«Avec courage pour l'Europe!» Le slogan sur son profil Whatsapp est tout un programme pour le conseiller national socialiste (PS) Eric Nussbaumer. Au sein de son parti, il se bat en première ligne pour une intégration plus forte dans l'Union européenne. Il s'est ainsi engagé pour l'accord-cadre, qui a échoué en 2021, comme il le fait aujourd'hui pour les Bilatérales III, ou encore pour le «paquet de stabilisation», comme il l'appelle.
Le Conseil fédéral devrait déposer à temps le nouveau paquet européen sous le sapin de Noël de la population. Le gouvernement discutera donc du résultat lors de ses séances des 13 et 20 décembre. Le jour suivant déjà, l'accord devrait être signé à Berne en présence de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
Des populistes de droite dans le bateau?
Pour Eric Nussbaumer, c'est une première victoire d'étape. Mais il est plus que douteux qu'il parvienne à mener cette victoire à son terme. Cela dépendra aussi de la position du Parti socialiste. «Ce qui est décisif, c'est que nous puissions résoudre de manière satisfaisante la question de la protection des salaires», explique le conseiller national. «Des mesures d'accompagnement stables et l'intégration européenne vont de pair dans mon parti.»
Une clause de «non-régression» doit veiller à ce que la protection des salaires soit garantie au niveau nouvellement fixé, quoi qu'il arrive à l'avenir dans l'UE. Eric Nussbaumer espère en outre trouver des compromis en matière de politique intérieure. «Nous devons toujours considérer les deux, la protection des salaires et des contrats fiables doivent se compléter. Je garderai un œil sur le paquet global, et là, il y a de fortes chances que les avantages l'emportent», déclare le socialiste.
Il part du principe que son parti soutiendra donc également l'accord. «Je ne peux tout simplement pas m'imaginer que le PS marche avec les populistes de droite contre la poursuite de la voie bilatérale.»
Scepticisme des syndicats
Donc plutôt avec les populistes de gauche? Du côté des syndicats, le scepticisme reste de mise. «En l'état actuel des choses, nous voyons un affaiblissement significatif d'instruments importants pour la protection des salaires ainsi que des libéralisations néfastes dans les secteurs du rail et de l'électricité», déclare le patron des syndicats et conseiller aux Etats socialiste Pierre-Yves Maillard. «Nous ne pouvons pas soutenir un tel projet.» Selon lui, la reprise de la réglementation européenne sur les frais reste inacceptable.
«Une protection salariale efficace reste la meilleure clause de protection», a déclaré Pierre-Yves Maillard. En même temps, il est essentiel de renforcer encore la protection des salaires par des mesures supplémentaires en Suisse. Il demande en outre que les accords sur le rail et l'électricité soient traités séparément.
Même son de cloche chez Adrian Wüthrich, président de Travailsuisse: «Il nous manque jusqu'à présent des garanties qui assurent noir sur blanc la protection des salaires au niveau actuel», déclare l'ancien conseiller national socialiste. «Si le Conseil fédéral n'en rajoute pas, les risques pour les travailleurs et travailleuses sont tout simplement trop importants.» Selon lui, les signaux envoyés par l'économie sont également décevants. «Au lieu d'améliorer les conditions de travail, on s'en prend de plus en plus au partenariat social.»
Adrian Wermuth insiste sur les mesures de politique intérieure
Des mesures de politique intérieure pourraient rendre le deal supportable pour les syndicats et le PS. «Je souhaite un paquet que nous puissions soutenir. Nous voulons un progrès en matière de politique européenne», déclare le co-chef du PS Cédric Wermuth. Selon lui, la formule nécessaire pour y parvenir est simple: «L'ouverture du marché accompagnée d'une protection sociale.»
Il part du principe que l'accord actuel est nettement meilleur que celui de 2021, mais que la voie empruntée ne peut être menée à terme qu'avec des améliorations de la politique intérieure. «Nous tendons la main à des solutions communes», affirme Cédric Wermuth. Mais ici, l'économie fait barrage. Le Parti libéral-radical (PLR) préfère lui aussi s'accommoder d'un échec de l'accord avec l'UE plutôt que de réglementer davantage le marché du travail libéral ou d'étendre l'Etat social.
Il est donc loin d'être certain que la gauche soutienne finalement le paquet. Le parti risque de se retrouver sur le fil du rasoir entre les turbo-travailleurs de l'UE autour d'Eric Nussbaumer et l'aile syndicale autour de Pierre-Yves Maillard. Un scénario que Cédric Wermuth juge improbable: «Si, au final, la droite s'impose vraiment et abuse de la politique européenne pour affaiblir la protection des salaires et le service public, nous nous défendrons avec les syndicats. Il n'y a pas de divergences à ce sujet.»