour une 13e rente AVS. Les partisans du texte craignent toutefois que les opposants gagnent du terrain au cours des prochaines semaines.
D'autant plus qu'une question demeure sans réponse à ce jour: qui financera une telle rente? Le texte de l'initiative ne donne aucune indication à ce sujet.
Aujourd'hui, l'AVS reçoit plus qu'elle ne dépense. Avec environ 50 milliards de francs, la caisse est bien remplie. Une rente supplémentaire pourrait être financée en puisant dans ces réserves. Mais celles-ci ne seraient pas suffisantes. Dès l'introduction de la 13e rente en 2026, l'AVS aurait besoin de 4,1 milliards de francs supplémentaires par an. Et dès 2030, ce montant s'élèverait à 5 milliards, en raison de l'augmentation constante du nombre de retraités.
Une socialiste donne raison aux opposants
Pour le camp bourgeois, il est clair que «le projet n'est tout simplement pas finançable». C'est ce qu'a déclaré la conseillère nationale PLR Regine Sauter à l'hiver 2022, alors que la chambre basse débattait du texte.
Même la conseillère nationale socialiste Jacqueline Badran lui avait alors donné raison: «Vous dites qu'il n'est pas possible d'augmenter les pourcentages salariaux. L'économie ne pourrait pas le supporter. Et vous avez raison», avait ajouté l'entrepreneuse zurichoise.
Qui va payer?
La déclaration de Jacqueline Badran avait surpris jusque dans son camp. Car l'entrepreneuse socialiste se veut proche des syndicats qui ont proposé une hausse des cotisations salariales de 0.4%, pour les employeurs comme pour les employés.
Une solution qui ne fait pas non plus l'unanimité dans le reste de la gauche, pour la simple et bonne raison que le porte-monnaie des salariés ferait les frais de ce mode de financement.
L'hebdomadaire alémanique «Wochenzeitung» a ainsi calculé que pour un salaire de 4000 francs bruts, la déduction s'élèverait à 228 francs, au lieu de 212 actuellement. Soit une baisse de 16 francs. Pour un salaire de 6000 francs, la déduction atteindrait les 24 francs.
Mais la hausse des déductions ne constitue pas la seule option de financement d'une 13e rente AVS. D'autres idées sont également en discussion au sein de la gauche. En voici quelques-une:
Réaffecter des cotisations
Jacqueline Badran milite pour une autre proposition. L'élue socialiste souhaite ainsi réduire les cotisations du deuxième pilier à hauteur de 1%. Une part qui serait réaffectée au financement d'une 13e rente. «Si nous retranchons 1% du deuxième pilier, nous ne le ressentons presque pas. Et si nous transférons ce pour cent dans le premier pilier, nous finançons ainsi une 13e rente AVS, déclare-t-elle à Blick. Avec un autre pour cent, on finance même une 14e rente.»
Augmenter la TVA
Une autre option serait d'augmenter la TVA à hauteur de 1%. Mais une telle hausse entraînerait une baisse du pouvoir d'achat et atténuerait ainsi l'effet positif de la 13e rente. «Les personnes qui souffrent déjà de l'augmentation des primes d'assurance maladie, des loyers et des coûts de l'énergie se verraient imposer des coûts élevés», critique le conseiller national UDC Thomas Aeschi.
Augmenter la contribution fédérale
Une augmentation de la contribution de la Confédération serait également une option. Aujourd'hui, celle-ci assume chaque année un cinquième du budget de l'AVS. En 2022, cela représentait 9,7 milliards de francs. À cela s'ajoutent 3,2 milliards de francs issus de la TVA et 260 millions de francs provenant de l'impôt sur les maisons de jeu.
Une micro-taxe sur les transactions financières
Une autre idée a été mise sur la table par le Conseiller aux États Beat Rieder (Le Centre). Dans une intervention, l'élu valaisan a demandé au Conseil fédéral d'examiner la possibilité de financer une 13e rente AVS en instaurant une micro-taxe sur les transactions boursières. Beat Rieder proposer de prélever 0.1% de la valeur commerciale de chaque transaction sur les marchés financiers. La Confédération pourrait ainsi générer des milliards de recettes.
Taxer les riches
Avec son «initiative pour l'avenir», la Jeunesse socialiste propose un impôt sur les successions de 50%, avec une franchise fixée à 50 millions. Selon leurs estimations, cette taxe permettrait de faire rentrer environ six milliards de francs annuels dans les caisses de l'État.
Ces différents exemples incarnent à eux seuls la plus grande faiblesse de l'initiative: pour l'heure, on ne sait absolument pas comment cette rente supplémentaire pourrait être financée. Les politiciens du pays ont certes d'innombrables idées, mais les familles – en particulier les familles monoparentales – risquent bien d'endurer une hausse considérable de la charge financière supplémentaire. Une chose qui est certainement sortie de la tête des membres du comité d'initiative et de l'Union syndicale suisse.