Le Kremlin a le bras long. Mais s’étend-il jusqu’aux Grisons? Magdalena Martullo-Blocher, patronne de l’entreprise Ems-Chemie, basée à Domat (GR), a interdit à ses collaborateurs d’utiliser le mot «guerre» pour évoquer la situation en Ukraine. C’est ce que rapportent de manière concordante plusieurs journaux alémaniques («Woz» et «Südostschweiz»), se référant à une communication interne.
Les collaborateurs auraient reçu l’ordre de parler de «conflit» et non de «guerre». Une consigne interne explicite a été partagée: «Au sein du groupe Ems, en interne comme en externe, on parlera dès à présent et jusqu’à nouvel ordre de 'conflit ukrainien'. Le mot 'guerre' ne doit pas être utilisé.»
Pour protéger les employés russes?
Le but? Protéger les collaborateurs d’Ems en Russie. «A notre connaissance, les personnes qui parlent de 'guerre' peuvent être poursuivies politiquement en Russie. Nous en avons informé nos collaborateurs», explique le secrétaire général d’Ems Marc Ehrensperger dans la «Südostschweiz».
Le groupe grison de chimie spéciale exploite deux usines en Russie. L’une dans la grande ville de Nijni Novgorod, à l’est de Moscou, l’autre près de la petite ville de Ielabouga, proche de l’Oural. Les deux sont actuellement à l’arrêt. «L’activité économique s’est effondrée», explique Marc Ehrensperger.
Les deux sites emploient une trentaine de personnes chacun et fournissent habituellement l’industrie automobile. Pour l’ensemble des activités d’Ems, le ralentissement temporaire des commandes en Russie n’est toutefois que peu problématique, celles-ci ne contribuant qu’à 1% du chiffre d’affaires du groupe.
Martullo-Blocher veut continuer ses activités en Russie
Les usines étant arrêtées, les collaborateurs concernés en Russie sont occupés à des travaux d’entretien. On ne sait pas si leurs emplois sont en danger. La suite dépendra de l’évolution de la crise, estime Marc Ehrensperger.
Magdalena Martullo-Blocher a toutefois annoncé il y a quelques jours dans une interview au «Tages-Anzeiger» que les affaires avec la Russie n’étaient que temporairement à l’arrêt. «Lorsque la production automobile redémarrera, nous pourrons livrer à nouveau, nous ne laisserons pas nos entreprises à l’Etat russe». La Russie a en effet menacé les groupes occidentaux qui se retiraient de saisir leurs entreprises et sites de production sur son territoire pour les nationaliser si elles passaient à l’acte.
(Adaptation par Alexandre Cudré)